Arnaud Riou

Certains s’isolent dans un petit ermitage et se sentent dans la plénitude. D’autres sont entourés, mais toujours en manque de compagnie. La pire des solitudes n’est pas d’être seul, mais d’être un horrible compagnon pour soi-même.

Lorsque nous sommes fragilisés, nous avons besoin de réconfort, d’écoute, de soutien, une parole juste, un regard sincère ou un geste fraternel ont une valeur inestimable. Nous ne devrions jamais nous priver d’offrir ces gestes au quotidien, même à des inconnus.

–Cette bougie n’a d’autre réalité que celle qu’on lui donne. Pour certains, une bougie est un pont vers l’esprit. L’allumer, c’est accomplir un rituel. Pour d’autres, c’est juste une façon de s’éclairer. La bougie est le gagne-pain de ceux qui l’ont fabriquée. Elle est le calvaire des enfants chinois qui font fondre des tonnes de paraffine dans les usines du Sichuan pour un salaire de misère. Cette même bougie émerveille l’enfant qui s’apprête à la souffler le soir de son anniversaire. Quant au papillon de nuit qui vole trop près d’elle, attiré par sa lumière, il s’y brûle les ailes en une seconde. (...)
Chacun vit sa réalité à partir du regard qu’il pose sur les phénomènes qu’il rencontre.

Nous sommes ainsi pétris d'habitudes, de conventions. Les civilisations de l'Aigle se sont éloignées de l'essentiel. Pourtant, derrière le vernis, nous aspirons tous à retrouver l'authenticité, la vérité, l'amour, les liens de l'âme et le sens de notre vie.

Dans un monde tellement matérialiste, le rituel apparaît comme un phénomène à part, un mystère, une porte d’accès à une autre dimension, bien plus poétique. Depuis l’école, la pensée cartésienne nous force à considérer les aspérités de ce monde en termes de problème et de solution. Nous avons passé notre scolarité à résoudre des équations, des interrogations, des problèmes. Nous continuons, une fois adultes, à chercher des solutions aux problèmes que nous nous créons. Problèmes de santé, de couple, d’argent, problèmes au bureau, problèmes avec sa voiture, son tuyau d’arrosage, sa cafetière, problèmes relationnels, existentiels, problèmes avec le petit dernier, avec le voisin, problèmes juridiques, de dents, de peau, problèmes de riches, faux problèmes, et clé du problème ! Notre vie est ponctuée par des problèmes auxquels nous cherchons des solutions. Celles-ci doivent être efficaces, rapides et pragmatiques pour nous faire croire que, tour à tour victimes et sauveurs, nous sommes performants pour résoudre nos problèmes dans leur dimension temporelle.

Ce ne sont pas les accessoires qui font le chaman, pas plus que ce ne sont les chaussures qui font le coureur, ou la raquette, le champion de tennis. La qualité du rituel dépendra de la clarté de votre cœur. Quelle que soit votre expérience, si votre cœur est sincère, vous vous aventurerez sur le chemin des rituels avec l’innocence d’un enfant et l’humilité d’un vieux sage. Sans rien attendre, vous recevrez plus encore que vous ne l’espériez.
L’outil n’est rien en comparaison du cœur du praticien. Le pendule ne fait pas le radiesthésiste. J’ai en rencontré d’excellents et très expérimentés qui, ayant oublié leur pendule, utilisaient un bouton et un cheveu pour en confectionner un de fortune, qui s’avérait d’une précision millimétrique, comme j’ai vu des apprentis radiesthésistes équipés d’un pendule aussi cher que lourd être incapables de s’en servir.

Alors, doit-on parler de rituels ou de néorituels ? Neo vient du grec et signifie « nouveau ». Les rituels que je pratique et que j’évoque dans ce livre n’ont rien de nouveau. Je n’ai rien inventé. J’ai reçu beaucoup d’initiations dans ma vie, et je me contente humblement de transmettre ce que j’ai reçu. Pour les besoins de notre époque, j’ai sans cesse adapté, allégé parfois, simplifié souvent, la forme des rituels, mais cela ne change rien au fond ni à l’essence. Pour autant, mon cœur est clair quant à l’intention qui me fait les transmettre. Les nommer néorituels serait s’approprier un quelconque mérite quant à leur invention. Ce serait aussi les fragiliser quant à leur histoire. Il n’existe pas de brevet en termes de rituels.

Il en est ainsi des rituels : ils marquent les esprits car ils associent une action qui a du sens à une intention libératrice. Ils agissent sur un autre plan, plus subtil, une autre dimension, plus spirituelle. Le rituel réconcilie le geste et la parole, le temporel et l’éternel, l’âme et la personnalité, le spirituel et la matière, nous et les autres. Le rituel nous invite à pénétrer le monde de l’invisible, du symbole, du mystère et de la poésie. Il nous offre une guérison, une réparation proportionnelle à la foi que nous avons en lui. Car le rituel s’adresse, avant tout, à celles et ceux qui sont prêts à croire en une dimension qui leur échappe, en s’ouvrant à sa magie symbolique.

C’est pourquoi, ce jour-là, j’ai pu apprécier chez notre chaman bön sa capacité d’adaptation. Il a fait avec ce qu’il avait, sans perdre de vue son intention initiale : accompagner les défunts dans l’autre monde. Cette observation m’amène à une conclusion essentielle quant aux rituels, une conclusion que je partage à l’aube de ce livre. Les rituels sont l’association d’une intention claire dans le monde invisible et d’une action précise dans le monde visible, qui s’appuient sur des mouvements, parfois des mudras, des gestes, des attitudes, et qui utilisent des accessoires adéquats.

Aussi, si vous avez été initié à une tradition particulière, je vous encourage à respecter les rituels, les accessoires, les symboles associés à cette tradition, si vous souhaitez lui rendre hommage. Pour autant, rares sont ceux, aujourd’hui, qui ont suivi une initiation aux rituels suffisamment poussée pour être à même de la transmettre dans le respect de la lignée. Nos propres rituels celtiques et druidiques exigent eux aussi une longue formation pour être perpétués dans le scrupuleux respect des traditions.