AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782221115671
816 pages
Robert Laffont (27/01/2011)
3.67/5   9 notes
Résumé :
"On connaissait le Boudard de la langue verte et de la verve populaire, ce livre révèle un Boudard plus personnel, sensible et révolté, un magnifique écrivain français", concluait la quatrième de couverture de Mourir d'enfance, le "roman" dans lequel Boudard, plus personnel que jamais, évoquait ses années de jeunesse et ses relations avec sa mère. Le jury de l'Académie française fut du même avis que l'éditeur et lui décerna pour ce livre son Grand Prix du roman en 1... >Voir plus
Que lire après Les métamorphoses d'Alphonse : Mourir d'enfance - L'étrange monsieur Joseph - La fermetureVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
C'est au milieu des années '90 qu'Alphonse Boudard écrit son autobiographie sous le titre doux-amer de "Mourir d'enfance".

A travers le récit de son enfance haute en couleurs - "Dickensienne" à faire pleurer la fameuse Margot, si elle avait été racontée par un quelconque triste sire lorgnant la reconnaissance académique - l'auteur nous donne à voir une France d'antan (celle que certains bien-pensants qualifieraient aujourd'hui de "rance"...), épicurienne, primesautière, presque "insouciante" n'était-ce la Seconde Guerre Mondiale.
Mais il n'y a de rance que le politiquement correct qui engendre l'auto-censure, n'est-ce-pas ?...
Fort heureusement, Boudard n'est pas de ceux qui se soumettaient aux diktats imbéciles, et en ces temps formatés, sa plume alerte est un véritable rafraîchissement pour le lecteur du début du XXIe siècle. Exit l'autocensure très en vogue dans notre sinistre décennie : amateurs du roman de Rentrée, formaté version "Monsieur Propre-sur-lui", passez votre chemin !

Fils d'une femme trop jeune pour être mère, accaparée par sa soif de vivre que jamais il ne juge, un géniteur inconnu, des pères de substitution multiples, ses origines difficiles, son enfance à la campagne, en passant par son adolescence parisienne, puis sa participation au conflit de '40, jusqu'à ses débuts dans le petit banditisme, l'auteur nous offre un récit vibrionnant, illuminé par une verve chaleureuse, désopilante, une chaleur de style inimitable.

Bien que s'exprimant dans un argot français parisien de la première moitié du XXe, je l'ai trouvé plus lisible qu'Audiard (que j'ai lu juste avant ce roman). Vous pouvez donc y aller sans crainte de passer à côté de certaines allusions ou saillies humoristiques.

A noter : dès 1994, Boudard fait preuve d'une surprenante clairvoyance à l'égard de l'Internet en gestation. Il ne le nomme pas, visant plutôt la télé-marchandise, mais la critique de tous les travers consuméristes, nombrilistes, les réflexes de repli sur soi liés au dévoiement mortifère de ces médias, Boudard les supputaient déjà.




Commenter  J’apprécie          42

Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Les mômes du quartier, eux ils jaspinaient déjà l'argot, ils traînassaient de la savate le long des phrases. Au début, à l'école avenue de Choisy, ils se foutaient de ma gueule quand je récitais "Le corbeau et le renard"... je les faisais marrer. On se gausse toujours de ce qui n'est pas conforme et quoi de plus conformiste que les enfants. Contrairement à une idée reçue, c'est en vieillissant qu'on devient parfois un peu original... qu'on se construit dans sa tête un univers un peu différent, qu'on baise les idées en levrette. Et d'ailleurs y a pas tellement à en faire état, ça ne peut que vous valoir des désagréments, des crachats de la foule, des quolibets radiophoniques. L'hypocrite de base doit simplement être attentif à suivre les évolutions de la mode.

"Mourir d'enfance" (p. 74)
Commenter  J’apprécie          31
Je me suis aperçu plus tard en essayant de faire le point sur ma vie, que je n'avais pas eu beaucoup d'entraves éducatives. Était-ce un bien, un mal ? J'aurais pu bien sûr avoir un dab sérieux comme mes copains du quartier, un vrai, à table chaque soir... sortant de l'usine, du bureau qui m'aurait mis au pli à la moindre incartade. Je serais peut-être alors devenu un honnête travailleur... Question de me déhotter du page le matin ça m'a jamais coûté, je suis réveillé au chant du coq... habitude de pedzouille. Mauvaise habitude... le monde n'appartient pas à ceux qui se lèvent tôt. Ce que disent les nantis pour mieux nous envoyer au charbon.

"Mourir d'enfance" (p. 96-97)
Commenter  J’apprécie          30
Il faudrait s'habituer à l'idée de la mort. On n'y arrive pas bien malgré tout ce qu'on peut écrire. Heureusement sans doute, mais si on est pas fauché subito par une bagnole en furie, un "fractus" de la cocarde pour les anciens combattants, un coup de flingue d'un vieux rival malfrat... on est pas lerche mieux loti. On meurt par petits morceaux... un oeil... le conduit auditif... les incisives qui se font la paire... les jambes qui s'attristent en montant les marches de la butte Montmartre, la tronche qu'on a de moins en moins envie de se contempler dans un miroir... et puis et puis la quéquette qui ne veut plus que faire son petit pipi à compte-gouttes. On lit tout ça dans le regard des belles, elles vous devinent la bite en froc recroquevillée par les inexorables outrages du temps.

"Mourir d'enfance" (p. 221)
Commenter  J’apprécie          20
Tous les Parisiens viennent d'ailleurs... les meilleurs Parisiens... boulevardiers ou gavroches. Je dis "viennent" il faut se résigner à dire venaient... ils n'existent plus les Parisiens... les paysans non plus. Tout ça s'unifie aux télévises, à l'HLM... au béton, au McDonald's, à la drogue... Y a plus de Pantruche que dans les films en noir et blanc. Parfois, en prêtant bien l'esgourde, on l'entend encore lorsque Jo Privat respire à l'accordéon. C'est plus que de la nostalgie, des chansons qui volent au-dessus des rues où s'éloignent des couples cacochymes qui mâchonnent le pain sec du regret. Finish Paris, la sérénade en argot. On fait encore semblant d'y croire mais ça ne passe plus... Le siècle approche... le XXIe... celui qui va vous anéantir, truffes molles qui croyez encore au Papa Noël de Tino Rossi. Ça va être la fête aux clones, aux robots, à l'image seconde simultanée... la zizique sérielle... les farandoles électroniques... virtuelles... on va vous en fabriquer à la chaîne... des divinités spéciales pour l'homoconsommateur.

"Mourir d'enfance" (p. 52-53)
Commenter  J’apprécie          10
Côté fesses et rotoplos elle avait prit sérieux de l'ampleur. L'époque pourtant ne se prêtait guère aux excès de poids. Je vous recommande le régime de Vichy, pour garder la ligne. Ca serait une bonne idée comme cure d'amaigrissement, s'appliquer à ne becter que ce qui était prévu dans nos cartes de rationnement en 1943. Résultat garanti en deux ou trois mois... avec la photo pour preuve : avant, après... comme dans "France-Dimanche".

"Mourir d'enfance" (p. 116)
Commenter  J’apprécie          30

Lire un extrait
Videos de Alphonse Boudard (16) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Alphonse Boudard
21 novembre 2009 :
Mot de l'éditeur :
« Je regrette de ne pas lavoir butée pendant quil en était encore temps. Nul besoin de réfléchir ni délaborer le crime parfait. Plus cest gros mieux ça passe.

Elle faisait le ménage monsieur le commissaire. Elle a dû glisser sur le carrelage quelle venait dastiquer. On pouvait lui reprocher bien des choses, mais une vraie petite fée du logis, une maîtresse-femme. Quest-ce qui sest passé? on ne le saura jamais. Mauvais contrôle du pied dappui, fort justement monsieur le commissaire, le coup du lapin. La faute à pas de chance, encore une fois.

Jaurai dû lui mettre un grand coup derrière sa gueule alors que tout le monde ignorait encore notre différent. Les Boulard ? Un exemple pour tous les couples modernes. Jamais un mot plus haut que lautre, aimables avec les voisins, bonjour et bonsoir. Jaurai utilisé le cendrier en granit de Bénodet. Jaurai pris mon élan, de toutes mes forces et de toute ma rage, pour la frapper à larrière de son crâne vide. Plus tard, bien plus tard, jaurai appelé le SAMU. Oui, ça a dû se passer il ny a pas bien longtemps docteur. Mais jétais en train de bricoler dans le garage, je nai rien entendu parce je perçais des trous dans de la tôle. Cest que je construis un cabanon pour abriter les outils de jardin. Ce nest pas que jai beaucoup de terrain, mais ça me détend de pratiquer lart potager. Et puis, cest pas les légumes quon trouve dans le commerce. Des saveurs et des parfums incomparables. Ah oui, ma femme. Quand jai constaté, il devait déjà être trop tard. Enfin, je ne suis pas médecin. Je ne peux pas juger, mais elle était très pâle. Quest-ce que vous en pensez docteur?

Lélectrocution à la machine à laver, cest pas mal non plus. Combien de femmes disparaissent chaque année alors quelles accomplissaient leurs tâches domestiques? Elle avait grand soif, mais elle avait la manie de stocker les produits pour déboucher les cabinets dans des bouteilles deau minérale. Elle faisait les vitres au troisième étage un jour de grand vent. Elle préférait le bain à la douche, pourtant elle sétait toujours refusée à apprendre à nager. Elle avait la manie de garder près delle une bougie pour la sieste.

Ca fait trois lignes, dans les journaux, à la page des faits divers. Personne ne sen émeut. Sinon les proches, évidemment, car le plus dur cest toujours pour ceux qui restent.
elle est tombée à la renverse, sa tête a porté contre le rond des chiottes. Une belle mort, elle ne sest pas vue partir. Exactement, comme vous dites »

Lorsquil écrit, lorsquil se laisse porter par le jaillissement des mots, Serge le Vaillant ne manque pas de soumettre ses textes à lépreuve du « gueuloir » de Flaubert, de les lire à haute voix pour mieux les fignoler. Ancien capitaine au long cours, grand homme de radio, grand chef dorchestre des nuits de France Inter, cet orpailleur de la langue française, quelle soit verte ou noire, est un magicien. Il na pas seulement le talent de conteur dun Gérard Sire ou dun Jean-Pierre Chabrol. le culte des mots ciselés, des mots torchés, la faconde dune prose féconde, le sens de lorgie verbale.
Ses textes ont le verbe acide et tendre, le verbe au goût de pomme dApi, celui qui baptise et qui tue, qui bénit et qui excommunie, qui conjure et qui absout, qui enfante et qui explose, qui hurle et qui chuchote, qui pleure et qui pavoise. Serge Levaillant appartient à la lignée des Rabelais, des Villon, des Rostand, et plus près de nous des Céline, Léon Bloy, Auguste le Breton , Albert Simonin, Francis Blanche, Alphonse Boudard, Michel Audiard, et autres Frédéric Dard. Il est un magicien, un orpailleur de la langue, quelle soit verte ou noire, ciselée ou torchée : avec lui les mots croustillent. Ils mordent, ils aboient, ils cajolent. Ils sont tour à tour tendres et cruels, nourris de vinaigre et de miel, de gifles et de caresses. Ils décapent. Ils émeuvent. Ils déchaînent des crises de rires et de jubilation. Ils touchent à la fois nos coeurs et nos zygomatiques.
+ Lire la suite
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (21) Voir plus



Quiz Voir plus

Alphonse Boudard

Année de naissance ?

1925
1935
1945
1955

12 questions
29 lecteurs ont répondu
Thème : Alphonse BoudardCréer un quiz sur ce livre

{* *}