Ne restons pas à genoux...
Ne restons pas à genoux
nous avons bras et bouche à ouvrir
paupières à hisser
c’est sûr il faut qu’on carpe diem
il faut qu’on cueille le jour avec nos petites mains de jardiniers
hors-sol avant que nos phalanges ne rouillent d’inertie
carpe diem si doucement entre le pouce et l’index
avec nos doigts usés d’écrans
afin qu’ils retrouvent leurs empreintes
carpe diem comme on saisit sa chance comme on attrape le
dernier bus et qu’on soupire parce que c’est si bon un peu de
chauffage au cœur de l’hiver
carpe diem comme on aspire un pissenlit bouche grande
ouverte parce qu’on voudrait plus de constellations dans
nos poumons
Il faut qu’on carpe diem pour la lumière sur les lavandes pour
les montagnes fières les paroles rares et les balbutiements de
24 mois
pour la sauce du kebab qui coule sur nos doigts
et la vieille assise sur son banc qui invite le soleil dans ses cheveux blancs
…
C'est beau le seuil des choses
quand le monde tremble sur son socle et qu'il naît une inclinaison
nouvelle
il est bon d'héberger l'éphémère
d'aimer que l'hiver
grelotte nos corps
que la peur
chancelle nos mains
et que le désir
palpite nos langues
comme des essaims d'or
il faut qu’on cueille …
il faut qu’on cueille ce qui nous passe sous les pupilles qu’on
cueille comme on embrasse avec les lèvres les cils toute la
peau et tout le sexe à grandes brassées pour arrêter un peu
le ciel la montre le RER et tous les lévriers afghans qui ont
perdu leur flair à force de galoper comme des acharnés
carpe diem il le faut
à la santé des oiseaux des roses de Damas des allumeurs de
réverbères
il faut carpe diem ses cascades de rires son souffle sur la peau
des seins ses parfums d’Italie ses olives noires sur les quatre
saisons et ses arpèges clairs comme un jour de printemps
il est temps
carpe diem
s’il le faut
à en mourir
Il suffit d'un peu de souplesse dans le regard