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EAN : 9782207259962
298 pages
Denoël (09/10/2008)
3.88/5   26 notes
Résumé :
Olivier Ameisen avait tout pour être heureux: rejeton surdoué d'une talentueuse famille, bachelier à seize ans, pianiste exceptionnel, brillant cardiologue, il s'installe à New York au début des années 8o, et sa carrière médicale et universitaire prend aussitôt son envol. Mais derrière ce personnage charismatique se cache un grand anxieux. Depuis l'enfance, Ameisen est tenaillé par de profonds sentiments d'insécurité et d'inadéquation. À New York, cette anxiété expl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Aucune critique sur ce livre ! Et pourtant…

Ce livre est un récit. Il est très bien écrit. Peut-être pas d'un point de vue littéraire, sûrement pas même. Mais dans sa construction.

Olivier Ameisen raconte comment il a découvert le baclofène, qui lui a permis de boire son dernier verre.
Il distille des explications au sein de son récit de manière tout à fait judicieuse.



Olivier Ameisen débute son récit en 1997, par la prise de conscience de son alcoolisme.

Il réalise, dans un taxi, qu'il a du sang sur la figure. Il ne sait pas pourquoi. Il ne se souvient absolument de rien qui puisse expliquer ce sang : un black-out.
Il sait que ce n'est pas son premier black-out et que ceux-ci deviennent de plus en plus fréquents.

Depuis quelques temps il boit trop. Il s'est d'ailleurs mis à fréquenter les alcooliques anonymes (les AA) pour « mieux gérer sa consommation d'alcool ». Pour lui, c'est difficile et humiliant de franchir la porte des AA. Il a « le sentiment que dès qu'il y mettra les pieds, il sera alcoolique pour de bon ».

Lorsqu'il parle de ses problèmes d'alcool à des médecins, il est confronté au déni du corps médical. Il s'entend même dire par un psy : « vous n'êtes pas alcoolique, si vous continuez à boire, vous pourriez le devenir ».

Au printemps 1997, il essaie de ne pas boire, en multipliant les heures à son cabinet, car il ne se rend jamais à son travail en ayant bu. Il va jusqu'à travailler 20 jours d'affilé. Mais alors plus dure est la chute, dans l'épuisement le plus total, il se replonge d'autant plus profondément dans l'alcool.

A plusieurs reprises encore il essaie de ne plus boire. Mais courant de l'été 97, il dit à sa secrétaire d'annuler tous ses rendez-vous en lui révélant qu'il est alcoolique.


Olivier Ameisen explique ensuite comment il en est arrivé là.

Il a vécu dans un milieu aisé, ses parents étaient des gens brillants, marqués par la guerre et la déportation.
Il a vécu une enfance heureuse, a été d'abord médiocre puis assez brillant dans ses études.
Il est devenu cardiologue. Il est parti exercer aux Etats-Unis.

Il se décrit comme quelqu'un ayant un fort ego, c'est-à-dire un fort besoin de reconnaissance, une forte envie de briller, mais qui est très anxieux, peu sûr de lui, timide, ayant l'impression de ne pas être à sa place, de ne pas mériter ce qu'il obtient, d'être un imposteur.

Il n'a pas consommé d'alcool durant sa jeunesse.
Puis pendant des années il a été un buveur occasionnel. Mais l'alcool lui a permis à ce moment-là d'atténuer son anxiété, de se sentir mieux en société et même mieux dans sa peau en général. Pour lui, l'alcool a d'abord été un remède.
Ensuite, sous la pression du stress, il a augmenté les doses, vers quarante ans.


Dans ce livre, Olivier Ameisen décrit sa longue descente dans ce puits sans fond que provoque l'alcoolisme.
A partir de 97 commence pour lui un long calvaire fait de désintoxications, souvent seul chez lui, parfois en cures, parfois enfermé de force en psychiatrie.

Le sevrage alcoolique est le plus dangereux d'un point de vue médical. le Valium pris à haute dose permet d'éviter un delirium tremens qui peut mener à une perte de connaissance, des convulsions, des hallucinations, des poussées sévères d'hypertension artérielle, voire à la mort.

Il tente toutes sortes de thérapies : il est suivi par un psychiatre, un psychopharmacologue, un homéopathe, fait de l'acupuncture, de l'hypnose, suit une thérapie comportementale et cognitive, se rend à des milliers de réunions des AA (parfois trois ou quatre dans la même journée)…

Il s'évertue à répéter sans cesse que son problème d'anxiété était antérieur à son problème d'alcool. Mais ce problème d'anxiété n'est jamais pris en compte par les médecins.

L'alcoolique est seul car il est tenu pour responsable de son état, au mieux il est vu comme un faible qui doit « se bouger ».
Les AA sont de tous milieux sociaux, ethniques et ils sont là, simplement et sans jugement. Ils permettent, si ce n'est la guérison, au moins de retrouver un peu de dignité.

Il a aussi suivi des tas de traitements différents : Valium, Xanax, Prozac, Deroxat, Zoloft, Seropram, acamprosate et jusqu'au terrible Esperal…

Au cours des cures de désintoxication, quand il est momentanément délivré de l'alcool, les médecins lui disent que tout va bien. Et en effet, il ressent alors un bien-être, dans le cadre de la cure, c'est-à-dire hors de la vie réelle.

Et entre deux cures, il boit, de plus belle.
Il décrit le craving, cette envie irrépressible de boire. le cerveau assimile le manque d'alcool à un besoin vital à satisfaire, au même titre que la faim ou que la soif.

A chaque fois cependant, Olivier Ameisen garde la volonté de s'en sortir. Il est d'ailleurs persuadé que s'il meurt, un traitement efficace contre l'alcoolisme sera trouvé juste après sa mort.


C'est en 1999 qu'Olivier Ameisen revient en France. Son alcoolisme s'aggrave encore.

Il a de nombreux accidents : il se blesse au dos en tombant sur un vase cassé, se casse le poignet, se fracture une épaule, se casse trois côtes lui provoquant un hémo-pneumothorax…

Il vit sans cesse dans la peur de mourir, ou pire encore de rester tétraplégique après une mauvaise chute.
Il décrit les nombreuses précautions qu'il doit prendre au quotidien : ne pas prendre de douche à cause du risque de chute, s'asseoir sur les toilettes pour uriner à cause du risque de syncope « mictionnelle », dormir assis sur le canapé pour éviter de se noyer dans son propre vomi…

Il prend toujours garde de ne pas arriver aux urgences en état d'ivresse, quitte à rester quelques heures à supporter ses douleurs avant de se rendre à l'hôpital, car par expérience, il sait que les alcooliques sont traités avec moins d'égards par beaucoup de personnels médicaux.

En novembre 2000, une de ses anciennes amies lui envoie un article traitant d'un effet du baclofène sur un cocaïnomane. Mais ivre mort au moment où il le reçoit, il perd cet article et mettra plusieurs semaines avant de s'en rappeler et de le retrouver.

Olivier Ameisen commence à chercher des renseignements sur le baclofène, en utilisant internet et en consultant divers articles à ce sujet, traitant de l'administration à haute dose chez le rat ou à faible dose sur des humains.

Il veut prendre du baclofène mais il craint la dangerosité du médicament à haute dose. Il craint aussi ses effets à long terme. Enfin, il ne sait pas, dans un premier temps, s'il peut trouver du baclofène en France, et comment se le faire prescrire hors de son champ d'utilisation.

Il contacte un collègue neurologue qui prescrit du baclofène à ses patients pour traiter des spasmes musculaires. Celui-ci lui indique la posologie : commencer à très faible dose, augmenter tout doucement tous les trois jours, jusqu'à ce que ça marche. Il ne lui indique pas de limite dans la quantité.

Olivier Ameisen commence à se traiter au baclofène le 22 mars 2002. Il augmente les doses jusqu'à 180 mg par jour.
En février 2003, il lit un article sur une étude sur les rats, la suppression du craving a lieu à des doses fortes : 3 mg par kg et par jour, ce qui correspondrait pour Ameisen qui pèse 80 kg à des doses de 240 mg par jour.

En janvier 2004, il décide de repartir de zéro : il fait un sevrage du baclofène, puis recommence à faible dose en augmentant au fur et à mesure.

Le 14 février il en est à 270 mg. Pour la première fois, ses craving ont disparu et en plus il ressent une indifférence à l'alcool, c'est-à-dire qu'il peut voir une bouteille d'alcool, ou des gens boire de l'alcool, sans qu'une envie irrésistible de boire ne le prenne.
Il peut alors passer des journées sans boire d'alcool et sans que toutes ses pensées et toute son énergie ne soient employées qu'à la seule fin de résister à la tentation de boire.
Il s'agit d'une sorte de dose seuil, c'est-à-dire que cette dose lui permet de connaître l'indifférence, mais ensuite la diminution des doses ne lui fait pas perdre cette indifférence.

Il ne se considère pas comme abstinent, car l'abstinence implique une impulsion à combattre. Or, lui ne fait pas d'effort, puisque l'impulsion a disparu, avec elle l'envie de boire. C'est pour cela qu'il définit le terme d'indifférence.


Il écrit un article qui sera publié, d'abord sous forme électronique, en décembre 2004.
Il parle de l'intérêt limité des médecins, des chercheurs, en particulier des addictologues, pour son article.

Début 2006 deux chercheurs envisagent un essai en double aveugle baclofène à haute dose contre naltrexone. Mais au dernier moment, les chercheurs modifient le projet en le remplaçant par baclofène + naltrexone contre naltrexone seule. Ce nouveau projet sera refusé, évitant ainsi de compromettre l'espoir d'autres essais cliniques du baclofène à haute dose.

Olivier Ameisen est contacté par de nombreuses personnes qui lui font part de leur témoignage, sur l'alcoolisme, sur le baclofène quand ils ont eu un médecin qui a accepté de leur en prescrire.
En France, pour tous les médicaments, 15 à 20 % des prescriptions se font hors autorisation de mise sur le marché, aux Etats-Unis, c'est plus de 23 % des prescriptions.


En 2008, à la sortie de ce livre, rien n'était encore réglé. Les médecins pouvaient tout de même prescrire du baclofène hors AMM, mais c'était un vrai parcours du combattant pour un malade de trouver un médecin qui accepte.

L'essai clinique en double aveugle baclofène contre placebo a fini par avoir lieu en 2012 sous la direction du professeur Philippe Jaury. A ce jour, il n'est pas encore terminé, du moins nous n'en avons pas encore les conclusions.
Le baclofène a obtenu une utilisation temporaire d'utilisation dans le cadre du traitement de l'alcoolisme (avec certaines restrictions, dans les doses en particulier) et il peut maintenant être remboursé.

Olivier Ameisen est mort en juillet 2013 d'un infarctus du myocarde, à l'âge de 60 ans.



Triste et belle rengaine :
« Non, jef, t'es pas tout seul
[…]
Viens, il me reste trois sous
On va aller s'les boire
Chez la mère Françoise
Viens, Jef, viens
Viens, il me reste trois sous
Et si c'est pas assez
Ben il m'restera l'ardoise
[…] »
(extrait de « Jef » de Jacques Brel : http://www.youtube.com/watch?v=11rUeC6jkZk)
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Le système des étoiles est assez peu significatif parfois.
Ce livre je lui donnerais 15/20. Il est assez passionnant, le récit de l'expérience personnelle d'un médecin sombrant dans l'alcool et trouvant sa solution dans un produit redécouvert, le baclofène, c'est très prenant.
Ce livre n'est pas spécialement bien écrit, il ne cherche pas à faire du style.
Ce livre me rend dingue car je constate hélas que peu de services et de médecins osent prescrire de hautes doses de baclofène, qui est pourtant revendiqué comme crucial pour l'efficacité de ce produit. On prescrit mais trop peu, du coup pas d'efficacité, du coup on décrédibilise cette potentielle solution... Et on reste dans les vieux paradigmes qui sont inefficaces et des gens crèvent, continuent de crever et continueront de crever...
Merci au dr Ameisen où qu'il soit. Et courage à tous ceux qui vivent des moments pénibles dans la maladie...
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Voilà un livre de référence indispensable, m'a-t-on dit, pour comprendre le chemin de croix d'un alcoolique qui a pourtant tout en main pour se soigner, puisqu'il est médecin. Il s'agit de l'auteur.

D'attaque panique à peine jugulée par le Valium, les benzodiazépines, etc. en compulsion vers l'alcool, la vie du patient tient de l'enfer d'une maladie orpheline. Les A.A. apportent un grand soutien, les cures proposent des oasis de paix, mais l'avancée vers la marginalisation, perte du travail, perte de l'entourage (encore que l'auteur semble avoir été bien entouré, j'étends son expérience à la plupart des gens), perte de sens, paraît inexorable. de plus, le jugement social sur ces maladies "intempérantes" est moral : si l'on veut, on peut, certains ont pu, c'est donc qu'on manque de volonté, ces jugements détruisent ce qu'il reste d'amour-propre et de confiance en soi, à supposer qu'on en ait jamais eu.

Une femme hospitalisée, au bout du rouleau, avait explosé : "Pourquoi est-ce que bon Dieu ne m'a pas donné un cancer du sein [plutôt que l'alcoolisme] ? Au moins mes enfants me rendraient visite !"

Amené à faire les essais du baclofène sur lui-même (les réticences de ses thérapeutes et de collègues lui compliquent la tâche, vu qu'il s'agit d'un usage hors indication officielle - le baclofène est un myorelaxant), et avec des dosages élevés dont il ignore le caractère dangereux ou pas (il apprendra après seulement que le médicament est tout sauf toxique, même à forte dose), il finira par supprimer le craving totalement. Comme lui, je mets le mot supprimer en italiques. Les autres molécules atténuent le craving, elles ont même des effets secondaires dangereux, MAIS elles sont sous brevet... C'est ainsi que quand il parvient, ayant atteint un an de sobriété complète sans effort, à obtenir de chercheurs qu'ils s'intéressent à des essais en double aveugle, ceux-ci finissent par subtiliser le protocole qu'il avait élaboré à la jonction du baclofène avec une autre molécule dont l'inefficacité relative était connue MAIS qui était toujours sous brevet ! Il a l'élégance (ou la prudence) de ne pas en supputer les raisons ; pour moi qui n'ai pas de raisons de ménager l'institution, il me semble que c'est pour que les effets bénéfiques du baclofène soient imputés à une substance rémunératrice pour le labo qui la produit. S'il n'y a pas d'argent à la clé, où trouver les trois cent mille euros nécessaires à l'étude en double aveugle ? Fausser les résultats ne semble pas être rédhibitoire pour certains "scientifiques" ; les bras m'en tombent.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Si vous êtes sujets à des comportements de type compulsifs, que cela concerne l'alcool, la cigarette, la nourriture, le sport, les achats, que sais-je encore ; et/ou si vous ressentez en vous quelque chose de l'ordre de l'angoisse ou de l'anxiété ; et/ou si vous êtes atteint du « syndrome de l'imposteur », si vous ne vous sentez pas toujours (souvent ?) à votre place, alors lisez-le. Ce livre ne vous donnera pas de réponse mais certainement des clés de compréhension ou simplement un accostage de quelques heures dans un port où vous ne sentirez plus seuls.
Cette autobiographie a connu un retentissement exceptionnel: la réalisation de l'étude Bacloville permet en 2014 d'émettre une recommandation temporaire d'utilisation du Baclofène dans la lutte contre l'alcoolisme, en attendant l'autorisation de mise sur le marché qui devrait intervenir dans les semaines à venir. Malheureusement Olivier Ameisen, décédé d'une crise cardiaque il y a trois ans ne verra pas la consécration de ses travaux.

Ce livre est enfin un appel à la tolérance et à la bienveillance et signe la victoire de l'écoute (de soi et des autres) sur le silence.
Lien : https://yaourtlivres.canalbl..
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Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
" Un alcoolique, c'est un ego démesuré combiné à une piêtre estime de soi."

"Chez tous les animaux, y compris les humains, la fuite, c'est la honte".

"C'était cela, le drame : L'alcool me détruisait, mais rien ne me faisait aller mieux que l'alcool. Il calmait mon anxiété et me donnait confiance, sentiment qui m'était totalement étranger. Et je savais que, le plus souvent, les autres alcooliques et toxicomanes consommaient leur produit non pas par goûtde la transgression mais pour soulager des souffrances émotionnelles antérieures à leur addiction."

"Lorsqu'ils sont à bout, les alcooliques disent souvent des choses épouvantables à leurs amis et à leur famille, c'est inévitable."

"La dépendance crée un isolement, et c'est l'un des aspects les plus cruels de cette maladie."

"Je n'ai d'ailleurs jamais rencontré un alcoolique qui buvait réellement pour se détruire. Ca, c'est l'apparence : on voit la personnese dégrader et on ne comprend pas pourquoi elle n'arrête. On lui attribue donc à tort le désir de s'autodétruire. Si j'avais vraiment eu envie de me détruire, je l'aurais fait vite et bien. Il faut être particulièrement stupide et masochiste pour utiliser l'alcool. L'alcool, c'était pour aller bien, pour aller mieux, pour panser des émotions à fleur de peau et une souffrance morale."

"La dépendance est un vrai cauchemar, et un cauchemar vrai : quand on se réveille, on ne se réveille pas de l'horreur, mais dans l'horreur."

"Tous les alcooliques et toxicomanes savent que leur dépendance peut les mettre en danger ou même les tuer, mais en attendant, la boisson ou la drogue les soulage."

"Cette maladie, l'addiction, est pratiquement la seule pour laquelle existe une double peine : on est malade, et on est tenu responsable de sa maladie."

A ma maman... Pardon !!
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Je n'étais jamais retourné au parc depuis mon enfance, et à présent il me semblait aussi loin de moi que mes jeunes années. C'était une belle journée d'hiver, l'atmosphère était féérique, ciel bleu et soleil étincelant. Le temps s'était arrêté dans le jardin de l'insouciance : c'était la vie d'avant, d'avant le destin !
J'ai ressenti alors comme une prémonition, celle d'une existence qui pouvait être la mienne, qui serait un jour la mienne, une vie sans anxiété, ni panique, ni alcool. "Voilà, je viens de mettre un pied dans la vie d'après", ai-je pensé. L'émotion qui m'a saisi sortait droit d'Alice au pays des merveilles ou d'un film de Tim Burton. Elle m'a accompagné pendant toute cette journée, puis durant quelques jours encore, sans que je puisse réellement comprendre ce qui avait déclenché en moi cet étrange sentiment, celui d'avoir réussi à court-circuiter les interminables années de ma maladie, laquelle avait pris le contrôle de ma vie comme un parasite, comme un cancer. On m'avait assuré que c'était irréversible, que je serai toujours malade : pourtant, j'ai eu à ce moment l'intuition qu'un jour la maladie aussi ferait partie d'un avant, qu'il y aurait un après.
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...la dépendance est une véritable prison. Mais une prison unique et différente de toutes les autres : une "prison biologique". Une prison construite par la main de l'homme, on peut toujours, en principe, s'en échapper. Fin de peine, grâce, évasion,effondrement des murs par tremblement de terre, peu importe, il y a toujours un espoir. Dans ma prison biologique, point de faille ! Les AA, les psychologues, les médecins et la littérature médicale décrivent la dépendance comme une maladie chronique et à rechutes. On a pu s'évader de Cayenne, d'Alcatraz, mais personne n'a jamais réussi à s'évader de l'addiction. La prison biologique, c'est perpétuité incompressible...
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Dans l'addiction, [...] les symptômes sont la maladie. Le principal symptôme de la dépendance, c'est la dépendance, c'est-à-dire le craving, l'envie obsessionnelle de fumer, de boire, de prendre de l'héroïne et ainsi de suite. Si le patient refume, reboit, etc., c'est à cause de ce symptôme. Pour dire les choses autrement, si le patient est dépendant de la substance, de la maladie, elle, est dépendante de ses symptômes. Supprimez les symptômes, et vous supprimerez la maladie. Le dépendant qui ne ressent plus une envie obsessionnelle de fumer, de boire, etc., cesse tout simplement de boire, de fumer, etc.
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... comme j'ai fini par le comprendre, toute argumentation intellectuelle avec soi-même est vaine, c'est l'un des pires aspects de cette maladie. Il y a en fait deux personnes, le moi rationnel, celui qui ne veut absolument pas boire, et l'autre, qui vous souffle à l'oreille : "Allez, vas-y juste un verre, tu sais que ça te fera du bien, et tu t'arrêtes juste après !"' Cet autre moi, c'est la maladie. Il a le même QI que vous, puisque c'est aussi vous. Vous ne pouvez donc pas ruser. Et le combat est toujours perdu d'avance.
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