Luperca. Cette louve qui a sauvé Romulus et Rémus d'une mort certaine est une légende mais par la mythologie elle représente ce que la nature a créé et qu'on ne peut dissocier : les hommes et les animaux, ces derniers étant présents sur terre bien avant le premier Homo. Une louve ancêtre pour bâtir non seulement Rome mais les fondements de la terre, du mont Palatin aux hauteurs du Mercantour.
Ce Mercantour où dans le début des années 90, Jacques Audibert retrouve le cadavre d'un loup. Dans le secret le plus total, le loup est examiné, autopsié, son ADN prélevé. D'où vient-il ? Qui est-il ? Où allait-il ? C'est le début d'une nouvelle odyssée, celle d'un loup qui était revenu dans l'Ithaque du Mercantour, la toile de la nature se reformant et c'est cette histoire que nous raconte
Caroline Audibert, la fille de Jacques.
Autant le dire de suite, ce récit est un enchantement. Enchantement par l'écriture, enchantement par la rigueur des recherches, enchantement pour l'objectivité dont fait preuve l'auteure, ne mettant jamais dos à dos loups et éleveurs mais essayant de comprendre les deux parties.
Si vous avez eu la chance un jour de fouler le sol des alpages, vous vous y retrouverez instantanément en tournant les pages. C'est aller un peu plus vers le ciel, c'est sentir l'humus, ce sont des pierres qui roulent sous vos pieds, le froissement des végétaux, c'est la découverte d'une fleur, d'un papillon inconnu, l'espoir de rencontrer un animal dit sauvage et, aussi, l'écoute de la nature, celle de tous les bruits, de tous les silences, de tous les souffles représentant la liberté.
L'épopée romanesque va faire remonter progressivement les traces du retour du loup en France, arrivant probablement d'Italie (Luperca bis), décrire les phases d'adoption des nouveaux territoires et ses modes de déplacements dans la montagne, cette montagne aux couleurs de son pelage. Hélas, sa présence va semer la terreur parmi les troupeaux de brebis et le désespoir des éleveurs. Autant on souhaite que la nature reprenne ses droits, autant on ne peut rester insensible à la détresse de ces bergers devant un troupeau dévasté. Car ces bergers ne pratiquent pas une agriculture intensive, ils respectent leurs bêtes et tentent de leur offrir la meilleure vie possible en les faisant brouter dans les alpages, en leur faisant voir le ciel et le soleil. Une agriculture responsable loin des usines d'élevage où les animaux sont enfermés nuit et jour. Comment faire concilier les deux protagonistes, comment accepter le loup sans qu'il rentre dans la bergerie ?
C'est un travail sans relâche, parfois de Sisyphe, à la fois pour ceux qui veulent protéger la nature et ceux qui veulent maintenir une agriculture répondant aux normes de la bienveillance animale.
Du mythe d'Arcadie à la parabole des deux loups (histoire en forme de leçon de vie, envoyée par un détenu et à découvrir page 247), une lecture qui engage une réflexion sur le rôle de l'homme et ses limites. Car est-ce à lui seul de décider si telle espèce doit continuer à vivre ou non ? Est-ce à lui de prendre tous les pouvoirs ? Certainement pas. La nature reprend ou reprendra ses droits, parfois pour le pire à cause de la main de l'homme et non de la patte de l'animal.
A constatation s'ensuit à trouver des solutions. En dehors de la collaboration, le dialogue à entretenir entre bergers et défenseurs des loups, le meilleur atout pour aider l'homme est à nouveau un animal : le patou, ce montagne des Pyrénées qui sait défendre moutons et brebis comme son bien le plus précieux. Et puis, l'ancêtre du chien est le loup…
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