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Commissaire Maigret - Romans et ... tome 87 sur 103
EAN : 9782253161578
160 pages
Le Livre de Poche (12/10/2011)
3.64/5   59 notes
Résumé :
Pour la première fois au cours de sa carrière, un homme venait trouver Maigret, après
avoir hésité des semaines durant, après l'avoir suivi dans la rue, après lui avoir écrit, prétendait-il, et avoir déchiré ses lettres, après avoir attendu des heures dans la salle d'attente ; un homme qui n'avait rien d'exceptionnel dans sa mise ni dans son aspect s'était introduit chez lui, humble et obstiné tout ensemble, pour lui déclarer en substance :
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Léonard Planchon, un modeste artisan peintre en bâtiment, se rend au domicile de Maigret pour lui confier son dilemme : sa femme a installé son amant à demeure et il est tenté de la tuer, plus pour préserver leur fille que pour venger son honneur, bafouée, mais perdue depuis longtemps…

J'avoue avoir eu un peu de mal à m'intéresser à cette histoire de cocu velléitaire !

Heureusement, il y a le talent de romancier de Simenon, il n'avait décidemment pas son pareil pour rendre intéressant ce qui semble à première vue insignifiant.

Difficile, voire impossible d'être déçu par Simenon, quand on a pris pied dans l'étonnant monde de cet auteur, pourtant, ce client du samedi, ne restera pas dans ma mémoire comme l'une des réussites.
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Il fait froid, il bruine, c'est un samedi de janvier et Maigret rentre chez lui content de pouvoir profiter d'une soirée tranquille devant la télévision ! Une soirée comme il les aime mais c'est sans compter sur l'homme qu'il l'attend au salon!
C'est ce même individu qui est venu plusieurs fois Quai des Orfèvres et a demandé après Maigret, celui que Janvier a surnommé le client du samedi.-
"Mon intention est de tuer deux personnes : ma femme et son amant. J'ai tout préparé dans ce but, en pensant aux moindres détails pour ne pas me faire prendre."
lui annonce t'il. Maigret s'interroge et s'inquiète... l'avenir lui donnera raison. Mais peut on enquêter si il n'y a pas de meurtre, peut on anticiper les évènements, peut on les prévenir?
Georges Simenon à son habitude crée des personnages plus vrais que vrais, les posent dans un "décor" qu'il connait bien et laisse Maigret aux prises avec son intuition, sa connaissance de l'homme ..
Une lecture intéressante à défaut d'être palpitante.
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Au 36, on l'appelle "le Client du Samedi" parce qu'il ne vient hanter la salle d'attente de Maigret et de ses inspecteurs que le jour voué à Saturne. Il a, pour particularité physique, un bec-de-lièvre et, pour particularités disons psychologiques, la patience des timides, l'espoir, morne mais résolu, de finir par être reçu par Maigret en personne et une propension paradoxale à s'esquiver systématiquement de son propre chef alors même que, les visiteurs se raréfiant, cet espoir se fait de plus en plus net. Parfois, comme dans "Cécile Est Morte" , il arrive au commissaire, allant et venant entre les bureaux, de faire le gros dos et de détourner la tête de cette silhouette qui l'attend comme le Messie. Pourquoi ? Lui-même ne saurait dire pourquoi ça l'agace autant sinon que ce type ressemble à un chien battu que personne n'aurait jamais battu.

Mais voilà qu'un soir, alors qu'il rentre chez lui pour une fois à l'heure - un chez-lui où l'attend une superbe quiche lorraine - Maigret se retrouve face à face, dans son salon, avec le Client du Samedi, toujours aussi humble, toujours aussi têtu et toujours aussi embarrassé. Mme Maigret, qui l'a fait entrer, avouera plus tard à son époux que, bien qu'il se soit montré très courtois, "il lui a fait peur". Maigret, lui, n'a pas peur mais comme son "client" commence dès le début à balbutier qu'il a peur de déranger, qu'il s'excuse, etc ..., son agacement s'accroît. Ayant perçu l'haleine un peu chargée de l'homme et espérant que l'alcool le fera enclencher la vitesse supérieure, il sort même son sacro-saint flacon de prunelle, celle qu'il ne déguste qu'avec ses amis, des personnes vraiment intéressantes ou alors tout seul, quand il se sent un peu patraque. Cette fois-ci, il est bien décidé à entendre de A à Z ce qui amène en sa propre demeure un personnage aussi bizarre : la prunelle devrait aider.

Malgré les efforts conjugués de la gaieté de la prunelle et de la patience de Maigret, ce n'est pourtant pas sans maintes circonlocutions et phrases d'auto-apitoiement que le Client du Samedi, qui s'appelle en fait Léonard Planchon et possède une petite entreprise de peintre en bâtiment, rue Tholozé, passe enfin aux aveux. Aveux aussi déroutants que le personnage puisque c'est dans l'intention d'annoncer à Maigret qu'il se trouve pour ainsi dire, lui, Planchon, dans l'obligation de tuer sa femme, Renée, et l'amant de celle-ci, un ancien ouvrier à lui, Roger Prou, que cela fait maintenant on ne sait plus combien de semaines qu'il tourne et vire à la Police Judiciaire. Cependant, précise Planchon avec une gravité qui, dans d'autres circonstances, eût paru presque comique, sa femme, il l'aime toujours. Seulement, là, il n'en peut plus. Depuis deux ou trois ans (je ne vous garantis pas la durée exacte, elle m'est un peu sortie de l'esprit ), Renée est la maîtresse de Prou et, depuis que le mari les a surpris ensemble dans le lit conjugal, eh ! bien, l'amant s'est tout simplement installé à demeure. Planchon est traité comme quantité quasi négligeable et, tous les soirs, pendant que sa femme et son amant regardent la télévision, lui fait les bars. Et que faire dans un bar, lorsque l'on subit un stress de ce genre et qu'on le subit jour après jour, en sachant que, à son retour, on ne pourra s'étendre que dans un lit de camp dressé dans le salon ? Boire, bien sûr. Ca réchauffe un peu et, faute de consoler vraiment, ça permet de supporter.

A Maigret, qui, en homme responsable, s'étonne et lui demande pourquoi, tout simplement, il ne laisse pas tout tomber en réclamant le divorce, Planchon argue de la fille qu'il a eue avec Renée, la petite Isabelle. L'idée de la laisser à sa femme et à son nouveau compagnon, l'idée surtout que celui-ci puisse se faire appeler "papa" par l'enfant, le révoltent. C'est ainsi que, peu à peu, cherchant dans sa tête une solution satisfaisante, il en a conclu que seul le double meurtre du couple adultère arrangerait au mieux la situation. Maigret lui fait alors remarquer que, s'il va en prison, sa fille se retrouvera seule. Mais Planchon d'affirmer qu'il ne laissera aucune trace et qu'on ne pourra pas l'accuser.

Maigret est perplexe, Maigret sent l'inquiétude monter en lui. Un peu de mépris aussi car Planchon, en bon ivrogne, a pleuré ici et là et que Maigret n'aime pas voir pleurer les hommes. Il ne comprend pas pourquoi ce type est venu lui raconter tout ça. Cherche-t-il une absolution ? Planchon ayant évoqué sa jeunesse catholique, il va jusqu'à lui poser la question. Veut-il que Maigret lui dise que, de fait, il n'a plus que cette solution-là ? Mais il sait bien que, pas plus qu'un prêtre à qui il aurait raconté son histoire, Maigret ne saurait approuver son plan et encore moins l'y encourager.

Néanmoins, Maigret ne serait pas Maigret s'il ne faisait promettre à Planchon, avant de le renvoyer dans la nuit, de l'appeler régulièrement une fois par jour. Et Planchon promet.

Le lundi suivant - il était chez les Maigret le samedi-soir et si vous tenez vraiment à savoir pourquoi la P. J. ne le voyait paraître que le samedi, eh ! bien, c'était parce qu'il ne pouvait se libérer que ce jour-là - Planchon téléphone vers les 18 h, d'un bar situé rue des Abbesses. Il n'a rien fait, sinon boire encore et les derniers mots qu'il adresse au commissaire, qui tente évidemment de l'avoir par la raison et de le détourner de son plan inepte, sont : "Je vous remercie." Mais un "Je vous remercie" que, avec le recul, le commissaire jugera teinté d'ironie amère.

Après ça, silence radio. Quand le commissaire se présente de lui-même chez les Planchon - après avoir tout de même demandé l'accord de ses supérieurs - il tombe sur "une belle femelle", comme la définit le petit Lapointe, la fameuse Renée, qui lui raconte oh ! très calmement et avec un parfait naturel, que son mari est rentré lundi-soir, très tard, qu'il a fait ses valises et qu'il est parti. Voilà. Comme ça. Ce qui était assez normal puisque Roger venait de lui racheter sa part dans l'entreprise pour la somme de trois millions - le roman date de 1962, la somme est importante. le portrait qu'elle fait de son mari est celui d'une lavette intégrale - mais il faut bien admettre que, pour la majorité des lecteurs, c'est bien sous ces couleurs-là que, dès sa première phrase, leur est apparu Planchon - qui buvait depuis déjà longtemps, laissait l'entreprise partir à vau-l'eau, ne valait plus rien au lit depuis des lustres, vivait en sauvage, etc, etc ... Mme Planchon ne cache rien de sa relation avec Roger Prou - un homme, lui, un vrai. Et quand Maigret convoque ledit Prou - "un beau mâle" - à la P. J., en qualité de simple témoin, l'histoire est la même, contée avec autant de naturel mais un peu plus d'arrogance car Prou est peut-être "un homme, un vrai" mais c'est aussi un homme vaniteux, au tempérament plutôt combatif. A tout prendre, si quelqu'un avait dû, chez les Planchon, concocter une idée d'assassinat, c'eût été plutôt son affaire à lui ...

Evidemment, l'habitué n'est pas sans penser aux "Scrupules de Maigret" , où, là encore, sévissait un ménage-à-trois infernal, celui de Xavier Marton, sa femme et sa belle-soeur (mais il n'y avait pas d'enfant au milieu, me semble-t-il). Et lorsqu'on en arrive à la fin du roman, lorsqu'on prend le temps de réfléchir, on se demande si, sous ses airs de lavette et d'ivrogne pleurnichard, Léonard Planchon n'était pas, dans le fond, plus machiavélique qu'il n'en avait l'air. Non, non, je n'ai pas dit qu'il était coupable ... Simplement que, si simple en apparence, si sincère, si émouvant (même si on le méprise toujours un peu, dans le fond, parce qu'il ne se conduit pas en homme, justement), si faible qu'il soit (ou veuille paraître), ce n'est pas en réalité lui le plus fort : prêt à tout, et jusqu'à l'extrême, pour détruire le couple des deux "fauves" (autre définition de Maigret) formé par Renée et Roger.

Un excellent "Maigret. Ne le ratez pas. Mieux : prévoyez-le sur la liste des livres à lire, tranquille, pendant les vacances. Ah ! Les vacances ! Ah ! le soleil ! ... C'est quoi, déjà ? ... Et c'est quand, surtout ? ... Et si l'on envoyait le commissaire Maigret à sa recherche, vous croyez qu'il nous le retrouverait, le soleil ? ;o)
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Paris. Montmartre. Au début des années 60's (la TV est entrée chez les Maigret).
L'hiver, la pluie, le froid (refrain classique) …

« Maigret et le client du samedi » ou le meurtre d'un homme seul et triste … celui qui, il y a peu, attendit Maigret, chez lui, un samedi soir, pour lui parler ; quelqu'un dont le commissaire ne savait rien sinon le nom, Planchon ; depuis quelques semaines, l'inconnu avait demandé, mais en vain, d'être reçu à la PJ par Maigret qui n'a jamais donné suite … désormais Maigret, au pied du mur, ne peut qu'écouter.

Planchon lui avait confié son désir de meurtre, celui de sa femme volage.

Il fut embarrassé par cette situation de confessionnal, moins par un secret de circonstance auquel il ne se sent pas tenu que par la confiance que lui accorda Planchon. Et puis l'homme avait l'air si sincère et déterminé ... mais que faire quand on ne peut pas arrêter en préventif, sinon attendre et espérer ?

Le classique trio infernal est au menu de ce court roman : le mari (Léonard Planchon, peintre en bâtiment à son compte), l'épouse (Renée), l'amant (Roger Prou) … si ce n'est que la clandestinité adultérine n'est désormais plus de mise : le cocu fait chambre à part, les deux autres lit commun. le voisinage, les employés de l'entreprise, la jeune enfant du couple n'ignorent rien d'une situation qui a tout du viager (çà fait deux ans, une éternité pour un enfer à domicile) : Léonard se résigne au ménage à trois (est-ce bien à lui de partir, d'abandonner sa môme ?), refuse le divorce et le partage des biens, les deux autres lui mènent la vie impossible, l'obligent aux tête-à-tête solitaires avec l'alcool, une bonne partie de ses nuits, aux comptoirs de tous les bars de Montmartre.

Roman policier de procédure, logique et implacable, appliqué à une situation de départ que Maigret, incrédule, juge quelque peu irrationnelle et incertaine. Situation sans cadavre, sans preuve, si ce n'est qu'à la disparition de Planchon, une intuition traîne : il est arrivé quelque chose de fâcheux et il lui faut en référer à sa hiérarchie.

… la suite appartient au récit.

« Maigret et le client du samedi » renvoie une histoire, somme toute, toute simple, celle d'un « homme nu » aux prises avec ses indécisions, disséqué au plus près de son mal-être. Est-ce un roman de genre, policier procédural type, ou de littérature blanche tout court au regard d'une enquête qui coule de source et n'apporte guère de surprises ? Ce serait presque un de ces « romans durs » chers à Simenon si Maigret n'y était pas, somme toute, indispensable, ainsi que ses pipes et pantoufles, sa femme aux petits oignons, ses adjoints aux ordres du 36 Quai des Orfèvres, cette grippe qui couve en plein hiver et morve le nez, les grogs aux comptoirs. Maigret ne passe donc pas en arrière-plan pour autant, le thème imposait sa présence, celle d'un enquêteur dont les doutes, les intuitions et les raisonnements poussent peu à peu vers l'épilogue, font partie intégrante de l'intrigue. N'empêche, Planchon est un cas, digne d'un "roman dur".

Une histoire simple, donc. Classique, presque vaudevillesque si Simenon n'y avait pas appliqué son art consommé du drame qui couve et fait mouche. S'y ajoute l'astuce géniale du secret de la confession appliqué à un commissaire de police. L'auteur sait insérer les mots qu'il convient pour enrichir un destin cousu d'avance, le rendre passionnant et d'apparence unique, attachant et vrai ; donner à la situation un poids certain, une forte crédibilité loin des pirouettes alambiquées d'un scénario inutilement complexe. On devine tout ou presque dès le postulat de départ posé ; une alternative persiste néanmoins, celle du suicide, Simenon la gardera malgré tout sous la main en trompe-l'oeil jusqu'au dénouement.

« Maigret et le client du samedi » est un roman humain avant tout ; Simenon va chercher les failles d'un homme ; le gouffre dans lequel peu à peu, faute de ressort, il s'enfonce ; la vase d'où il lui suffirait d'un rien pour s'arracher ; ses béances face aux pressions insoutenables qui l'entourent. Planchon se retrouve happé par un piège dont, à temps, il aurait pu s'extraire au prix d'un peu de courage et de fatalisme conjugal. Comme à l'habitude, les personnages secondaires (et satellitaires au prix de courtes phrases synthétiques), ne sonnent pas le creux mais rendent un son plein ; ils nous renvoient, en échos à leurs actes, à une humanité bien trop enclin à toutes les bassesses possibles. Simenon est sans pitié pour le genre, peut-être moins ce coup-ci pour Planchon à qui il donne le bénéfice du doute (même si au final Maigret trompera sa confiance aux assises).

« le client du samedi » est la description de la lente descente aux enfers d'un homme médiocre et faible, vidé de tout rebond salvateur face à un problème conjugal qui le dépasse. Ses réactions sont, quelque part, affligeantes ; on a envie de secouer cette chiffe molle qu'il s'obstine à être en acceptant les coups sans les rendre; le lecteur s'irrite, non sans raisons légitimes, de tant de laxisme incompréhensible accordé à deux belles ordures ; l'empathie à son encontre proémine parfois, on souhaiterait l'extraire de son enfer personnel. le roman est le portrait patient et précis, tout en nuances de gris foncés, d'un être malheureux, en bout de tout espoir, en bordure de précipice, égaré dans le brouillard terne d'une vie désormais sans rime ni raison, d'un être inconsistant, transparent, couleurs muraille, indécis, mou. Il était bon père (que va devenir la petite ?) et bon mari, honnête et travailleur ; mais bien trop triste, bien trop casanier, il a eu le grand tort de confier sa laideur physique (un bec de lièvre le défigure) à une femme vénale, bien trop jeune et bien trop belle. La situation psychologiquement labyrinthique dont laquelle il est pris, qu'il ne contrôle plus, est désormais en d'autres mains que les siennes ; le fil d'Ariane d'un bonheur simple s'est rompu, ne lui restent plus que la corde ou le meurtre. Quelle voie choisir si ce n'est celle, peut-être de s'en remettre à Maigret le samedi dans la salle d'attente de la PJ quand il ne travaille pas.

Lien : https://laconvergenceparalle..
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Difficile de dire mieux que l'admirable critique rédigée ici en 2015 par notre amie Woland pour souligner combien ce "Maigret et le client du samedi" (écrit l'année 1962, en "pays de Vaud" - doux pays de notre Lausannois universel, C.F. Ramuz...) est un fin chef d'oeuvre de psychologie humaine...

L'homme au bec-de-lèvre qui vient pleurer dans le gilet de Jules Maigret, l'a suivi comme une sangsue jusque dans son salon du Boulevard Richard Lenoir. En fait ce pauvre entrepreneur en Peinture & ravalement de façades lui expose une situation conjugale surréaliste : lui, Leonard Planchon, doit désormais dormir sur un lit de camp chez lui car l'amant de sa femme (un de ses employés) a pris sa place dans son propre lit... Un drame, d'autant qu'il n'arrive pas à passer au seul acte raisonnable et digne : c'est-à-dire tuer sa femme (qu'il aime toujours) et le dénommé Roger Etienne Ferdinand Prou (le bellâtre qui l'humilie...). Mais il y a aussi - sur la scène de ce méchant théâtre de boulevard (huis-clos sartrien insoupçonnable et abominable) - sa propre petite fille de 7 ans, Isabelle, dont il ne veut pas être séparé... Bref, un véritable dilemme cornélien cornélien...

Simenon est l'inventeur d'un monde (comme l'ont été Stanislas-André Steeman et le duo Pierre-Louis Boileau & Thomas Narcejac) : un monde tout empli d'odeurs familières, de sensations fugaces, de couleurs de pluie, d'humidité et de rayons de soleil. Simenon est un poète qui écrit "vrai" et sobre. Un dieu vivant de l'écriture, inventant et maîtrisant sa phrase [**] et sa bulle d'espace-temps au même moment : et jamais deux pareilles...

Mais je ne vous en dirai pas plus : foncez !!!

[*] Argh... et petit bémol.... car il nous faut vite dépasser la vision pénible et réductrice des "nouvelles couvertures" moches de cette édition du Livre de Poche... 100 % branchouilles, couleurs jurant bien ensemble, imageries surlignées de sur-signifiant (Bref, perso je ne dis pas "bravo" au Studio LGF, ni à Didier Gaillard / Plainpicture !). Tout ceci nous rappelle la laideur - "mais c'était pour faire populo" - des anciennes couvertures orange fluo des "Presses de la Cité" (années 50-70) : il est vrai que celles des précédentes édition en sépia étaient sans doute trop discrètes, belles et "classiques". le brave petit père Simenon mérite mille fois mieux que ce type d'outrage esthétique parisiens "censé mieux attirer son Gros Blaireau" ! Ces gros ploucs de Parigots nous prennent vraiment pour des méga-niais...

[**] Tiens, un exemple négatif en contrepoint "parfait" : suis accablé en lisant ces temps-ci la traduction française particulièrement feignasse du beau roman "L'invention d'Hugo Cabret" de Brian Selznick, déclinant des trouvailles comme "les yeux noyés de larme"... Grrr, pas possible de plomber les bouquins d'Autrui avec de tels lieux communs !!! Donnez-vous un peu de mal, m... !
Lien : http://www.latribudhotel.can..
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... Elle le conduisait dans le living-room, où un aspirateur électrique se trouvait au milieu du tapis.

- "Qu'est-ce que mon mari a fait ?

- Je dois prendre contact avec lui pour lui poser quelques questions ...

- Il s'est battu ?"

Elle lui désignait une chaise, hésitait à s'asseoir elle-même, tenant le peignoir croisé devant elle.

- "Pourquoi me demandez-vous ça ?

- Parce qu'il passe une partie de ses soirées et de ses nuits dans les bistrots et que, quand il a bu, il a tendance à devenir violent ...

- Il vous a déjà frappée ?

- Non ... D'ailleurs, je ne me serais pas laissé faire ... Mais il lui est arrivé de me menacer ...

- Vous menacer de quoi ?

- D'en finir avec moi ... Il ne précisait pas ...

- Cela s'est produit plusieurs fois ?

- Plusieurs fois, oui ...

- Vous savez où il est en ce moment ?

- Je n'en sais rien et je ne tiens pas à le savoir ...

- Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ?"

Elle prit le temps de réfléchir.

- "Attendez ... Nous sommes jeudi ... Hier mercredi ... Avant-hier mardi ... C'était lundi soir ...

- A quelle heure ?

- Tard le soir ...

- Vous ne vous souvenez pas de l'heure ?

- Il devait être aux alentours de minuit.

- Vous étiez couchée ?

- Oui.

- Seule ?

- Non. Je n'ai aucune raison de vous mentir. Tout le monde, dans le quartier, est au courant de la situation et j'ajoute que tout le monde nous approuve, Roger et moi ... Sans l'obstination de mon mari, il y a longtemps que nous serions mariés ...

- Vous voulez dire que vous avez un amant ?" ... [...]
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[...] ... - "A présent, vous voulez la tuer ?

- Je ne vois pas d'autre solution ... Nous avons été heureux tous les trois ... Renée n'était peut-être pas une bonne ménagère ... Je ne veux rien dire de mal sur son compte ... Elle a passé son enfance dans une ferme où on ne se préoccupait guère d'ordre et de propreté ... Dans le marais, là-bas, on appelle ces fermes-là des cabanes et il arrive, l'hiver, que l'eau envahisse les pièces ...

- Je connais ...

- Vous y êtes allé ?

- Oui.

- Il m'arrivait souvent de faire le ménage après journée ... A cette époque-là, elle était folle de cinéma et, l'après-midi, elle confiait Isabelle à la concierge pour pouvoir y aller ..."

Il parlait sans amertume.

- "Je ne me plaignais pas. Je ne dois pas oublier qu'elle est la première femme à m'avoir regardé comme un homme normal ... Vous comprenez ça aussi, n'est-ce pas ?"

Il n'osait plus se tourner vers la salle-à-manger.

- "Et moi qui vous empêche de dîner ! Qu'est-ce que votre femme va penser ? ...

- Continuez ... Pendant combien d'années avez-vous été heureux ?

- Attendez ... Je n'ai jamais compté ... Je ne sais même pas au juste quand tout a commencé ... J'avais une bonne petite affaire ... Je dépensais ce que je gagnais à aménager la maison, à la repeindre, à la moderniser, à installer une jolie cuisine ... Si vous y venez ... Mais vous ne viendrez pas ! ... Ou alors, cela voudra dire ..."

Il étreignait à nouveau ses doigts couverts de poils roussâtres.

- "Vous ne devez pas connaître le métier ... A certaines saisons, on a beaucoup de travail et à d'autres presque pas ... Il est difficile de garder les mêmes ouvriers ... A part le vieux Jules, que nous appelons Pépère et qui travaillait déjà pour mon ancien patron, j'en ai changé presque tous les ans ...

- Jusqu'au jour ...

- Jusqu'au jour où ce Roger Prou est entré dans la maison ... (...) ... [...]
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— Et la signature de l’acte de vente ?
— C’est bien à cause de cela que je vous ai demandé s’il buvait. L’écriture est assez différente… Elle est peut-être de la même main mais, dans ce cas, celui qui a signé était, ou ivre, ou en proie à une violente émotion… Regardez vous-même… Comparez… Ici, les traits sont réguliers, bien qu’un peu tremblés, comme cela arrive pour un homme qui boit mais qui, au moment où il écrit, n’est pas en état d’ivresse… Sur l’acte de vente, au contraire, toutes les lettres manquent de fermeté…
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Pourquoi votre maîtresse n’a-t-elle pas divorcé ?…
— Parce que, pour divorcer, il faut être deux, et qu’il s’y refusait obstinément…
— Il l’aimait aussi ?— Je n’en sais rien. Cela ne me regarde pas. Allez le lui demander vous-même…
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Quel âge avait-il ? C’était difficile à dire. Il n’était ni jeune ni vieux, donnait l’impression de n’avoir jamais été jeune. Trente-cinq ans ?
Ce n’était pas facile non plus de déterminer à quelle catégorie sociale il appartenait. Ses vêtements étaient mal coupés, mais de bonne qualité, ses mains, très propres, celles d’un travailleur manuel.
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Quel grand écrivain est l'auteur de près de 200 romans, l'inventeur de 8 000 personnages, et surtout, par quel livre pénétrer dans ce palais colossal ?
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