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Citation de mamansand72


Extrait de J’ai dix ans… demain – Michel Bussi
Sur la plage d’Ouistreham, je croise souvent des Français. C’est rare qu’ils s’approchent de nous. En général, ils évitent la voie verte ou le chemin de halage, là où nos tentes sont plantées. Personne e s’aventure dans le camp, à part les associations et les policiers. Moi c’est tout l’inverse. Je me promène ! Je regarde, j’écoute, j’apprends. Parfois, quand je croise des jeunes Français, j’essaie de leur parler. Surtout aux plus grands. Je vois bien qu’ils se méfient. Qu’ils ont peur, même.
Waouh ! Des lycéens, des étudiants qui ont peur d’une gamine qui n’a pas encore dix ans ! Ils craignent quoi ? D’attraper une maladie en discutant ? Que je finisse par leur demander un peu d’argent ? Je n’ai jamais mendié. Jamais de ma vie !
Peur de quoi, alors ? Que je leur vole leur terre ? Leur sable ? Leur mer ? Parfois, quand je les vois sortir de classe, balancer leurs sacs sur la digue, partager des bières, des rires et s’embrasser, je me demande pourquoi le sable, la mer et la terre d’ici leur appartiendraient. Leur appartiendraient plus qu’à moi, je veux dire. Parfois, je me laisse envahir par des idées pires. Je me demande, quand je regarde les ados d’ici organiser un foot à marée basse, ou s’installer en rond autour d’un poste de musique en attendant que la nuit tombe, ce qu’ils ont fait de plus que moi pour mériter cette plage.
Ils sont nés ici, c’est tout. J’ai beau chercher, je ne vois pas quel autre effort on leur a demandé. Alors que moi, on pourra dire ce qu’on veut, mais j’ai quand même marché pendant plus de trois mille kilomètres pour arriver jusqu’ici. S’il fallait passer un concours pour devenir français, ou anglais, je crois que j’aurais quand même quelques points d’avance sur eux !
Dès que je m’approche d’eux, ils détournent les yeux. J’ai envie de leur crier que je comprends que la naissance soit une loterie, qu’il faut un peu de chance et que tout le monde n’a pas reçu les mêmes cadeaux dans son berceau. Que je ne vais pas leur demander de partager leur toit, l’amour de leurs parents ou l’argent placé sur leur compte en banque. Mais le reste ? Le ciel au-dessus de notre tête, le sol sous nos pieds, pourquoi ce serait aussi dans la corbeille du nouveau-né ? Pourquoi on ne pourrait pas le partager ? Pourquoi il n’appartiendrait pas tout autant aux étrangers ?
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