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EAN : 9782070364176
123 pages
Gallimard (12/07/1973)
3.58/5   278 notes
Résumé :
"" Je suis content, bien content, que nous nous soyons rencontrés... je ne pensais pas que nous pourrions être camarades.
- Et pourquoi ? " demandai-je avec une sincère surprise...
Sa main qui continuait d'étreindre la mienne, comme s'il eût voulu s'attacher à moi, trembla un peu. Ce ton et ce frémissement me bouleversèrent. J'entrevis chez cet être si différent des autres une détresse intime, persistante, inguérissable, analogue à celle d'un orpheli... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (32) Voir plus Ajouter une critique
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Un court roman publié voilà près de cent ans, en 1922. Et pourtant, quelle actualité dans ce texte!

Plusieurs thèmes sont abordés avec un grand talent : l'amitié d'abord, et à travers elle, la culture littéraire, puis l'antisémitisme, l'altruisme, la volonté du narrateur de remplir une mission en tentant de protéger son ami juif, développant une vénération sous laquelle on sent pourtant percer parfois un dégoût sous-jacent quant au physique de Silbermann, et puis les renoncements.

Deux personnalités, l'une très forte, celle de Silbermann, victime de la haine raciale, de la condescendance forcée des bien-pensants, l'autre bien plus faible, le narrateur, qui voudrait bien devenir un héros et qui reste une pâle figure.

Le jeune Silbermann est magnifique de lucidité, le narrateur voit chez lui de l'arrogance, se convainquant peut-être que celle-ci est dans les gênes de Silbermann, tandis que celui-ci est l'archétype de l'anti-héros aux yeux de ses collègues de classe.

Et puis les adultes, spécifiquement les enseignants et surtout les parents du narrateur, perdus dans un monde carriériste, au point d'être les acteurs du premier renoncement, qui leur vaudra une détestation éphémère de leur fils, le narrateur.

Le livre se termine sur une magnifique tirade de Silbermann sur le pourquoi de l'antisémitisme. L'auteur ne donne pas toutes les réponses mais en effleure quelques-unes.

Et pour conclure, un final superbe. le narrateur qui décrivait si bien "les deux paumes désarmées" de Silbermann, qu'il comparait à celles du Christ en croix, entendra-t-il le chant du coq lorsqu'il proférera, à la dernière page, l'ultime réplique?
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Silbermann, jeune lycéen devient l'objet de persécution parce qu'il est juif. Seul le narrateur va se lier d'amitié avec lui et va se donner pour mission de le protéger. Cette amitié devenue fusionnelle va être brisée par cette montée progressive de l'antisémitisme.
Il n'est pas aisé de dire que l'on n'a pas été touché par cette histoire car le thème est évidemment révoltant mais ici, contrairement à l'ami retrouvé de Fred Uhlman , livre qui est souvent mis en parallèle , je n'ai pas été touchée. J'ai lu ce livre avec une certaine distance. Cela vient du fait que le personnage de Silbermann n'est pas sympathique, son arrogance, son regard et son jugement hautain n'engendrent pas d'attachement. Bien sûr, on comprend qu'il s'agit sans doute d'une attitude lui permettant de faire face aux brimades, une sorte de carapace en soi, mais malgré tout, il reste froid et je n'ai par réussi à avoir de l'empathie pour ce jeune homme.
Malgré cette distance envers Silbermann, Jacques de Lacretelle arrive à créer un climat noir où l'on ressent le danger des persécutions et leur escalade.
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Si vous avez aimé « Alliocha » de Troyat et/ou « L'ami retrouvé » de Fred Uhlmann, vous adorerez « Silbermann » de Jacques de Lacretelle… Et puis même si vous n'avez pas lu les deux autres, vous apprécierez très certainement cette histoire d'amitié entre adolescents…

Deux adolescents, Silbermann et le narrateur ; un juif (Silbermann) et l'autre protestant (le narrateur dont on peut raisonnablement penser qu'il s'agit de l'auteur lui-même) ; un très érudit (Silbermann) et l'autre beaucoup moins…
Témoin des brimades dont est victime Silbermann, le narrateur se liera d'une amitié quasi fusionnelle avec celui qui deviendra en quelque sorte son mentor. D'autant plus que le père de celui-ci, antiquaire se verra accusé de vol par un journal antisémite et que le père du narrateur se verra confier l'affaire en tant que juge…

Un texte remarquable et d'une grande force… même si le thème abordé a souvent été traité avec plus ou moins de bonheur ; mieux un texte visionnaire : écrit en 1922, il anticipe largement les événements futurs de persécusion des juifs.
Un roman qui reçut à sa sortie le Prix Fémina et qui figurera en 1950 dans la liste du « Grand Prix des Meilleurs romans du demi-siècle ».

Le coin du bibliophile : mon exemplaire est daté du 30 avril 1927. Il s'agit du N° 1406 sur papier « chiffon de Bruges » filigranné « à la gerbe »
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Prix Fémina 1922 (oui, le prix existait déjà à cette époque !), ce bref roman nous plonge dans un monde aujourd'hui disparu, celui des lycées de garçons, qui plus est, ici, un lycée parisien très bourgeois, fréquenté notamment par les rejetons des familles catholiques et huppées de la capitale. le narrateur, dont la famille est, quant à elle, protestante, voit arriver en début d'année un élève plus jeune que ses condisciples mais qui se montrera vite très brillant. le narrateur découvrira vite que ce camarade, Silbermann, est juif et qu'il est peu à peu ostracisé par la plupart des autres élèves. Ce rejet dont il est victime et les capacités intellectuelles hors du commun de Silbermann, pousseront le narrateur à fréquenter de plus en plus ce jeune homme en dehors des cours et aussi à prendre sa défense, ce qui lui coûtera l'amitié qu'il avait jusqu'alors avec l'un des élèves catholiques.

Je me garderai bien de dévoiler la chute de ce court roman mais je dirai seulement qu'elle est assez surprenante et en particulier les tout derniers paragraphes. La dernière phrase m'a vraiment interpellé.

La lecture de ce livre peut être aujourd'hui dérangeante car, même s'il manifeste une volonté de passer outre aux différences entre les religions et les comportements, il n'est pas sans utiliser des clichés pour dessiner le portrait du jeune juif Silbermann, notamment dans ses caractéristiques physiques et son comportement orgueilleux . En me renseignant un peu plus sur l'auteur, j'ai découvert (via Wikipedia) que Jacques de Lacretelle apportait, semble-t-il, un certain crédit aux thèses nauséabondes de Gobineau sur les "inégalités raciales". D'où découle, peut-être, l'ambigüité de certaines pages de ce roman et tout particulièrement de sa chute qui peut être interprétée de différentes façons.

C'est néanmoins un livre intéressant qui témoigne du fort antisémitisme présent dans la société européenne, et notamment en France, en ce début du XXe siècle.
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Livre limpide où s'exprime l'insupportable souffrance de ce jeune juif, rejeté par cet antisémitisme aussi abject que pernicieux.
Non, Silbermann n'est pas fort sympathique dans sa fierté et son mépris, sa naïveté, son côté "je sais tout"... Sa formule de défense maladroite qui attise l'hostilité et le rend plus vulnérable. Son avidité d'être reconnu comme meilleur, supérieur.
Mais Silbermann fascine le narrateur, fils de juge et protestant qui se donnera pour mission d'être l'ami du réprouvé. Mission noble, exaltée et naïve pour cet adolescent épris d'absolu et de littérature.
Et Silbermann disparaîtra de la vie du narrateur, non sans avoir jeté son cri de dépit face à un pays qui le rejette, dans lequel il a le sentiment de ne pouvoir s'accomplir. Cri de désespoir, qui résume toute l'atroce histoire de l'antisémitisme en France et en Europe.



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Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
-- Je suis content, bien content, que nous nous soyons rencontrés... Je ne pensais pas que nous pourrions être camarades.
-- Et pourquoi ? demandai-je avec une sincère surprise.
--Au lycée, je te voyais tout le temps avec Robin; et comme lui, durant un mois, cet été, a refusé de m'adresser la parole, je croyais que toi aussi... Même en classe d'anglais où nous sommes voisins, je n'ai pas osé...
Il ne montrait guère plus d'assurance en disant ces mots. sa voix était basse et entrecoupée; elle semblait monter de régions secrètes et douloureuses. Sa main qui continuait d'étreindre la mienne, comme s'il eût voulu s'attacher à moi, trembla un peu.
Ce ton et ce frémissement me bouleversèrent. J'entrevis chez cet être si différent des autres une détresse intime, persistante, inguérissable, analogue à celle d'un orphelin ou d'un infirme. Je balbutiai avec un sourire, affectant de n'avoir pas compris :
-- Mais c'est absurde... pour quelle raison supposais-tu...
-- Parce que je suis juif, interrompit-il nettement et avec un accent si particulier que je ne pus distinguer si l'aveu lui coûtait ou s'il en était fier.
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Je me souviens du jour où j’ai ouvert pour la première fois les Mémoires d’Outre-tombe. Je ne connaissais que le Génie du Christianisme ; je jugeais mal Chateaubriand ; je n’aimais pas ces tableaux pompeux et froids. Et tout à coup, je contemple Combourg ; je découvre le passage sur l’Amérique, sur l’émigration, je suis entraîné dans le tumulte prodigieux de ce cerveau… Quelle fièvre m’a saisi ! En moins d’une semaine, j’ai dévoré les huit volumes. Je lisais une partie de la nuit et, lorsque j’avais éteint la lumière et fermé les yeux, certaines phrases restaient dans ma tête comme des feux éblouissants qui me tenaient éveillé.
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J’eus la vision d’une vie pénible et dangereuse au cours de laquelle on s’écorche d’avantage chaque jour. Et vers quel but ? Ne savais-je point maintenant que sur les sommets auxquels j’avais rêvé d’atteindre, nul humain ne vivait ?

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Les choses commencèrent par des taquineries assez innocentes lorsque Silbermann se mettait à pérorer et à gesticuler. Silbermann aggrava ces taquineries et les fit persister par sa façon de tenir tête et sa manie « d’avoir le dernier mot » ; elles furent un peu encouragées aussi par l’insouciance de la plupart de nos professeurs qui, malgré ses bonnes places, n’aimaient pas Silbermann. On s’en aperçut bien le jour où l’un d’eux, irrité de le voir venir trop souvent près de sa chaire, le renvoya avec une phrase brusque et cinglante que tout le monde entendit.
Bientôt, pendant les récréations, ce fut un amusement courant d’entourer Silbermann, de se moquer de lui et de le houspiller. Sitôt qu’il apparaissait :
— Ah ! voilà Silbermann, disait-on. Allons l’embêter.
On le bousculait, on prenait sa casquette, on faisait tomber ses livres. Silbermann ne se défendait pas mais il ripostait d’un trait qui, le plus souvent, frappait juste et exaspérait l’assaillant.
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J'étais d'une insensibilité totale devant tout texte scolaire; les mots sur les livres d'étude avaient à mes yeux je ne sais quel vêtement gris, uniforme qui m'empêchait de distinguer entre eux et de les saisir.
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Des messages portés par les nuages : lettres à des amis Jean d'Ormesson Jean-Luc Barré, Martin Veber Éditions Bouquins
Recueil de lettres reflétant la grande diversité des correspondants de l'écrivain français : Marguerite Duras, Michel Déon, Raymond Aron, Jacques de Lacretelle, Jean-François Brisson, Roger Callois, Jeanne Hersch, Claude Lévi-Strauss, Simone Veil, Michel Debré, entre autres. Un dévoilement des jugements littéraires de l'auteur, de ses admirations, de son intimité et de son engagement d'écrivain. ©Electre 2021
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