Dans
le Passé sous silence, la suite du Pont de la Révolte, la troisième personne du singulier cède définitivement le pas à la première et au récit personnel de Denis Forestier fils de Louise Dorvant et de Da Mohand Aït-Salem. Amère constatation de tant d'années, de décennies même, de perdues à cause de l'opiniâtre silence d'une mère égoïste et bornée, bien décidée à emmener son secret de Polichinelle dans sa tombe. Elle écrit d'ailleurs à son fils, pour son anniversaire, alors qu'il a passé la cinquantaine, qu'il est issu d'une racine pourrie.
Quelle mère digne de ce nom peut ainsi insulter son fils, son propre passé et tout un peuple? Tout au long du roman, on sent Denis en proie à l'emprise terrible et terrorisante de Louise et de son mari, un gougnaffier je sais tout insupportable de préjugés et d'autosatisfaction.
Cette suite est plus difficile à lire que
le Pont de la Révolte tant, justement, la branche maternelle est révoltante dans ses actes et dans ses paroles. C'est, à mon avis, elle la racine pourrie de l'Histoire.
En tout cas, ces deux romans autobiographiques montrent à quel point secrets de famille, tabous honteux et mensonges peuvent gangrener les fondations d'une vie entière. Impossible d'en faire abstraction lorsqu'on est déchiré par le besoin de savoir, de connaître la vérité, de ne pas rester avec cette moitié de soi issu d'on ne sait où.
Un ouvrage vibrant d'émotions souvent violentes mais dont la lecture m'a permis d'avancer. Pour cela, un immense merci Monsieur Prévost!