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EAN : 9782412055250
224 pages
First (16/04/2020)
3.62/5   16 notes
Résumé :
Pourquoi la sexualité est l'autre charge mentale des femmes.


La charge mentale et le travail émotionnel, ça vous parle ? La charge sexuelle, c'est la manière dont ces concepts se déclinent dans l'intimité des femmes et pèsent sur leur sexualité. Concrètement, il s'agit d'une somme d'injonctions : s'apprêter pour plaire, s'inquiéter du désir de l'autre, de son plaisir, prendre en charge la contraception, les projets d'enfants ou la santé sexuel... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
La charge sexuelle, c'est quoi ?


Dans un article publié sur le site de Slate en 2019, la journaliste Clémentine Gallot s'attaquait déjà à la charge sexuelle qui pèse sur les femmes dans les couples hétérosexuels : susciter le désir, s'occuper de la contraception ou encore s'assurer de la jouissance de l'autre sont autant de tâches qui reviennent systématiquement au sexe féminin.

Concrètement, ce « labeur sexuel invisible » comprend le fait de s'inquiéter du désir et du plaisir d'autrui (parfois au détriment du sien), d'être désirable, d'avoir de l'expérience « mais pas trop » (car il faut être "respectable"), de s'occuper de la contraception et des problématiques médicales mais aussi de subir les nombreuses injonctions qui pèsent sur le corps féminin. Mises bout à bout, ces charges orgasmique, médicale, contraceptive et esthétique forment le fléau de la charge sexuelle.

De l'interdiction à l'injonction

Malgré la « libération sexuelle » opérée ces dernières années, les inégalités n'ont pas disparu du jour au lendemain et de nouvelles contraintes sont même venues s'ajouter à la charge des femmes. Les injonctions de l'année 2020 ? Réussir sa vie sexuelle à tout prix, jouir sans entraves, connaître son corps, son point G, son Deep Spot, savoir pratiquer le "squirting". Il faut innover, pimenter, surprendre l'autre pour ne pas tomber dans la ô combien effrayante routine. « En un siècle, on est passé de l'interdiction (dans un 19ème siècle répressif) à l'injonction, donc la transition est forcément compliquée, il y a forcément des continuités et des ruptures. Plusieurs raisons à cela : d'abord la libération sexuelle des années 60, qui a surtout libéré les hommes (cis, hétéros) -attention nous ne remettons pas en cause les acquis féministes des années 70. Ensuite, le capitalisme, qui induit un rapport utilitaire et de consommation à la sexualité (il faudrait à tout prix réussir sa vie sexuelle, en avoir une plus grosse quel le voisin). » explique Clémentine Gallot, co-autrice de l'ouvrage.

Lire aussi la tribune de Caroline Michel : Non, je ne trouverais pas mon point G, mon Deep Spot, mon clito

Cette pression sexuelle incombe davantage aux femmes. « Celles-ci pâtissent du revers de la médaille : ayant obtenu droits et libertés, il leur est désormais fortement suggéré de les mettre en pratique » écrivent les journalistes. Pour Clémentine Gallot, « le problème des injonctions c'est qu'elles sont toujours à sens unique et dirigées vers les mêmes personnes. Et en matière de sexualité, il y a l'injonction à jouir mais elle s'accompagne toujours d'un discours ambivalent (donc impossible à atteindre) : par exemple, incarner à la fois l'exhibition et la pudeur ». La femme doit être à la fois la maman et la putain. On en revient aux contradictions impossibles à résoudre et à la charge esthétique : être sexy mais pas trop.

Une éducation sexuelle minimum qui manque d'inclusivité

Dans leur essai, Clémentine Gallot et Caroline Michel reviennent sur les représentations du genre et des sexualités à l'école. Et pour cause, en 2020, l'éducation à la sexualité réveille encore les tensions. Récemment, la Secrétaire d'Etat chargée de l'Egalite entre les femmes et les hommes devait encore démentir des rumeurs circulant à propos d'un soi-disant apprentissage de la masturbation à la maternelle. Entre crises de confiance entre parents et enseignants et frilosité moralet, l'éducation sexuelle, pourtant obligatoire depuis 2001, reste peu encadrée et souvent négligée. Nombreux considèrent que la sexualité est abordée à travers les cours de reproduction en SVT, mais où sont les cours et questions sur le consentement, l'égalité femmes-hommes, le sexisme, la lutte contre l'homophobie et la transphobie, ou tout simplement, le plaisir ?

« Dans l'Enquête sur la sexualité en france, c'est l'école qui est citée comme étant la première source d'information sur la sexualité (l'enquête date de 2006 donc on peut supposer qu'aujourd'hui internet joue un rôle important aussi). Quoiqu'il en soit, les guides qui sont fournis au corps enseignant sont obsolètes et peu inclusifs, et surtout le discours français majoritaire est celui d'une représentation différenciée de la sexualité (les filles d'un côté, les garçons de l'autre), au lieu de souligner les similitudes (tout le monde est excité, tout le monde jouit) comme dans d'autres pays, telle la Suède » abonde Clémentine Gallot. Et d'ajouter : « Bref, au lieu de transmettre du savoir, on produit de l'analphabétisme sexuel ». C'est d'ailleurs le titre d'une tribune du Monde qui dénonçait la représentation tronquée du clitoris dans les manuels de SVT et ses conséquences.

La charge sexuelle serait donc façonnée dès l'enfance, lors de la transmission des idées sur la féminité et la masculinité (les filles sont romantiques et les garçons davantage portés sur le sexe). « En accentuant les différences, on contribue à les construire : c'est un cercle vicieux » écrivent les autrices qui estiment quue le minisète de l'Education gagnerait à s'inspirer, en partie, d'un modèle suédois qui valorise les sexualités féminines.

Pour sortir de cette charge sexuelle, les journalistes proposent plusieurs pistes dans leur livre. « Cela se fait en deux temps : d'abord la responsabilisation individuelle (comme on a pris conscience de la répartition des tâches ménagères, là on le fait dans l'intimité). Et ensuite la déconstruction des dispositifs systémiques : cela demande de repenser collectivement les institutions, leurs discours et leurs pratiques, comme l'état, l'école, la médecine ou la presse - c'est aussi pour ça que c'est politique et que cela excède la stricte sphère privée ».

© Editions First, illustration de Fanny Michaëlis
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La sexualité féminine a toujours suscité les débats, depuis son contrôle religieux et familial jusqu'à sa libération dans les années 60. Elle a toujours été vu comme relevant du malin ou de la perversité et ce n'est pas un hasard si le clitoris a été si longtemps évincé et caché aux filles, le seul organe qui ne relève que du plaisir, évoqué dans les manuels scolaires seulement depuis 2017 !

Nous avons été évincées à dessein de nos propres corps, on a choisi pour nous une sexualité définie et aujourd'hui c'est sur nous que retombe la charge sexuelle et contraceptive. Un paradoxe qui fonctionne pourtant terriblement bien sur le mode de ''tu enfantes tu dois donc prendre tes responsabilités''. A l'heure où le droit à l'avortement est remis en question aux Etats-Unis, il est plus qu'urgent de prendre conscience de cette charge supplémentaire. Sous couvert de liberté, elle nous entrave et fait peser sur nous seules les conséquences d'une vie sexuelle active.

Les autrices évoquent les essais de pilule masculine ou encore la vasectomie et ont questionné aussi bien les hommes que les femmes. Les témoignages sont éloquents sur le rapport aux corps et les diktats de la beauté féminine sont si tenaces qu'ils érigent une forme de travail supplémentaire afin d'être toujours belle, épilée et prête à séduire. le corps de la femme est soumis à tant de pression de la part de la société que nous nous sentons obligées de le rendre corvéable à merci à son mépris et au mépris de notre plaisir. Il n'est pas normal de devoir faire des efforts pour être belle quand on ne demande pas le même travail aux hommes. Nous ne sommes pas égaux même au sein de la sexualité ! Lorsqu'on demande aux femmes de ne pas revendiquer haut et fort leur plaisir sexuel, elles doivent en avoir quand même. Il faut avoir une sexualité active mais dans la norme et la moyenne. On ne se penche pas autant sur le cas des hommes...

Un essai percutant qu'il convient de faire lire aux femmes comme aux hommes car il peut déclencher des discussions au sein du couple ou vous faire prendre conscience qu'il faut changer les choses même au sein de la sexualité. Rendons la plus joyeuse et libre. le plaisir est la seule chose qu'on ne peut pas vous enlever...
Lien : https://topobiblioteca.fr/
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En édition, la charge sexuelle se traduit par une écrasante majorité de femmes se rendant en librairie pour acheter "Bien dans ma tête, bien dans ma culotte" d'Amal Tahir ou encore "Jouissance Club" de June Pla, pour se renseigner en bonne et due forme sur leur corps, sur son fonctionnement, et sur une sexualité épanouie, alors que leurs homologues masculins ne déboursent pas un sou, de leur adolescence jusqu'à leur vie d'adulte pour leur propre curiosité intellectuelle et sexuelle. Affaire réglée. Pourquoi les femmes sont-elles seules à se préoccuper financièrement et mentalement du désir, du plaisir, de la contraception ?

"La charge sexuelle" a pour ambition, réussie, de proposer un état des lieux de notre société dans laquelle la contraception, mais aussi le piment de la sexualité dans les couples hétérosexuels, sont à la charge de la femme. le livre est pétri de références à une multitudes de livres, ce qui rend sa lecture quelque peu ampoulée, mais tout à fait intelligible.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
(...)les hommes hétérosexuels jouiraient du monopole de la sexualité. Or, précisément, il nous semble que cette hégémonie n’existerait pas sans le labeur invisible des femmes. Alors pourquoi le monopole de la puissance sexuelle serait‐il masculin quand ce sont les femmes qui font une majorité du travail ? La charge sexuelle incarne en effet ce paradoxe : d’un côté, une visibilité masculine dans le discours et l’espace public, et dans l’ombre, un effort féminin peu reconnu, voire nié, délégitimé, ou moqué.
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Video de Clémentine Gallot (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Clémentine Gallot
Laura Berlingo est gynécologue-obstétricienne à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Face à Clémentine Gallot, journaliste et créatrice du célèbre podcast « Quoi de Meuf ? », elle déconstruit les représentations, questionne les rapports de domination, la « culture du viol », le consentement... Un entretien gaiement politique, pour mener nos (r)évolutions au jour le jour.
Chapitres pour naviguer dans la vidéo
00:00 Présentation 00:35 Pourquoi devenir gynécologue ? 02:18 Les violences obstétricales et gynécologiques : quels conseils aux soignant.e.s ? 04:20 La sexualité est-elle politique ? 06:25 C'est quoi, une éducation sexuelle positive ? 08:12 C'est quoi, le consentement enthousiaste ? 11:04 Y a-t-il une différence entre le devoir et le viol conjugal ? 14:17 Comment repenser nos pratiques sexuelles en dehors de nos habitudes ? 17:14 Des pathologies sexuelles que l'on connaît mal 20:12 Des soignant.e.s safe
« Une sexualité à soi » de Laura Berlingo, en librairie.
Plus d'infos sur le livre https://www.arenes.fr/livre/une-sexualite-a-soi/
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