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Critique de Apoapo



Il est toujours difficile d'extraire une pensée de textes fragmentaires, d'aphorismes, maximes et autres citations surtout lorsque l'auteur, génial et éclectique s'il en fut, n'est pas un homme de lettres et même, apparemment, était un vrai cancre en latin et un peu désinvolte dans l'orthographe du toscan (ça, par contre, c'est normal) : les matheux, ça a souvent été ainsi !

L'impression générale qui se dégage de ces trois types de bons mots est qu'ils furent prononcés dans des contextes mondains et facétieux.
Les maximes, cependant, sont parfois très austères, comme celle qui ouvre le recueil :

"Tu fais mal si tu fais l'éloge de quelque chose que tu ne comprends pas bien ; et si tu blâmes, tu fais plus mal encore."

ou bien des réponses plus ou moins bilieuses à des critiques qui devaient blesser sa susceptibilité, surtout lorsque son érudition ou sa méthode résolument empiriste étaient contestées :

"Celui qui dans une discussion se réclame de l'autorité ne met pas en oeuvre l'intelligence mais plutôt la mémoire." (p. 17).

Colère et facétie font parfois bon ménage et je retiens cette bordée d'injures qui pourra sans doute être utile un jour où l'un d'entre nous aurait maille à partir avec certains collègues ou supérieurs hiérarchiques, sait-on jamais :

"En voilà quelques-uns qui méritent qu'on les appelle ainsi et pas autrement : tuyaux à nourriture, entasseurs de fiente, remplisseurs de chiottes. Par eux, rien d'autre n'apparaît au monde, aucune vertu jamais ne s'accomplit, et à la fin il ne reste d'eux que des chiottes pleines." (p. 36).

Parmi les fables, on trouve certains motifs classiques comme les thèmes animaliers ou l'anthropomorphisme des objets et éléments naturels afin d'en tirer parfois une moralité, d'autres fois de l'humour. Mais là aussi il est quelquefois difficile de rire, sauf des grivoiseries explicites ou des paillardises ouvertement anticléricales - ou des deux conjointement. le sexe et la désacralisation sont à l'évidence parmi les rares intemporels...

Même considération pour les devinettes, avec de surcroît la difficulté due à la différence des objets quotidiens qui nous entourent. Cependant il y en a une, aussi philosophique que prophétique, qui semble contredire tout ce que j'ai dit jusqu'ici. Elle nous frappe par sa modernité et son esprit "altermondialiste" :

"On verra des animaux peupler la terre et combattre entre eux, et s'infliger de grands dommages, et souvent se donner réciproquement la mort. Leur méchanceté ne connaîtra pas de limite. de leurs membres cruels, ils jetteront à terre une multitude d'arbres des grandes forêts du monde ; et, lorsqu'ils seront repus, ils assouviront leurs désirs en semant la mort, et l'angoisse, et la souffrance, et la peur, et la déroute parmi toutes les créatures vivantes. Leur orgueil sera si démesuré qu'ils voudront s'élever dans les cieux [...] Rien sur la terre, ni sous la terre, ni sous l'eau ne sera à l'abri ; ils pourchasseront, saisiront, abîmeront toutes les choses, les enlevant parfois d'un pays à un autre. [...]" (p. 110-111)

Pas besoin de révéler qui ils sont, n'est-ce pas ?
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