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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Mes deux auteurs « en tête de gondole «  sur mon profil, l'un présentant l'autre ! Waouh !
Il faut dire que j'aime les écrivains avec des tripes, les passionnés, et tous deux le sont !
Ils ont une passion commune pour la vérité et l'humanité, jusqu'à en avoir mal à la tête, jusqu'à en devenir fou pour l'un et se suicider pour l'autre !
Donc, je me suis dit, en fouillant dans la belle et fournie librairie du centre ville de Blois :
« Qui, mieux que Stefan Zweig, qui en plus écrit très bien, peut connaître Friedrich Nietzsche, et sa vie intérieure ? »
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Je trouve l'auteur excellent dans tout ce qu'il écrit : ses nouvelles, son roman, ses biographies.
Donc rien de te qu'un Stefan Zweig pour rentrer dans la tête d'un Nietzsche, et quelle tête perturbée !
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C'est en lisant « Ecce Homo », une sorte d'autobiographie de Nietzsche que je n'ai pas encore lue, que Stefan Zweig a fait la lumière sur cet auteur tortueux.
Nietzsche est un lutteur de l'esprit. Il fait les choses à l'envers de ses « collègues ». Après s'être posé comme professeur de philologie à Bâle à 24 ans, il s'échappe à la recherche de la liberté et de la vérité, à différents endroits, dont Sils-Maria, puis Nice et l'Italie. Il est malade des nerfs, trop sensible ( comme l'auteur ), et s'auto-médicalise en allant de ville thermale en ville thermale. Quand il découvre le Sud et sa lumière, il ne revient plus en Allemagne, pays trop triste et trop lourd pour lui. A l'inverse de Goethe et Kant qui posent les bases de leurs réflexions, puis sagement, les développent, comme un arbre grandit en épaississant son tronc, lui est un phénix, qui se consume, accouche d'un livre dans la douleur, puis renait de ses cendres pour attaquer autre chose. Il fonctionne hors des sentiers battus. Ce n'est pas un philosophe, dit Zweig, mais un philalèthe, un pirate, un révolté, un homme toujours en colère,
Zweig insiste beaucoup sur les douleurs de Nietzsche :
1 ) douleur physique, maux de ventre, maux de tête...On le représente plein de vigueur, de force, moustache conquérante, mais c'est un être délicat, qui choisit ses plats avec parcimonie, et qui est pauvre, et, comme un autre génie incompris, Van Gogh à Auvers, finira sa vie intellectuelle dans une petite chambre, à Turin.
2 ) douleur mentale d'être incompris : ses amis s'éloignent de lui, les Allemands ne comprennent pas l'intérêt de ses livres, et il est obligé de financer ses dernières parutions.
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C'est un être passionné et souffrant (pléonasme, puisque passio = souffrance ), comme l'auteur ! Pour ce dernier, Nietzsche est happé par le démon ! D'ailleurs, il n'ose même plus signer ses dernières lettres de son propre nom.
Complètement submergé par la maladie mentale au début de 1889, il souffrira dix ans avant de s'éteindre, mais ça, l'auteur n'en parle pas, par pudeur.
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J'aime Zweig et Nietzsche parce qu'ils ne font pas semblant : ils écrivent avec leurs tripes, avec leurs souffrances, et même si l'un est extrêmement clair, et l'autre extrêmement flou, ils me sont tous les deux attachants, l'un par la description de la souffrance de ses héros, l'autre par l'acuité de sa vision. Zweig le compare à un faucon, alors qu'il était à demi aveugle. Hibou sur terre, mais aigle par l'esprit !
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J'ai lu quelques ouvrages de l'un et de l'autre, et je peux dire que je les connais un peu.
Qu'est ce que Nietzsche m'a apporté pratiquement ?
Plus que Zarathoustra, nouveau Jésus qui franchit la rivière et appelle les gens à le rejoindre sur la montagne, c'est « Humain, trop humain », et « Par delà le bien et le mal » que j'ai appréciés. J'ai senti le « travail laborieux d'accouchement », une sorte de lutte, mais avec des pépites (phrases lumineuses ), qui m'ont amené à bâtir moi-même la construction de l'auteur, à mon niveau.
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« Nietzsche », par Stefan Zweig, est sublime. Tous ceux qui se sont cassés les dents à essayer de lire Nietzsche, devraient peut-être commencer par cette petite biographie lumineuse !
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Autant je suis lassée et blasée par la médiocrité du monde qui m'entoure autant je suis époustouflée par ce que je lis.

"Un essai biographique", donc je découvre l'existence de cette catégorie, de Nietzsche par Zweig. C'était déjà très alléchant mais je suis encore plus surprise par la qualité du contenu. Alors peut-être que certains d'entre vous me diront qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil et me citeront quatre-cent vingt huits références similaires mais pour ma part, je suis émerveillée comme un enfant qui voit le Père-Noël. C'est un chef d'oeuvre à part entière.

Je croyais q'une biographie était un récit dans un ordre chronologique contenant ça et là par des explications qui viennent étayer une thèse sur l'existence de certains événements, influence, traits psychologiques...

Ce sont les mots de Stefan Zweig: il "essaie de représenter la vie de Nietzche"

Ici, l'ordre est thématique et non chronologique (L'isolement, la maladie, le fanatisme, la musique, la folie )même si des repères chronologiques reviennent bien sûr, dans chaque thème.

C'est court. le style est éblouissant, onirique, limpide. Se représenter la vie de Nietzche par tous les sens, les émotions, la description d'une ambiance, des images, des sons, des métaphores filées, c'est le vivre. Certains pourraient lui reprocher une certaine redondance. Stefan Zweig semble avoir une obsession pour les nerfs, le sang (peut-être est-ce le langage médical de l'époque comme à d'autres celui des "humeurs" ou des "méridiens" de l'acupuncture) et "le démoniaque" mais à mes yeux, ça ne lui enlève rien.

Zweig nous dépeint le destin tragique de l'homme à l'oeuvre au destin sublime, l'accompagnant de fines réflexions. C'est bouleversant de voir que la fin de Zarathoustra est accueillie dans la plus grande indifférence, sans éditeur, sans amis à qui l'envoyer... "Tellement la distance entre son génie et l'infériorité de son temps est infranchissable"

Nietzsche, cet être en quête d'absolu, s'affranchissant de tout, surtout de tout compromis à la vérité. Cet heroïsme qui le consume et entraine sa chute. L'évolution incessante de sa pensée qui le déchire comme la peau du serpent qui mue. Sa douleur, sa cécité, sa rémission, sa folie qui épargne sa lucidité et la rend plus aigue encore, comme surnaturelle, "démoniaque" A mesure, que son oeuvre se fait plus puissante, il s'affaiblit comme dévoré par elle

"L'anéantissement de Nietzsche est une sorte de mort par la lumière, une carbonisation de l'esprit par sa propre flamme"

Je ne suis que le deux-centième lecteur sur babelio à le lire et j'ai eu du mal à le trouver en bibliothèque. Seuls trois exemplaires étaient disponibles à la bibliothèque du patrimoine sur demande et recherche d'un bon quart d'heure de la bibliothécaire en réserve alors que quasi tous les livres se trouvent facilement dans chaque bibliothèque de quartier et la grande médiathèque. Quel dommage! Si vous avez l'occasion, n'hésitez pas.

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Un très beau portrait de Nietzsche. de l'homme Nietzsche... Un texte qui met en valeur la sensibilité aiguë d'un philosophe hors du commun...
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Plus jeune, j'ai beaucoup admiré Zweig. Pour son , épuré, élégant et précis, quoique concis. Et c'est sans doute une qualité, d'ailleurs, cette capacité à se montrer précis et éloquent en peu de mots. J'ai toujours trouvé que Zweig était également fin psychologue. Il a une sorte d'empathie qui lui permet de tomber juste quand il est question de sentiments ou d'introspection de ses personnages. Ce qui m'a toujours plu chez Zweig enfin, ce sont ses fins de romans. Jamais je n'ai lu un roman de Zweig qui se termine bien. Il avait le goût de la noirceur, du tragique, du malheur, d'une sorte de fatalité que l'homme doit accepter. Très loin des bons sentiments et des happy-end.

Pourtant, il m'avait semblé, il y a quelques années déjà, en avoir fait le tour.

Et je suis tombée sur ce livre par hasard: je cherchais un livre de Nietzsche, à vrai dire, et l'association de ces deux noms m'a séduite et a attisé ma curiosité. Un admirable qui écrit sur un incomparable, c'est la promesse, logiquement, de quelque chose d'extraordinaire.

Ce livre est difficilement catégorisable. L'éditeur (Stock) indique que c'est un « essai ». Dans la description, en quatrième de couverture, il précise « essai biographique » et « hommage ».

À moi, il semble que ce livre est plutôt un portrait libre de Nietzsche, avec ce que cela suppose de subjectivité de l'artiste qui le dépeint. Il s'agit donc d'un point de vue particulier sur la vie, la pensée et l'oeuvre de Nietzsche. le tout présenté par thèmes, comme autant de tableaux artistiques. Ce livre n'est pas un « essai biographique » au sens où la vie de Nietzsche n'est pas exposée par ordre chronologique, pas plus que sa philosophie n'est reprise ou vulgarisée par idée. Non, ce livre est d'une originalité rare. Il s'agit plutôt d'une description artistique et élégante d'un profil psychologique atypique et d'une intelligence hors normes.

Zweig permet à chaque lecteur de s'imprégner de Nietzsche d'une manière inédite et de le comprendre un peu. Au-delà de sa philosophie, presque: de savoir quel homme il était.

On y lit une grande empathie mais également toute l'estime qu'avait Zweig pour ce philosophe.

La vie de Nietzsche nous est présentée comme une tragédie. Sans décor ni personnages autres que lui-même. Une tragédie faite de solitude atroce, et de pensée pure qui ne rencontre aucune âme amie ni aucune résonance nulle part. Un gouffre, un vide implacable, un état d'isolement en soi-même qui ne connaît pas même d'adversaire à sa taille. Un esprit pur, et tout autour: le vide et le néant. Une grande lucidité impossible à partager, et l'enivrement que cette solitude d'âme engendre. Selon Zweig, Nietzsche est irrésistiblement entraîné par cette solitude profonde, trop différent du commun. le seul permis le troupeau.

Nietzsche, c'est aussi un corps. Une silhouette voûtée de sombres pensées. Un visage puissant, aux muscles tendus de volonté, de santé, et de vigueur. Une attitude courtoise, discrète, une aimable indifférence d'apparence. C'est un corps qui n'absorbe ni alcool, ni café par souci de santé, et qui paradoxalement gobe des somnifères à l'excès, le sommeil étant réservé aux gens qui ne pensent pas. C'est un corps qui souffre de migraines et d'autres maux. C'est un corps qui n'est jamais touché ni caressé par une main amie. Et ce corps malade, douloureux, sensible et seul n'aura de cesse de chercher la guérison. Traquant le moindre indice de maladie, tentant de se soigner seul. Nietzsche était un hypocondriaque méthodique, selon Zweig, surveillant son régime et le climat. Pourtant, ses maladies lui sont sacrées. La souffrance lui permettant de recouvrer la santé, de jouir de sa pleine vitalité à nouveau, de renaître à chaque fois, ivre de son rétablissement et de sa puissance.

Nietzsche est décrit par Zweig comme un Don Juan de la pensée, jamais rassasié par l'idée qu'il vient de soumettre, de faire sienne, et ne trouvant d'extase que dans la conquête d'une pensée nouvelle et vierge, négligeant tout à fait celle qui lui est déjà acquise. Et cette métaphore, je l'ai trouvé splendide. Elle dit tant de ce fonctionnement hors normes: Nietzsche ne s'est jamais contenté d'entretenir une pensée, de se reposer sur elle comme un acquis, d'être fidèle à une idée conquise. Jamais! Aussitôt qu'il la savait sienne, elle n'existait plus et il partait en quête d'une plus élevée.

Nietzsche est aussi esclave de vérité, la traquant, lui sacrifiant tout. Il renonce à chaque plaisir terrestre au profit de la saine vérité. La vérité comme une fin et un moyen. La vérité comme unique but, comme seule maîtresse et amie.

Nietzsche, le penseur qui ne sera ainsi jamais fidèle à ses propres convictions antérieures, n'ayant aucune doctrine définitive, ne connaît que des transitions. Une vérité venant en balayer une autre. Et il éprouve l'obligation de se détruire entièrement pour se reconstruire sur cette idée nouvelle, plus grande et plus éclatante. Ainsi, Nietzsche n'aura pas été un, mais une multitude d'individus subissant sans cesse de brutales transformations à mesure qu'il développait une pensée inédite.

Nietzsche était un Homme sans patrie, sans foyer, sans attaches, sans passé, sans regrets, sans religion, sans morale, sans nostalgie. Ainsi, il était un philosophe est libre. Il était la liberté par excellence, refusant chaque chaîne, chaque entrave à l'élévation de sa pensée .

Sa seule faiblesse, son unique divertissement selon Zweig , son seul repos, était la musique. Elle le transporte, le bouleverse et l'apaise tout à la fois. Elle est son poison et son remède. La musique est, pour ainsi dire, le seul abandon qu'il s'autorise.

Et son art à lui est musique également. Son est comparé une symphonie, à une partition travaillée, à une oeuvre esthétique et splendide.

Enfin, j'ai réalisé une chose très importante en lisant ce livre. J'ai eu comme une révélation d'une idée que je soupçonnais déjà en loin, mais qui m'est apparue comme une certitude soudain: la bêtise et l'ignorance n'ont peut-être rien de contemporain. Nietzsche était seul, si seul déjà. de tous temps peut-être, les traqueurs de vérités et les esprits qui remettaient en cause la morale et le commun ont été perçus comme des espèces de monstres non seulement, mais surtout ces intelligences, toujours, n'ont trouvé que des murs infranchissables en réponse à leurs idées. Ainsi, Nietzsche n'était ni écouté ni lu. Ses contemporains, si inférieurs, n'ont donné aucun crédit à son génie. Il leur était bien trop haut pour leur être accessible.

Nietzsche n'aspirait même pas à être applaudi ni admiré. Il aurait voulu ne serait-ce qu'une réaction: qu'on le contredise, qu'on juge son , mais qu'on réagisse à ses livres! Qu'enfin, quelqu'un lui apporte une preuve d'humanité! Hélas, ne reçut que des silences assourdissants en échange de ses écrits.

Ce livre est un exercice de . Une oeuvre faite pour être belle, somptueuse, délicate. À la manière d'un peintre qui aurait choisi le modèle, l'éclairage, le décor. N'importe si le portrait est juste (il est automatiquement biaisé par le point de vue de Zweig), c'est beau. Ce portrait est une oeuvre d'art... comme Nietzsche était, à lui seul et par sa singularité et sa grandeur d'esprit, une oeuvre d'art.

Si vous connaissez Nietzsche, ce livre ne vous apprendra rien. Pourtant, il suffit d'être sensible à cette forme de prose poétique. Sensible à la manière dont on regarderait un portrait d'une personne connue: l'émotion peut malgré tout venir, provoquée par la patte de l'artiste.

Ce livre est un poème de cent-cinquante pages à la gloire de Nietzsche.

Nietzsche comme n'étant pas tout à fait homme. Ou bien, comme étant le seul homme.

Et il est difficile, après la lecture de cette oeuvre, de ne pas se sentir un peu fasciné par Nietzsche.
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Établir la biographie de Nietzsche : Quel challenge !

Et Stefan Zweig l'a relève avec brio. Ici pas d' accumulation de dates que nous aurons oubliées une fois la page tournée, point d'ordre chronologique, point de trop.

Juste l'essentiel. Une plume aguerrie qui nous fait renter un temps soit peu dans la tête de cet homme torturé et douloureux.
C'est rapide. Ça mérite d'être relu. C'est une magnifique production qui nous permet d'apporter une pierre a l'édifice de la compréhension de Nietzsche et de son oeuvre.
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Stefan Zweig est sans doute mon écrivain préféré. le lire dépeindre Nietzsche m'a ravie.
Une nouvelle fois, j'ai été subjuguée par son expertise et par sa plume.
Zweig est le genre d'écrivain qui vous chuchote au creux de l'oreille. Il vous embarque avec lui et ne vous lâche plus avant la fin.

C'est en quelque sorte la rencontre de deux monstres intellectuels: l'un donnant, l'autre recevant.

Quiconque s'intéresse à Nietzsche y trouvera un grand intérêt.
Un livre percutant et instructif.
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Une biographie originale au style incroyable.
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