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Le Monde des Ā est un roman de science-fiction, dans l'acception la plus originelle du terme, c'est-à-dire une fiction ayant pour point central une réflexion d'ordre scientifique.

D'après moi, l'entrée dans la narration proprement dite, c'est-à-dire les différentes actions et péripéties vécues par le héros, Gilbert Gosseyn, s'effectue de façon assez aisée ; en revanche, l'accès au sens profond du livre n'est peut-être pas aussi aisé pour le lecteur.

Tout d'abord, que signifie ce A ? A comme Aristotélicien, or, l'aristotélisme n'est pas forcément la notion la mieux partagée, ni la plus maîtrisée par la moyenne de la population, je suppose, d'où ma petite digression, pour laquelle vous voudrez bien me pardonner si elle s'avère inutile. Ici, je pense que l'aristotélisme est à prendre au sens négatif du terme, à savoir une vision archaïque de la connaissance, par opposition, par exemple, à Galilée qui s'opposa aux visions et représentations antiques (donc aristotéliciennes) de l'univers.

Donc Ā (prononcé " non-A ") renvoie alors à la notion opposée à cette acception de l'aristotélisme et qu'on pourrait grossièrement définir comme étant une vision éclairée, moderne, relativiste de l'univers et de ses points d'interface avec le vivant. Être Ā est donc ici une variable et une qualité positive.

Cette précision étant donnée, j'entre plus précisément dans le vif du sujet et qui sera une lutte : la pensée A contre la pensée Ā. Pour A. E. Van Vogt, les A ont une pensée émotionnelle tandis que les Ā en ont une rationnelle (pour faire simple, c'est un peu plus compliqué que cela en vrai). Pour faire simple encore, le siège de ces pensées émotionnelles correspondraient aux parties les plus profondes de notre encéphale, ce que vulgairement on nomme " cerveau reptilien ", alors que la pensée rationnelle serait quant à elle plutôt sise dans les parties corticales du cerveau, soit, la plus récente, évolutivement parlant.

Concrètement dans le livre, le monde des A c'est celui qui règne sur la Terre tandis que sur Vénus est une sorte de paradis Ā. Mais ce n'est pas encore aussi simple que cela. Sur la Terre, une sorte de méga ordinateur géant se charge de présider aux décisions et d'oeuvrer pour le bien commun. Mais est-ce véritablement le bien commun ? La Machine est-elle fiable ? Est-elle désintéressée ? Mystère.

Quoi qu'il en soit, des représentants d'une espèce d'empire galactique extérieur, A par nature, avide, dominateur, sanguinaire essaie de prendre les commandes sur la Terre et, pour ce faire, a besoin de détruire la Machine.

Et c'est là que notre héros, Gilbert Gosseyn entre en scène. Tout porte à croire qu'il a été envoyé par la Machine pour protéger la Terre des menées galactiques. Mais selon quelles modalités doit-il agir ? Qui est-il
vraiment ? Quelles sont ses aptitudes particulières pour avoir été ainsi désigné ? Tout ceci et encore bien d'autres choses, il n'en sait fichtre rien. C'est à lui de le découvrir… s'il ne se fait pas trucider avant.

Le roman est, selon moi, très efficace dans le déroulement de l'intrigue jusqu'aux deux tiers environ. Par la suite, cela devient peut-être un peu plus nébuleux. Les renversements sont tellement renversants qu'ils en deviennent un peu perturbants et l'on finit parfois par se dire : « Mais qu'essaie de me faire passer ou de me dire l'auteur, finalement ? »

Ce que j'en retiens, personnellement, c'est la grande méfiance que nous devons toujours garder vis-à-vis de nos propres perceptions et interprétations du " réel ". Qu'est-ce que le réel d'ailleurs ? N'est-ce que ce qui est limité par notre propre appareil perceptif et cognitif ? Peut-on traverser une pierre ou un corps humain sans l'abimer ? Jusqu'il y a peu encore, on aurait répondu non, or, on sait depuis un gros siècle que les rayons X traversent aisément certains corps. Vous allez me répondre : « Oui mais ils l'abîment ! » Certes, c'est un peu vrai, il y a interaction de la radiation avec le vivant, mais si je vais encore plus loin et qu'au lieu de prendre une radiation X je me replie sur un neutrino, là, tout redevient possible. Etc., etc.

Bref, le réel est relatif et comme l'écrit l'auteur dans la postface, une chaise n'est pas une chaise, dès lors qu'on s'intéresse à la structure atomique de la matière qui la constitue. (Une chaise en fer est bien plus différente d'une chaise en bois que d'un couteau fait de ce même élément, etc., etc.)

Deuxième point sur lequel l'auteur souhaite attirer notre attention : l'impasse que constitue un monde et une société basés sur la compétition. Il oppose en cela monde terrien et monde vénusien, ce dernier étant, de ce que j'en ai à peu près compris un monde répondant aux critères de l'anarchisme, c'est-à-dire, l'ordre moins le pouvoir. Toutefois, j'ai trouvé cette évocation plus nébuleuse, peut-être parce qu'il redoutait une forme de censure s'il allait au fond de sa pensée (n'oublions pas que le livre a été écrit en 1945 et qu'on ne rigolait pas à l'époque avec l'anarchisme qui avait été sévèrement réprimé en Espagne en 1936 et aux États-Unis au début du XXème, comme l'illustre l'affaire tristement célèbre de Sacco & Vanzetti dans les années 1920).

En somme, un livre intéressant de mon point de vue, qui pose des questions, sans forcément chercher à y apporter des réponses toutes faites, qui soulève des interrogations, tout au moins, et qui nous oblige à aller creuser, chercher par nous-même des tentatives de réponses, et qui nous oblige à examiner un petit peu quelle est l'image qu'on se forge de la réalité et de la manière dont nous souhaitons l'appréhender. Mais bien entendu, ceci n'est qu'un avis très relatif, dont je ne saurais dire s'il se situe chez les A ou les Ā, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Boris Vian a traduit le Monde des Non-A en 1953. Beaucoup considèrent cela comme le moment de la renaissance de la science-fiction en France car la méthode de travail de van Vogt avait de quoi plaire au Paris de l'époque. Il programmait son réveil pour sonner a chaque 90 minutes, écrivait en vitesse ce qui lui venait dans son demi sommeil, et retournait se coucher.

Pour lui, chaque scène du roman ne pouvait dépasser les 800 mots, ce qu'il faut qu'il utilise les ellipses de façon tout à fait habituel.Le résultat est un roman étrange, planant et qui va dans toutes directions. L'histoire et la plume déconcertantes en font son originalité, malgré quelques passages qui ont pris de l'âge.

C'est aussi (à ma connaissance), la première apparition de certain tropes qui deviendront ensuite des classiques de SF. Celui des jeux où tout est permis à la The Purge/Hunger Games. Ou celui d'un grand ordinateur bienveillant gouvernant, du haut de sa sagesse, l'humanité entière. Et cela, ce n'est que les deux premiers chapitres. L'histoire dérive ensuite beaucoup, beaucoup plus loin.
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Je suis contente d'avoir lu ce classique, précurseur un peu du genre. On entre très facilement dans l'histoire et même si parfois j'ai eu du mal à comprendre exactement ce qu'était le A et le non-A, j'ai compris dans l'ensemble. Un récit bien rythmé et assez fascinant , encore plus à l'époque j'imagine ! Je me demande maintenant si Richard Morgan a eu l'idée d'Altered Carbon avec ce cycle de A. Enfin, depuis les idées développées dans ce roman ont pu apparaître dans bien des romans , je ne suis pas une spécialiste.
En tout cas je suis curieuse de lire la suite de ce roman très riche !
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Un livre aux pages un peu jaunies, un classique de la science-fiction publié dans les années 40.

SI mon exemplaire faisait vieillot, l'histoire en elle-même n'a pas trop souffert du passage du temps. le roman se passe dans un autre millénaire et si on y déplace parfois des lampes, des tubes cathodiques, comme on ne sait plus vraiment ce que c'est aujourd'hui, ça peut sembler aussi futuriste que dépassé.

Le dispositif technologique central, c'est une intelligence artificielle, la Machine, qui contrôle l'existence des gens en leur attribuant un rôle dans la société en fonction de leurs résultats aux épreuves des Jeux. Mais le roman est presque plus philosophique que technologique, les candidats doivent démontrer leur aptitude à penser Non-A, une logique non-aristotélicienne et la récompense ultime c'est de faire partie des colons de Vénus, pour y joindre un peuple évolué, devenu pacifique parce que débarrassé des instincts de violence et de pouvoir.

Une autre question fondamentale est celle de l'identité, le « qui suis-je vraiment ? » car le roman raconte les aventures de Gosseyn qui avant même de se présenter à la Machine, s'aperçoit qu'il n'est pas lui-même, ce qu'il croit savoir, ses souvenirs, semblent faux. Il sera ainsi involontairement mêlé à des complots pour conquérir la Galaxie.

Une lecture qui m'a beaucoup plu, quel que soit le sens qu'on donne à ces simples mots, sans s'interroger sur la sémantique de chacun des mots…
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Veni, vidi, vici…. J'ai veni… j'ai vidi… et c'est tout.
Le monde des non A est très bien écrit, traduit par Boris Vian, quand même. Mais, j'ai rien compris au but de l'histoire. C'est pas bien grave, je n'en prends pas ombrage, juste un peu frustrée, la fille.
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Ce livre au titre étrange m'a ouvert tout grand les portes de la SF classique.
J'ai lu le Monde des non-A à 17 ans, quand j'ai découvert que Boris Vian en était le traducteur. Avant cela, je ne connaissais la science fiction qu'à travers des BD, la télé et les dessins animés ; et un unique roman - emprunté à la bibliothèque de ma classe de CM2 - qui abordait la drogue et l'esclavage sous couvert d'aventures sur une planète exotique.
Je savais déjà que la parole peut faire ou défaire nos mondes de mots (fiat lux, etc). Mais avec ce bouquin je me plongeai pour la première fois dans un roman de SF « sérieux », un auteur de ce que j'apprendrai à appeler l'âge d'or de la SF américaine.

Ce fut une claque.

Pas du côté littéraire, sur ce plan là comme pour la narration, je trouve Van Vogt assez moyen, largement dépassé par plusieurs de ses contemporains.
Je garde du roman (que j'ai relu quelques fois) une impression de récit décousu, voir de parties manquantes. Cela dit, ce n'est pas si facile de créer un fil narratif quand le héros découvre que son passé est fictif, puis qu'il s'amuse à mourir et à se réincarner ailleurs... Je me demande parfois si la manie de van Vogt de puiser des idées dans ses rêves (il se réveillait chaque nuit pour les noter) n'a pas syncopé sa narration.

Là où Van Vogt et ses non-A m'ont vraiment scotché, c'est du côté de l'ambition du livre, des sentiers qu'il ouvre et explore. Il y a au coeur du récit l'idée si séduisante que nous pouvons changer, nous transformer, ou plus modestement échapper au façonnage que nous imposerait les traumas de l'enfance. J'ai été happé par ce côté du livre et par ce discours, et par la tranquille anarchie des non-A. de ce point de vue, le Monde des non-A est un livre profondément optimiste.

Bien plus tard j'ai appris que Van Vogt avait fondé le monde des non-A sur une théorie solide : la sémantique générale. En trois mots, cette approche se proposait de résoudre la névrose par la prise de conscience de la différence entre le signifiant et le signifié. D'où ce leitmotiv du livre : « la carte n'est pas le territoire », ou encore cet adage « le mot chien ne mord pas ». Ceux qui ont assimilé cet écart sont qualifiés de non-A, les non-artistotéliciens. Et fondent une société anarchique et paisible sur la planète Vénus.

C'est étrange de penser qu'aujourd'hui tout un pan de la psychologie moderne s'intéresse à la réilience, l'incroyable capacité qu'ont certains d'entre nous à surmonter des épreuves démesurée.
Van Vogt a-t-il raison aussi de penser qu'une anarchie ne peut exister qu'entre humains débarrassés de leurs névroses ?
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Cette année, Gilbert Gosseyn participe aux Jeux : rassemblant la crème de l'élite intellectuelle, ils permettent aux initiés du non-A de rejoindre une colonie idyllique sur Vénus. le non-A (pour non-aristotélicien), pour faire simple, est une philosophie qui permet à la personne qui la pratique de se débarrasser de ses derniers instincts animaux pour adopter des raisonnements logiques qui font réellement honneur au potentiel de l'être humain. Pouvant alors raisonner parfaitement, les non-A de Vénus peuvent vivre en communauté auto-géré, sans avoir besoin de police, de justice ni d'armée.

Pourtant, pour notre héros, les choses tournent mal tout de suite : personne ne le reconnaît en tant que Gilbert Gosseyn, et le monde entier semble s'accorder sur le fait que ses souvenirs soient totalement bidons : sa prétendue épouse est la fille du gouverneur de la planète, aucun de ses soi-disant voisins ne se souvient de lui, … Coincé dans ce cauchemar, Gilbert aura bien besoin de sa pratique de la pensée rationnelle pour comprendre ce qui est en train de lui arriver.

J'ai éprouvé des sentiments contradictoires pendant ma lecture. Tout d'abord, je comprends son statut de livre culte dans la science-fiction. le bagage théorique est assez imposant : la philosophie non-A, que je prenais pour une construction de l'auteur, existe réellement ; on a aussi de bons questionnements sur le thème de l'identité, des souvenirs, … Tout ça donne un petit côté « hard science » assez agréable.

Mais d'un autre côté, l'intrigue m'a parue assez pauvre et très décevante en comparaison : elle ressemble beaucoup à un scénario de block-buster (mais après tout, est-ce que ce n'est pas le roman qui a inspiré des centaines de copie dans le cinéma ?), avec son lot de passages obligés, et les rebondissements sont assez prévisibles. Heureusement, le roman a assez de matériel pour provoquer quelques surprises qui viennent relancer l'intérêt au cours de l'histoire, et la fin est à la hauteur des ambitions du roman.
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Je vais réfléchir. Réfléchir pour prendre une décision. Voilà. Je sais comment je vais écrire cette critique.

Je n'ai pas du tout accroché.


L'idée bien sûr est intéressante : imaginer des sociétés différentes selon les modes de pensées qui s'y sont développées, le système aristotélicien qui utilise un mode de pensée thalamique (basé sur les réflexes et les émotions) et le système non-aristotélicien (basé sur la réflexion et sur la distinction du monde et de sa représentation – mentale et verbale).

A noter l'expression « la carte n'est pas le territoire » utilisée à plusieurs reprises pour illustrer le non-A, principe de la sémantique générale.


Bien après ces grands principes très intéressants pour ceux que ça intéresse, l'histoire.

Gilbert Gosseyn passe son temps à réfléchir (d'où ma phrase d'accroche), prendre les mauvaises décisions ; à peine parti d'un endroit, malgré tout le mal que cela lui a donné, il y retourne immédiatement, pour se faire avoir, se rendre compte qu'il a pris la mauvaise décision. C'est énervant !!

L'histoire m'a semblé difficile à suivre aussi pour deux raisons :
Des dialogues qui ne sont pas écrits ; à la place on nous signale que deux personnages ont discuté. Mais parfois, je n'étais pas sûre du contenu de cette conversation.
Des actions ne sont pas décrites en totalité ; par exemple certains déplacements du héros alors j'ai dû relire des passages pour me rendre compte que le lieu avait changé.


Bref, il ne s'est pas passé grand-chose je trouve dans ce premier volume et je me suis un peu forcée à le finir. Cependant ayant appris la tolérance et la persévérance, je me suis quand même attaquée à la suite, « les joueurs du non-A ».
Allez GG, bouge-toi un peu.
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Un livre assez complexe, avec plusieurs niveaux de lecture, mais néanmoins abordable par le commun des lecteurs.
L'histoire du héros qui ignore qui il est, est assez commune, mais c'est tout l'univers développé autour, son système de penser qui rend ce livre unique.

Un classique, et un formidable étendard pour démontrer que la SF, ce n'est pas juste le récit d'une bataille spatiale.
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Il faut accepter de se perdre avec ce roman mais nous ne lirions pas si nous n'aimons pas cela ! Nous sommes aussi perdus que Gilbert Gosseyn , le héros, dès les premières pages et ce, dans presque tout le roman.  Il ne sait pas qui il est ni ce qu'il a fait. Tout le monde lui en veut. Lui qui aimerait tant atteindre les postes les plus élevés d'une société devenue non aristotélicienne (et non platonicienne) c'est à dire, grossièrement, non gouvernée par ses émotions donc névrosée. Il y a de nombreux rebondissements, téléportation, cerveau second, résurrection. Un tres bon roman qui allie action et réflexion, un des grands atouts de la bonne science-fiction. Et une pensée nous vient, effrayante : nous nous dirigeons sur le chemin inverse d'une société non aristotélicienne.
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