René de Obaldia vient de nous quitter il y a quelques jours, à l'âge de 103 ans, ce qui m'a poussée à relire ses textes. Je connaissais surtout ses poésies, mais je n'en avais pas chez moi. En cherchant bien j'ai trouvé deux de ses pièces dont le satyre de la Villette. Cette pièce a reçu à l'époque un accueil mitigé et controversé, certains critiques y voyaient une atteinte à la morale et aux bonnes moeurs, surtout parce que le rôle d'Eudoxie était, bien sûr, joué par une enfant. La pièce fut défendue par
Ionesco et par
Marcel Aymé, ce qui n'a rien d'étonnant puis qu'on y trouve quelque chose du théâtre de l'absurde de l'un, et la poésie à la limite du surnaturel de l'autre. Ce qui m'a frappé, c'est aussi la modernité de la critique sociétale sur la télévision, les informations qui arrivent en continu, la notoriété télévisuelle. La pièce date pourtant de 1963, époque où il n'y avait encore qu'une seule chaîne et pas d'Internet ! La petite Eudoxie a quelque chose de Zazie, et finalement c'est elle, bien qu'elle prenne un malin plaisir à prendre les messieurs au piège de leur réputation, qui démasque le véritable satyre de la Villette, et non les policiers. le personnage de madame Cloquet est un modèle de mère possessive caricaturale. Quand au personnage du satyre, qui trompe son monde dans le premier acte, c'est le seul qui soit totalement réaliste. Comme le dit Urbain, il faut se méfier des apparences : « Fatalement, du moment où l'on « apparaît » sur cette terre, on a toutes les apparences contre soi. » A redécouvrir pour sa modernité.