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EAN : 9782262037765
496 pages
Perrin (28/02/2013)
4.38/5   42 notes
Résumé :
La Deuxième Guerre mondiale s'est officiellement achevée en mai 1945, mais son déchaînement de violence perdura des années. Après plus de 35 millions de morts et nombre de villes rasées, les institutions que nous considérons aujourd'hui comme acquises ? police, médias, transports, gouvernements nationaux et pouvoirs locaux ? étaient à reconstruire. Le taux de criminalité montait en flèche, les économies s'effondraient et la population européenne survivait au bord de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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L'ouvrage de Keith Lowe vient combler, à en croire les spécialistes (dont je ne suis pas), une lacune importante dans la très abondante littérature consacrée au 2e conflit mondial. La tâche à laquelle s'est attaché l'auteur semble titanesque: dresser un tableau de l'ensemble des conflits plus ou moins locaux qui ont enflammé notre continent à compter de la déroute allemande et italienne en 1944, et tenter de rétablir au passage un semblant de vérité sur l'ampleur des massacres, déportations, et autres mesures discriminatoires infligées aux combattants et aux populations par pratiquement toutes les forces en présence, ceci jusque dans les années 50, avec des prolongements encore jusque dans les années 2000. L'ensemble tient en moins de 600 pages en édition de poche, sans les notes, ce qui est finalement peu. Des milliers – voire dizaines de milliers – de données ont été analysées de manière critique, prenant toujours en compte leur source et la crédibilité que l'on peut raisonnablement leur accorder. Au delà de son talent d'infatigable enquêteur, Keith Lowe a su agencer le résultat de ses recherches de façon cohérente et en faire un récit constamment captivant en évitant les principaux écueils qui guettent l'auteur de ce type de somme. En effet, l'évocation d'atrocités répétées d'un pays à l'autre ou d'une communauté à une autre pourrait très facilement produire un effet de lassitude et d'écoeurement, évité ici par une constante mise en perspective historique et politique, toujours amenée de la manière la plus pédagogique. le meilleur moyen d'appâter de nouveaux lecteurs seraient de rapporter certains des éléments les plus frappants, des faits inconnus ou célèbres mais mésestimés dans la plupart des publications existantes (manuels scolaires compris), au risque cette fois de réduire ces faits à de l'anecdote. Je m'en abstiendrai donc. Je prendrai cependant un autre risque, celui d'accoler à cet ouvrage un adjectif ultra galvaudé (par la publicité entre autres), celui d'indispensable. Indispensable pour comprendre d'où nous venons, indispensable pour comprendre combien des rancoeurs plus ou moins souterraines continuent de modeler certaines orientations politiques ici et là en Europe. Ceux qui ont lu la 25e heure de Virgil Gheorghiu trouveront ici le tableau d'ensemble dans lequel positionner la fiction de l'écrivain roumain, petite pièce d'un terrible puzzle qui en compte des milliers, assemblées avec maestria par l'historien britannique.
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L'auteur, universitaire anglais, veut démontrer que la guerre ne s'est pas arrêtée le 8 mai 1945, date de la capitulation allemande : le dépôt des armes n'aurait pas tout réglé ; des conflits sociaux, politiques et ethniques ont perduré.

Tout d'abord, l'auteur dresse un tableau apocalyptique : presque partout (la situation au Royaume Uni est très brièvement évoquée, et les pays non belligérants ne sont pas évoqués du tout, malgré le fait qu'ils ne seront pas à l'abri des conséquences de la guerre (je pense à l'Espagne particulièrement)), règne le chaos : partout, des morts, des absents, de la délinquance, du cynisme, des villes et campagnes sinistrées, des fonctions régaliennes plus assumées du tout par les états. pour pallier l'effondrement, s'agitent, avec plus ou moins de talents, des armées faites pour la guerre, transformées en administration.
Sur ce continent où plus rien ne fonctionne, domine une volonté de vengeance, surtout quand la population n'a pas confiance dans la justice : les collaborateurs sont poursuivis avec plus ou moins de sévérité (plutôt importante en France, mais très vite limitée, assez faible en Italie ou en Belgique).

Les armes se sont tues, mais des conflits souvent violents et armés perdurent : les questions sociales et la "lutte des classes" alimentent des mouvements plus ou moins insurrectionnels (en France et en Italie), tandis que la question raciale et ethnique persistent : les juifs survivants ne sont pas les bienvenus nulle part, tandis que des "nettoyages ethniques" prennent une ampleur jamais vue : près de 10 millions d'allemands sont contraints de quitter leurs terres, les polonais sont chassés d'Ukraine, tandis que ces mêmes Ukrainiens sont déportés par les polonais...d'après l'auteur, il s'agit là de l'achèvement de l'empire austro-hongrois, qui aurait réussi à faire vivre ensemble de multiples nationalités pendant dès siècles. Un pays arrive à étouffer les conflits ethniques : la Yougoslavie, sous la main de fer de Tito ; 45 ans après, ses peuples n'y échapperont pas ....

Les limites de cet ouvrage, à mon goût :

Les bornes temporelles (1945-1950)

Une place trop importante accordée au passé, tandis que ces mêmes années vont voir éclore des "signaux faibles", qui se seront révélés primordiaux à l'avenir ; des hommes politiques vont ainsi mettre en place une solidarité intra-européenne, à l'Ouest comme à l'est du rideau de fer, et les états sociaux naissent durant ces mêmes années : en France, en Allemagne, et surtout en Grande Bretagne ...

la décolonisation imminente n'est pas évoquée du tout ; néanmoins, le récit de l'intervention britannique en Grece, illustre la très grande difficulté de cette ancienne superpuissance à s'imposer sans l'aide de l'Amérique ....

Dans sa conclusion, remarquable par sa synthèse et sa "prise de hauteur", l'auteur rappelle que ces conflits nationaux, nourris par un discours nationaliste, sont malheureusement d'actualité : on ne pourra pas dire que l'on n'aura pas été prévenus, notamment par ce livre....
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S'il est une période de l'histoire du vingtième siècle que généralement on néglige, c'est bien celle-là, cet immédiat après-guerre qui semble soudainement bâtir le rideau de fer et figer l'Europe dans la guerre froide pendant plus de quarante ans. Or les années qui suivent la guerre en sont le prolongement. le conflit ne s'arrête pas d'un coup. Il se poursuit. Ce livre montre les tragédies de cet après-guerre : les Allemands qui doivent quitter leur terre ou qui sont persécutés, les Juifs dont on ne veut pas le retour, les prisonniers que l'on maltraite, la vengeance qui sévit partout, les minorités ethniques, en Pologne, en Ukraine, un peu partout, qui doivent fuir, les violences qui se perpétuent, les partisans baltes qui ne jettent pas les armes face aux communistes, les mouvements de résistance qui continue à s'entre-déchirer, les communistes qui détruisent toute opposition en Roumanie, les Occidentaux qui font de même en Grèce, la guerre qui souvent ne se terminent que bien des années après sa fin officielle. En mettant à mal les mythes de l'après-guerre, en montrant les effets catastrophiques d'une guerre aussi terrible de celle de 1939-1945, en dévoilant la récupération nationaliste des événements, ce livre apporte un éclairage nécessaire à l'histoire de l'Europe qui, peut-être, ne s'est jamais vraiment remise de sa guerre fratricide.
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Ce passionnant ouvrage mériterait d'être mieux connu et lu par tous les passionnés d'histoire et tout particulièrement de la Seconde Guerre Mondiale.

Quand on parle de la fin de la Seconde Guerre Mondiale, on imagine la joie, la fête, les rires et danses dans les rues pour célébrer la fin de ces terribles années de guerre.
Ici, la terrible réalité est décrite.
Les souffrances de toutes les minorités en Pologne, en Ukraine, en Bulgarie, etc ... de la fin de la guerre à la fin des années 40.
Les combats de résistance dans les pays Baltes jusque dans les années 50.
L'indifférence à laquelle les juifs, survivants des camps, ont du faire face.
La famine des populations pendant des années après la fin officielle des combats.
Les massacres, dans tous les pays, de l'épuration et de la vengeance envers les collaborateurs ou associés.
Et la liste des horreurs s'allonge ...

Une lecture édifiante, passionnante mais souvent glaçante. Dans un style vivant, facile à lire et plein d'anecdotes.

Exceptionnel !
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L'ouvrage de K.Lowe m'a appris qu'au lendemain du 8 mai 45 la guerre ne s'est pas arrêtée et même loin de là. Elle a pris d'autres formes toutes aussi terribles, sur le champ de ruines se sont multipliées épurations ethniques, règlements de comptes, massacres en tous genres, le comble étant les assassinats de juifs sauvés des camps et revenant pour retrouver leurs biens. L'ouvrage se veut exhaustif et balaie tous les pays d'Europe avec un souci constant de vérité et aucun n'en sort grandi. Ceux où le sang a finalement le moins coulé sont ceux où les nouveaux gouvernants ont su inventer une histoire officielle qui a calmé le jeu mais aussi empêché la justice d'aller très loin. Au final un livre remarquable qui laisse un goût amer et faire perdre encore des illusions.
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critiques presse (4)
NonFiction
08 août 2013
Un tableau apocalyptique, fascinant et vertigineux de l’Europe d’après-guerre.
Lire la critique sur le site : NonFiction
LaLibreBelgique
14 mai 2013
Un livre saisissant, indispensable, raconte l’"Europe barbare", celle de 1945 à 1950.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Telerama
22 mars 2013
Prisonniers, déportés, combattants, civils : ce sont tous les peuples de 1945 à 1950 qui se déploient dans ce livre stupéfiant, essentiel pour réfuter toutes les instrumentalisations de l'histoire de cette période.
Lire la critique sur le site : Telerama
Lexpress
07 mars 2013
Cette étude implacable écorne singulièrement le mythe commode d'une Europe débarrassée du Mal après la chute du IIIe Reich.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Si le massacre systématique de communautés entières donnait à ce paysage un aspect aussi sinistre aux yeux des étrangers, il était bien plus désorientant pour les rares autochtones qui vivaient encore au milieu de cette vacuité. Depuis tout ce temps, les survivants du massacre d'Oradour-sur-Glane, dans le Limousin, n'ont jamais véritablement accepté ce qui leur est arrivé. A l'été 1944, en représailles contre des activités de la résistance locale, tous les homme du bourg furent regroupés et abattus ; les femmes et les enfants furent conduits dans l'église, que les allemands incendièrent. Au sein de la population locale, le choc fut si grand qu'après la guerre les habitants refusèrent de reconstruire le village, mais choisirent de le préserver pour toujours exactement tel qu'il était le jour du massacre. Il demeure à l'état de village fantôme.
Des massacres d'une brutalité comparable eurent lieu dans d’innombrables localités un peu partout en Europe. Le massacre le plus ignoble de tous fut sans doute celui perpétré à Lidice, en Tchécoslovaquie, où la totalité de la population masculine fut abattue à titre de représailles après l'assassinat de Reinhard Heydrich, le Reichsprotektor adjoint de Bohème et de Moravie. Les enfants du village furent ensuite conduits aux camps de concentration de Chelmo, où ils furent gazés, et les femmes incarcérées à Ravensbrück, pour y servir de main d’œuvre forcée. Le village proprement dit fut livré aux flammes et rasé au bulldozer, et les décombres évacués pour permettre à l'herbe de repousser là où les bâtiments se dressaient auparavant. Le but de ce massacre n'était pas seulement de punir la population locale d'avoir résisté à l'occupant, mais d'annihiler cette petite communauté, comme si elle n'avait jamais existé. Les nazis usèrent ensuite de la destruction systématique de ce village comme d'un avertissement à toutes les autres bourgades impliquées de près ou de loin dans des actes de résistance.
[…]
On a éteint Lidice, ainsi que des millions d'autres villages, comme on éteint une lampe.
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-et maintenant, dites-moi, qui sont nos ennemis?lui demanda le chef de la milice.
K réfléchit un instant avant de lui répondre.
- franchement, je n'en sais rien, je ne crois pas avoir d'ennemis.
- pas d'ennemis ! (Le chef haussa le ton) Voulez-vous dire que vous n'haissez personne et que personne ne vous hait ?
-Autant que je sache, personne.
- Vous mentez ! Hurla subitement le lieutenant-colonel en se levant de son siège. Quel genre d'homme êtes-vous pour ne pas avoir d'ennemis ? Si vous n'avez pas d'ennemis, vous n'appartenez visiblement pas à notre jeunesse, vous ne pouvez être un de nos concitoyens ! (...) Et si vous ne savez vraiment pas qui haïr, on va vous l'apprendre ! On va vous l'apprendre très vite !
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La reconnaissance du caractère parallèle de ces guerres locales emboîtées dans la guerre mondiale est toujours resté un sujet controversé, car elle entraîne d'énormes conséquences – non seulement pour l'historien mais pour la société au sens large. Premièrement, nos histoires et nos mythes issus de la Deuxième Guerre mondiale possèdent une dimension politique : si nous voulons nous remémorer la guerre comme une bataille assez simpliste entre le bien et le mal, ce n'est pas sans raison. Toute mutation de cette remémoration modifie aussi notre perception de nous-mêmes : non seulement elle entame certaines de nos idées les mieux arrêtées sur le bon et le mauvais camp, mais, à tort ou à raison, elle fournit aussi aux « méchants » d'antan une occasion de se réhabiliter. D'un bout à l'autre de l'Europe, les groupes néofascistes ont toujours justifié l'action de leurs prédécesseurs pendant la guerre, puis les leurs, en soutenant qu'ils se bornaient à combattre le « pire des maux », le communisme international ; depuis l'éclatement de l'Union soviétique, au début des années 1990, leurs arguments ont gagné du terrain.
Ensuite, et de façon plus immédiate, la reconnaissance de ces guerres parallèles remet en question toute notre conception de ce que fut exactement la Deuxième Guerre mondiale : si la guerre internationale contre l'Allemagne ne fut qu'une ramification d'un conflit plus général, alors il va sans dire que la défaite du Reich n'a pas nécessairement mis un terme aux combats. L'achèvement du conflit principal n'a pas signifié pour autant la fin de ces diverses conflits, loin s'en faut ; parfois, l’absence d'ennemi extérieur a simplement laissé toute latitude aux populations locales pour se concentrer plus efficacement sur leur volonté de s’entre-tuer. Nous avons déjà vu en quoi cela s'est vérifié à un niveau régional, avec des conflits spécifiques entre différents groupes ethniques ; mais ce fut aussi vrai sur un plan plus général, dans la bataille européenne entre la droite et la gauche.
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La découverte des camps de concentration bouleversa à jamais le paysage moral : elle semblait justifier toutes les décisions des Alliés au cours de la guerre – le bombardement des villes du Reich, l'insistance sur une capitulation sans condition, le blocus économique qui avait réduit tant d'individus à la famine en Europe. Elle leur fournissait aussi une justification pour l'essentiel de leurs décisions dans les mois à venir ; dorénavant, en dépit de tout ce qu'ils auraient à endurer, les Allemands ne seraient guère en position d'inspirer de la sympathie : les injustices envers les soldats et les civils allemands seraient tenues pour quantité négligeable […] comme elles le furent lorsque l'Armée Rouge s'empara de la partie orientale du Reich. A l'occasion, nous le verrons, la vengeance aveugle sera même encouragée par les autorités. Comme en a conclu un historien, la violence et la déchéance que l'on découvrit en des lieux comme Majdanek, Dachau et Bergen-Belsen « en un sens impliquaient tout le monde, y compris les libérateurs ».
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cette mère française ... sut affronter une enseignante qui avait traité sa fille de "bâtarde de boche" : Madame, ce n'est pas ma fille qui a couché avec un Allemand, mais moi. Quand vous voudrez offenser quelqu'un, gardez vos insultes pour moi, au lieu de vous en prendre à un enfant innocent.
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