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Critiques de Jessica L. Nelson (75)
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L'Orageuse

«Mon destin sera plus extraordinaire qu'un roman d'aventures », assène crânement Louise Révoil de Servannes à l’âge de dix ans. « On écrira des livres sur moi. Dans deux siècles, on se souviendra de la femme que j'étais. Sinon, pourquoi vivre ? »



Est elle née le 17 aout ou le 16 septembre 1810 ?

Un oubli de son fiancé Hippolyte Colet a-t-il reporté son mariage du 4 au 5 décembre 1834 ?



Jessica L. Nelson assume « Que les historiens me pardonnent les libertés prises avec le réel. Quant à Louise, elle ne m'en voudrait pas, je crois, d'avoir traité sa destinée comme celle d'une grande héroïne romanesque. »



Ce roman n’est donc pas une biographie, comparable, par exemple, à « Ariel ou la vie de Shelley » d’André Maurois, mais l’épopée romancée d’une femme de lettres couronnée par plusieurs prix au XIX° siècle.



Montée à Paris, la jeune méridionale écrit « fleurs du midi » qu’elle adresse à François-René de Chateaubriand en sollicitant une préface. Celui remercie en déclinant aimablement la demande de l’inconnue. L’orageuse ne se démonte pas et publie la lettre de l’illustre « chateau brillant » en introduction de son recueil de poèmes qui obtient le prix de l’Académie française d’un montant de deux mille francs en 1839. Elle est à nouveau primée en 1843,1852 et 1854 (performance jamais réitérée) et rappelons que les pièces sont envoyées anonymement ce qui réduit au silence les médisants qui attribueraient à ses charmes ce qui résulte de son talent.



Louise, séductrice, oublie à son tour son époux musicien, et entame une relation avec Victor Cousin qui règne sur la Sorbonne. En 1840 sa maternité est dénoncée comme « une piqure de Cousin » par le journaliste Alphonse Karr. L’orageuse lui plante un couteau dans le dos, et le journaliste à l’élégance de survivre, de ne pas déposer plainte, et d’encadrer le couteau dans son salon avec l’inscription « Donné par Madame Louise Colet (dans le dos) ».



En 1842, Louise rencontre Juliette Récamier et se lie d’amitié avec celle qui domine alors la vie culturelle. Juliette lui remet en 1844 sa correspondance avec Benjamin Constant et lui demandant de l’éditer après sa mort. En 1849 Louise publie cette correspondance au grand dam d’Amélie Lenormand, nièce et légataire testamentaire de Juliette, qui l’accuse d’abus de confiance et insinue qu’elle a rédigé des faux. Malgré le témoignage de Marceline Desbordes-Valmore, le tribunal lui retire cette correspondance.



En 1846 (à 36 ans) elle rencontre Gustave Flaubert (25 ans) alors inconnu … commence une liaison orageuse où Louise harcèle Gustave qui tente de fuir « aime l’art, il vaut mieux que l’amour » et de s’abriter à Croisset sous la protection maternelle. Louise se sépare de son mari et poursuit Gustave jusque dans un fiacre où ils jouissent d’un plaisir que Faubert immortalisera dans la fameuse scène où Emma Bovary voyage avec Léon. Jessica L. Nelson n’étant pas soumise à la censure impériale s’en donne à coeur joie dans cet épisode torride !



La révolution de 1848 permet à la romancière de placer l’Orageuse sur les barricades puis le coup d’état du 2 décembre 1851 l’ancre dans l’opposition au régime impérial. Elle visite Victor Hugo exilé à Guernesey qui admire « La colonie de Mettray », parcourt l’Italie insurgée et publie « L’Italie des italiens » en 1864 qui rencontre le succès puis est reporter en Egypte en 1869 lors de l’inauguration du Canal de Suez.



Elle décède en 1876 à l’époque où nait Marie de Hérédia, future Marie de Régnier, elle aussi multi distinguée par l’Académie française, mais rien de comparable entre le destin d’une provinciale inconnue et celui de la fille et épouse d’un académicien.



Louise Colet a connu Alfred de Musset, Alphonse Daudet, Charles-Augustin Sainte-Beuve alias « Sainte Bave », elle a aimé François-Désiré Mancel, mais sa rupture brutale avec Flaubert en 1855 fait d’elle l’orageuse aigrie qui commet « Une histoire de soldat » puis « Lui » en 1858. Cette rupture, et ses besoins financiers l’éloignent de la poésie où elle excelle, et l’orientent vers la prose qui l’enterre dans l’oubli.



Jessica L. Nelson étaye son ouvrage, richement annoté, sur une impressionnante bibliographie, et il ne manque qu’une table des matières pour attribuer six étoiles à ce roman magnifiquement orchestré. La romancière maitrise parfaitement les techniques du feuilleton et ménage habilement ses effets pour réhabiliter une poétesse qui eut Paris à ses pieds de 1840 à 1855 mais qu’Emma Bovary fit chuter du piédestal en 1856. Son oubli me semble du à l’éclipse générale de la poésie et non au patriarcat ou au parisianisme et, par exemple, Victor Hugo brille aujourd’hui davantage avec Les Misérables qu’avec Les Contemplations.



« Je veux faire comprendre à toutes les femmes ce qu’il faut dire, ce qu’il faut faire, ce qu’il faut exiger » ambitionnait l’orageuse Louise Colet !

Merci Jessica L. Nelson pour ce mémorial.



PS : Lilas blancs et roses noires : Le roman de Marie de Régnier
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Tandis que je me dénude

Angie Rivière, prof de francais,vient de sortir un roman d'inspiration autobiographique. Pour sa promotion ,elle est invitée sur le plateau d'un talk-show en vue, face à un acteur vieillissant, un député "futé",...tous soucieux de "se vendre". Accordant une grande importance à son impact sur les autres,cette exposition est d'autant plus stressante et agonisante pour elle.

C'est un roman choral avec une construction intéressante et réussie.A chaque chapitre ,l'auteur donne la parole à un personnage ( L'acteur/le député/le chroniqueur....),avec toujours par la suite un retour sur le plateau télé, avec Angie ,la narratrice.Par ce procédé,on découvre peu à peu son histoire qui se recoupe avec les différents points de vues et pensées intimes des invités sur l'émission.

Ce livre est une critique acerbe,brillante,des médias,des réseaux sociaux et du culte de l'apparence .Vu le vaste sujet concerné,difficile d'en faire de la grande littérature,mais je dirais que Nelson l'a traité avec brio, une plume légère,avec une juste dose de lucidité et d'ironie et...même un zeste de suspens("l'incident").Le tout ,très réussi dans la forme.

Je conseillerais vivement cette agréable lecture de la rentrée littéraire 2015!
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Tandis que je me dénude

Angie Rivière, jeune prof de lettres parisienne, publie son premier roman traitant de l'adolescence. Invitée sur un plateau télé dans une émission de grande audience, elle se heurte violemment à ses émotions, à ses dilemmes et à son identité contrastée. Le lecteur découvre par ce récit non seulement l'univers du show-biz en passant "de l'autre côté de l'écran", mais aussi une personnalité complexe, torturée, en quête de confiance en soi et traînant derrière elle une belle batterie de casseroles.



Je découvre l'auteur à l'occasion de la rentrée littéraire et je reste très partagée à l'issue de ma lecture. Incontestablement il y a du bon dans ce roman mais assez éparpillé, en petites touches incisives et lumineuses. L'ensemble me semble très fouillis. Les narrateurs, trop nombreux, diluent la trame au lieu de la servir, on s'égare, on cherche à rassembler les pièces du puzzle, on tente d'échapper à l'ennui tapi en embuscade. Je n'ai toujours pas compris la valeur ajoutée de certains protagonistes... De ce fait, ma lecture a été assez saccadée et mon attention a été tour à tour scotchée ou en fuite.



Peut-être que le problème viendrait du "trop". Angie n'est déjà pas à la base un personnage très attachant ; trop secrète, trop compliquée, trop frustrée. Des parents bobo, une enfance à la fois commune et atypique, une adolescence confrontée à l'inceste, au viol collectif, au suicide, à l'anorexie et à la classique quête d'identité... ça commence à peser (trop) lourd pour être complètement crédible.



A contrario, j'ai apprécié l'analyse de l'auteur pleine de finesse et de psychologie sur l'enfance, les apparences, le virtuel, les liens familiaux, les rapports sociaux et le poids des actes. La plume est originale, pas trop maniérée, sincère. Une lecture en demi-teinte donc, qui aborde des sujets graves et qui, si elle s'achève sur une note optimiste, n'en demeure pas moins sombre et plombante.





Challenge PETITS PLAISIRS 2014 - 2015

Challenge ABC 2015 - 2016
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Brillant comme une larme

Séduisante immersion au coeur de l'élite artistique des années 20 et des différents courants émergents (dadaïstes, samedistes, groupe des six ), ayant pour figure centrale Raymond Radiguet, diable au corps, esprit aux aguets, âme tourmentée, qui a su très tôt se faire remarquer.

A quatorze ans, il fait ses premières armes (de séduction fatale) auprès d'une jeune femme mariée à un poilu mobilisé , histoire qui sera à la base de son premier roman et qui lui vaudra scandale et renommée.

Max Jacob se prendra d"amitié ( particulière) pour ce jeune provincial doué. Cocteau prendra la relève et introduira son jeune protégé dans la sphère des gens haut placés ( dont Grasset).

Raymond se noie dans l'alcool, s"époumone dans l'opium, s'enivre de senteurs féminines....vie d'excès qui finira sérieusement par l'éreinter, puis une fièvre typhoïde, trop tard diagnostiquée, qui l'emportera.

Un livre frémissant sur un auteur fauché en pleine jeunesse et en pleine gloire, (comme Alain-Fournier), mais qui a su accomplir son rêve entêtant de reconnaissance et de postérité.

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Brillant comme une larme



Jessica L. Nelson a l’art de nous intriguer par les titres de ses livres.

Le précédent : « Debout sur mes paupières » est une citation d’Eluard.

Cette fois « Brillant comme une larme » est une phrase empruntée à Cocteau.

« Le titre d’un roman est fondamental. Il est le pont établi avec le lecteur » !(1)



L’écrivaine ressuscite l’écrivain Radiguet ( 1903-1923), qui a eu un parcours de comète dans le milieu littéraire. La photo de la couverture le montre rayonnant entouré des habitués du Magic City.



Le prologue daté d’avril 1923 commence par une séance de spiritisme en compagnie de Jean et Valentine Hugo, de Georges Auric, du dandy de la capitale Jean Cocteau et de Raymond Radiguet, soucieux de savoir s’il va décrocher un prix pour « Le Diable ».



Jesssica L. Nelson concentre son récit sur Radiguet qui, lui, aimerait revenir à avril 1917, date de sa rencontre avec Alice, alors qu’il n’a que 14 ans.

Elle relate l’éducation sentimentale, le parcours initiatique fougueux du jeune Ray qui brûle de désir pour sa voisine institutrice qui l’a hypnotisé.

Pour la séduire, il s’est fait passer pour un jeune homme de 17 ans.

Idylle compliquée, chaotique, puisqu’Alice est fiancée à un poilu.

Après la rupture, « le casanova en culottes courtes » cumule les conquêtes et les nuits blanches. Se succèdent Irène, Béatrice, Mary, et Bronia , sa dernière fiancée qui ne supporte plus de le voir accaparé par la correction des épreuves du prochain roman.







En parallèle, l’auteure dresse le portrait du jeune prodige, « ce banlieusard » de Saint- Maur, désireux de ne pas rester « un grouillot de presse », et multipliant les contacts avec des gens influents afin de se faire publier ( Auric, Doucet).

Il étudie à la Colarossi, montre une érudition qui donne le tournis et lui permet de s’introduire dans le milieu parisien. Il est doté d’une intelligence hors du commun, a pour maître Apollinaire.

On assiste à la naissance de l’écrivain: parmi ses projets : «La règle du jeu », Denise, l’Âge ingrat ». Ce dernier inspiré par « le fantôme de sa vie d’avant ».

Il soumet des bribes de ses ébauches à Cocteau qui lui prodigue conseils et encouragements. Sa consécration sera d’être publié chez Grasset.

L’écrivaine développe une réflexion sur la création : « Le roman est un mensonge qui dit toujours la vérité », et « un écrivain ne se repose jamais ».





Quant à Picasso, il a du fil à retordre, face à ce « modèle agité, déroutant ». Il est fasciné par son « visage à la beauté égyptienne, aux lèvres charnues ». Il trouve « le roi de l’esquive » «  gonflé » de « se jouer des ardeurs des homosexuels  dont il s’est entouré ».





La biographe nous plonge dans l’atmosphère de l’époque, dépeint une fresque d’un « Paris assoiffé de divertissements », où l’on boit, danse, se déguise, s’amuse. On fréquente « Le bœuf sur le toit », les ateliers d’artistes.

Période où les intellectuels fréquentent les cafés littéraires, comme « la Closerie des Lilas », que l’écrivaine connaît bien pour faire partie du jury du Prix décerné par cette institution. Cocteau, lui, lance la mode «  des dîners du samedi » où se retrouvent artistes et écrivains. Paris n’est-il pas une fête ?



Radigo , «  Monsieur Bébé », a pris goût aux « pérégrinations des Samedistes », tantôt au cirque Medrano pour applaudir les clowns Fratellini, tantôt à la foire de Montmartre. Le talent est à toutes les portes.C’est dans une foule exubérante qu’il se glisse et slalome lors d’un bal organisé dans un château à Robinson, terreau pour son roman « Le bal du comte d’Orgel ».



La romancière évoque aussi la banlieue de l’ado de Saint- Maur qui a subi

la grande crue de 1910, traumatisant les habitants dont la mère de Radiguet. Paris avait les pieds dans l’eau, la Marne était sortie de son lit.



Si Paris est « une fête », Paris est aussi « un tombeau ». Moment plus tragique, le 27 janvier 1920, Modigliani est conduit à sa dernière demeure au Père -Lachaise, alors que sa compagne Jeanne Hébuterne attend un enfant.





Jessica L. Nelson décrypte la relation que « Radigo » entretient avec ses parents, des parents choqués par les rumeurs de sa liaison avec l’institutrice Alice. Que penser d’une jeune femme fiancée se permettant des écarts ?

Ils s’inquiètent de le voir s’émanciper à 16 ans, en s’installant dans un hôtel du centre de la capitale.

Puis, ils désapprouvent sa fréquentation de Cocteau, le mettent en garde contre le risque d’être entraîné dans la prostitution, subodorant qu’il est sa muse.

Pourtant Raymond va être entretenu par son mentor, acceptant des séjours sur la côte Méditerranéenne et dans le bassin d’Arcachon, lieux d’inspiration. Ils écriront même à quatre mains !



La romancière scrute l’attirance de l’un et la résistance de l’autre lorsque le maître et son protégé se retrouvent en tête à tête. Mais Cocteau « se montre d’une tendresse respectueuse et constante, toujours attentionné. Il en aimerait davantage mais ne demande rien ». Une complicité unique les lie. Il n’en sera que plus dévasté et taraudé de culpabilité lorsque Raymond est emporté par la typhoïde. Mais aurait-il pu éviter à Raymond de se détruire par tous les breuvages, cocktails , opium, consommés et de s’épuiser dans toutes ces soirées ?

En nous faisant entendre la voix d’outre- tombe de Raymond, que seul Cocteau perçoit, la biographe suscite une vive émotion.





Jessica L. Nelson restitue /retrace, avec beaucoup de passion, à la fois la vie sentimentale et intellectuelle de l’auteur du « Diable au corps », dans une écriture parfois fiévreuse, lascive et même érotique.

« Écrire n’est-il pas un acte d’amour » ?

Elle met en lumière avec intensité sa « vie de météorite » qui rêvait de postérité.

Une citation de Cocteau clôt cette biographie romancée, «pure merveille »(2) : « Le vrai tombeau des morts, c’est le coeur des vivants ».







NB :



Pour ceux qui ne connaissent pas l’écrivaine Jessica L. Nelson, elle est la cofondatrice des éditions des Saints Pères qui publie les fac-similés, copies parfaites des manuscrits des plus grands chefs -d’oeuvre. Ayez la curiosité de consulter leur site. Parmi les plus récentes publications, on trouve l’histoire originale de Peter Pan, des dessins de Cocteau.



Quant au libraire Gérard Collard qui a fait de ce magnifique roman son coup de coeur, il a un lien géographique avec Radiguet puisque « La Griffe noire » , implantée à Saint-Maur, est certainement hantée par le fantôme de l’étoile filante.



(1) : Citation de Jessica L. Nelson



(2) « Une pure merveille », expression de Gérard Collard dans une vidéo pour marquer son admiration pour ce roman.











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Tandis que je me dénude

Contrairement à ce que l'on pourrait penser au vu du titre, Tandis que je me dénude, le second roman de Jessica L Nelson n'est pas une confession d'une star du porno ou d'une prostituée.



La mise à nu n'est pas physique, mais bien morale : c'est celle qu'une jeune auteur , Angie, professeur de français qui a écrit son premier roman, va subir lors de la promotion de ce livre, pendant toute la durée d'un talk show où sont invités, en même temps qu'elle, un député aux dents longues et un acteur sur le déclin.



Visiblement largement inspirée par ce qu'elle a vécu lors de la sortie de son premier roman, Jessica L Nelson touche particulièrement juste dans sa peinture d'une jeune fille fragile confrontée au voyeurisme actuel de notre société, et à sa propre vulnérabilité face au regard des autres.



En effet, le livre s'appuie sur une construction du récit fort habile : on prend connaissance des pensées de l'auteur, mais aussi de ceux qui l'entourent pendant l'émission : les autres invités, le présentateur, la bimbo qui est au premier rang du public, et également ses proches qui la regardent derrière son petit écran et également.... la blogueuse littéraire obèse et très mal intentionnée (évidemment, vous vous doutez que ce portrait m'a particulièrement intéressé et que je l'ai trouvé un poil chargé)!



Grande habituée des médias ( elle a notamment été chroniqueuse pour l'émission de Michel Field, Vol de Nuit) Jessica L Nelson nous livre une peinture décapante et pertinente sur cette société sur médiatisée où promouvoir la culture n'a jamais été aussi difficile, voire inutile. ...suite de la chronique sur le blog
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Tandis que je me dénude

Un bon roman qui change (un peu) de mes lectures habituelles.

Le début a été difficile pour moi. J'ai même songé à abandonner, je m'ennuyais... Et puis finalement, je me suis accrochée ! Pourquoi ? J'en sais trop rien...Mais à un moment, le déclic est arrivé et j'ai apprécié ma lecture de plus en plus.

Ce qui me gênait au départ - l'immersion dans les pensées, la tête, la vie des différents protagonistes qui entourent Angie, le personnage principal de l'histoire - est devenu ce que j'attendais le plus.

En conclusion, une mise à nue touchante, des traumatismes dévoilés poignants, un roman intéressant.
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Brillant comme une larme

Elle avait dix ans de plus que lui, il était encore un adolescent et ils avaient Le diable au corps… Vous l’avez relu dix fois et vous en voulez encore ? Lisez ce prodigieux roman de Jessica Nelson et découvrez la véritable histoire de Raymond Radiguet.



À quatorze ans, il découvrait Alice, future Marthe Lacour, sur le quai d’une gare. À vingt ans, il mourait, adulé par la presse et reconnu par ses pairs. Entre temps : six années, une vie, une oeuvre. Pressentait-il la brièveté de son existence pour répondre aussi bien à l’urgence ?



Avant l’ambition, l’amour. Radiguet convoite une femme mariée dont le mari est au front. On est en 1917, la guerre n’est pas gagnée, l’argent manque, pourtant Raymond et Alice se retrouvent tous les soirs et s’aiment éperdument. Le jeune homme le sait : les plus belles histoires sont celles qui n’ont aucun avenir. 



Les habitants de Saint-Maur murmurent le scandale et au bout de quelques mois, intenable, assoiffé, le jeune Raymond quitte Alice et rejoint Paris pour proposer ses dessins, puis ses articles et des poésies.



Il sonne aux bonnes portes, côtoie les artistes les plus influents de l’après première guerre. 



Pourquoi s’économiser quand on a 17 ans et du génie ? Séducteur malgré sa myopie, amoureux des lettres, du whisky et des femmes, il ne vise qu’une chose : « la postérité », rien que ça. En Cocteau, il trouve un mentor. Jean aime éperdument le jeune homme qui en retour donne le minimum pour rester dans son giron protecteur. Cocteau le présente et le propulse. Raymond rencontre Picasso, Modigliani, Brancusi, et tellement d’autres. Aragon le jalouse, Breton le critique. De toutes ces soirées naîtra « Le bal du comte d’Orgel ». Cependant Raymond a une santé trop fragile et a besoin de calme pour écrire, alors Cocteau l’emmène dans le Sud et aide le jeune poète à se réaliser, loin du tumulte parisien et de ses démons…



Plongez dans l’effervescence créatrice de l’époque et découvrez un Raymond Radiguet bien plus sombre et féroce que le protagoniste romantique du « diable au corps » ne le laissait supposer. Totalement embarquée dans le destin fascinant du jeune prodige, j’en ai oublié l’écriture et le temps qui passait. Je vous recommande vivement ce roman parfaitement abouti, passionnant et inspirant. Merci Jessica Nelson pour ce livre qui manquait à la culture française !
Lien : https://agathethebook.com/20..
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L'Orageuse

Je connais un peu les écrits de Louise Colet et j'étais très curieuse de découvrir une biographie romancée sur elle. Je ressors un peu déçue de cette lecture que j'aurais pensé plus engagée. Pourtant, l'autrice l'écrit elle-même dans son épilogue : on a évoqué davantage sa relation avec Flaubert que ses écrits. Hormis à la toute fin, je n'ai pas eu la sensation de plonger dans les écrits de Louise Colet mais plutôt dans ses amours tumultueuses tout au long de sa vie. Je suis tout à fait d'accord sur le fait que la biographie est intrinsèquement liée aux écrits d'un auteur et ce surtout pour une femme à cette époque. Il m'a manqué un peu plus de matière littéraire.
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Brillant comme une larme

Échanges futiles entre les personnages je n’ai pas trouvé le fil qui habituellement me tire jusqu’à la fin d’un ouvrage. Désolée car il a fait presque l’unanimité mais bon il y a tellement d’ouvrages passionnants que je préfère vite passer à autre chose
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Brillant comme une larme

Raymond Radiguet remplit tous les stéréotypes artistiques du siècle dernier : alcoolique et drogué, coureur de jupons et séducteur invétéré, génie littéraire et victime précoce d’une maladie fatale. Que demander de mieux pour un personnage de roman ? Jessica L. Nelson l’a bien compris, ce type de personnages, aussi réels qu’ils paraissent impossibles, fascinent, et Raymond Radiguet est sans conteste de ceux-là. Sa vie commence vraiment lors de sa rencontre avec Alice, jeune femme séduisante promise à un soldat parti au front. Nous sommes en 1917, Raymond a 14 ans, et il s’en fout pas mal de la guerre – un sentiment qu’il ne se privera pas de retraduire dans Le Diable au corps, son scandaleux roman resté dans les annales.



Jessica L. Nelson nous relate les six années de vie qui ont fait de Raymond Radiguet une figure de la littérature française – alors même qu’il est mort à seulement 20 ans de la fièvre typhoïde. En six ans, Radiguet découvre l’amour, l’adultère, les obligations familiales, le succès, l’amitié, la paternité, la débauche – il faut dire que l’après-guerre a poussé plus d’un homme hors de son berceau. L’auteure parvient, avec un style littéraire mais jamais trop ampoulé, à décrire magnifiquement les personnages complexes qui peuplent ces années folles, ces artistes engagés dans une quête sans fin de plaisirs faciles et de postérité. On y croise Cocteau, Brancusi, Auric, Modigliani, Aragon, Breton mais aussi Bernard Grasset, fondateur des éditions du même nom ! C’est un délice de découvrir Raymond Radiguet, ce personnage tout en controverses, solitaire à la recherche de l’enivrement des sens, jeune déjà vieux qui collectionne les maîtresses et le coeur des hommes.



Brillant comme une larme est une plongée délicieuse dans le Paris littéraire de l’entre-deux-guerres, vu par les yeux d’un génie hors du commun.
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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Tandis que je me dénude

Angelica Rivière est professeur de français dans un lycée parisien. Elle vient de publier son premier roman dans une maison d'édition importante. A son retour de vacances, elle est contactée pour participer à une émission phare, un talk-show, occasion unique pour elle, auteur inconnu, de présenter son livre.



C'est la peur au ventre qu'Angelica se présente à cette émission en direct donc sans filet. Elle est mal à l'aise car très vite elle se rend compte qu'elle n'est pas là pour parler de son livre, ou si peu. L'animateur et le chroniqueur orientent les questions pour faire de l'audience, le moins que l'on puisse est qu'ils ne sont pas bienveillants.



La suite de ma chronique sur mon blog, cliquez sur le lien ci-dessous.
Lien : http://leslecturesduhibou.bl..
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L'Orageuse

Louise Révoil aurait dû avoir une vie classique pour une femme de son époque, à savoir le XIXème siècle. Se marier, avoir des enfants, faire le bonheur de son époux et surtout rester à sa place. On ne lui en demandait pas plus. Mais c’était sans compter l’esprit frondeur de la jeune femme. Elle saisit l’occasion de se marier avec Hippolyte Colet pour “monter” à Paris et fuir l’ambiance contrainte de la maison familiale où ses frères et sœurs se déchirent autour de l’héritage parental. Car Louise a des ambitions : devenir écrivain, faire carrière, être connue et reconnue, rencontrer les auteurs qu’elle admire et se faire une place au milieu d’eux. Et elle a les moyens de ses ambitions. Intelligente, talentueuse et belle, il n’en faudra pas plus pour faire tourner quelques têtes et la propulser au sommet malgré les embûches qu’elle rencontre.



Jessica L. Nelson avait pour ambition avec ce livre de faire découvrir Louise Colet et de donner envie de lire ses écrits et on peut dire que l’objectif est atteint. La biographe nous dresse ici le portrait d’une femme forte et libre, faisant fi des convenances et à l’écoute de ses envies aussi bien littéraires que physiques !



La Muse, comme elle est surnommée, a en effet bien des atouts pour séduire Paris et bénéficier des soutiens de ses pairs : Victor Cousin, Victor Hugo, Musset, Vigny mais aussi Juliette Récamier ou Delphine de Girardin, ils sont nombreux à l’admirer et à tomber dans ses filets amoureux ou amicaux.



De ses passions de femme – notamment une liaison tempétueuse avec Flaubert - à ses engagements littéraires et politiques, nous apprenons à connaître une femme sûre d’elle et de ses compétences refusant, comme certaines de ses consœurs (George Sand ou George Eliot) de signer ses écrits d’un prénom masculin pour être acceptée, revendiquant haut et fort sa féminité et en cela, faisant preuve d’une grande modernité et d’une belle indépendance d’esprit.



Malgré tout, le nom de Louise Colet n’a pas traversé les siècles contrairement à ses collègues masculins cités plus haut et ses écrits semblent bien oubliés contrairement à ceux de Flaubert ou d’Hugo qui la considéraient pourtant comme une égale. La voici donc réhabilitée ici avec cette biographie romancée qui rend intelligemment justice au dynamisme et à la modernité de cette écrivaine et poétesse.

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Mesdames, souriez

Louisa-Marie, jeune fille de 20 ans vient faire ses études à Paris. La jeune demoiselle possède un bel appartement de 80 m2 donnant sur la place des Vosges. Le seul souci c'est que ce lieu est pour l'instant habité par l'usufruitière, une charmante vieille dame aux allures de Tatie Danielle.



Alors que la canicule gagne la capitale, la cohabitation va vite tourner à l'orage voire à la guerre. Conflit de générations, effet de miroir un peu effrayant... le tout fait de l'existence de la jeune femme un enfer !!!



Mon avis:



Est-ce parce que je n'avais pas la tête à la lecture ou est-ce la qualité de ce roman, mais je n'ai pas beaucoup aimé cette lecture.



Pourtant, il y a des bons passages sur la solitude, sur la vieillesse, sur l'égoïsme... L'auteur touche là où ça fait mal et avec une certaine justesse.



J'ai trouvé très habile de mettre la canicule en toile de fond de ce conflit générationnel.



Voilà un roman tout en ironie avec des pointes de tendresse.



Mes reproches concernent plutôt le manque de fluidité de l'ensemble. Il me semble que c'est le premier roman de cette auteure, il y a quand même de quoi être optimiste pour la suite ...
Lien : http://www.livr-esse.com/art..
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Brillant comme une larme

Je vous conseille cette biographie romancée de Raymond Radiguet. Cet écrivain talentueux fut une météorite dans le paysage littéraire français de l'après-guerre.

L'auteur nous plonge dans ce bouillonnant milieu intellectuel et artistique post première guerre mondiale.

Raymond Radiguet, mort à 20 ans, fut un écrivain plein de vie et bourré de talent. Acharné à réussir il sut séduire ses protecteurs tels que Max Jacob et Jean Cocteau.

Un ouvrage très agréable à lire où vous ferez de nombreuses rencontres.
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Brillant comme une larme

Ce livre est une belle surprise. Une biographie romancée de l'ecrivain Raymond Radiguet. C'est un écrivain que je n'ai jamais lu et que je ne connais pas bien. C'est donc avec grand plaisir que j'ai découvert la vie de ce jeune génie.



La vie de cet écrivain se prête parfaitement à un roman et il faut avouer que ce livre est maîtrisé de bout en bout par Jessica Nelson. Le style est agréable à suivre, c'est bien rythmé, parfaitement documenté et c'est une bonne première approche / découverte de cet écrivain qui est proposé là. On y croise bien sur aussi les personnages célèbres qui ont accompagné l'ecrivain pendant sa courte vie (Jean Cocteau, Picasso, Modigliani, Jean Hugo...).



Au-delà de la vie de l'ecrivain, ce livre est aussi une plongée dans la société française pendant les années qui verront la fin du premier conflit mondial et la période d'après-guerre.



Un roman très intéressant donc, bien écrit. On en apprend pas mal sur ce jeune prodige de la littérature et sur les différentes phases de sa vie. Cela donne envie de se (re)plonger dans l'œuvre de Raymond Radiguet avec ces éclairages en tête. Une surprise que je recommande sans hesiter.
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Brillant comme une larme

Jessica Louise Nelson est une romancière et éditrice française. Elle a été conseillère littéraire pour différentes émissions télévisuelles. Elle est également cofondatrice du Prix de la Closerie des Lilas et des éditions des Saints Pères. Brillant comme une larme est son quatrième roman, publié chez Albin Michel.



Paris, 1917. Un tout jeune garçon se presse pour rejoindre sa maîtresse, de dix ans son aînée. Il veut aller vite, trop vite. Il ne sait pas encore qu’il porte en lui le génie de la littérature et que son parcours de comète se mêlera aux destinées de Coco Chanel, Max Jacob, Picasso, Breton et Aragon, et surtout à celle de Jean Cocteau… Mais il est persuadé qu’il a de grandes choses à accomplir et peu de temps pour y parvenir. Raymond Radiguet, futur auteur du Diable au corps, va tutoyer les étoiles et s’y brûler.



Avec Brillant comme une larme Jessica Louise Nelson fait revivre une époque culturelle et intellectuelle, celle de l’immédiat après-guerre de 1914-1918. Elle dresse le portrait tout en finesse de Raymond Radiguet, ce jeune auteur originaire de Saint-Maur qui a Le diable au corps.



Précoce, Radiguet sort tout juste de l'enfance lorsqu'il séduit Alice son institutrice de dix ans son aînée et mariée. Sentant le vent du scandale souffler, ce séducteur prépubère fuira sa banlieue pour errer dans la capitale à la recherche du journal qui publiera ses dessins ou articles. Assoiffé de reconnaissance, ce jeune prodige n'a plus qu’une obsession, marquer à jamais son époque, être connu. Audacieux, éminemment intelligent, il est prêt à tout pour parvenir à ses fins. Dès lors, il va muer en oiseau de nuit, fréquenter tous les lieux à la mode, côtoyer les artistes les plus influents tels que Coco Chanel, Modigliani, Max Jacob, Picasso, Breton, Aragon et surtout Jean Cocteau. Impressionné par le jeune impétueux et épris de lui, ce dernier le prendra sous son aile. Il permettra à Raymond Radiguet à la santé délicate et de plus en plus dégradée du fait de ses excès à répétition d'achever l'écriture de son roman qui lui ouvrira les portes de la postérité. Le nom de Raymond Radiguet est à jamais associé à ceux des grands auteurs français, grâce à son célèbre roman Le diable au corps. Il a été emporté par une fièvre typhoïde alors qu'il n'avait pas vingt ans.



Brillant comme une larme restitue l'ambiance de ces années folles et Jessica Louise Nelson rend hommage à la détermination d'un auteur qui voulait tutoyer les étoiles.
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Brillant comme une larme

Je termine avec délectation cette biographie romancée à la plume élégante et évocatrice après avoir relu Le Diable au corps, que j'ai trouvé d'une puissance troublante, alors même que le narrateur m'était antipathique et le style dépouillé. Qu'il s'exprime avec autant de recul à même pas 20 ans est impressionnant : "Ces escarmouches peinaient Marthe ; assez intelligente et assez amoureuse pour se rendre compte que le bonheur ne réside pas dans la considération des voisins, elle était comme ses poètes qui savent que la vraie poésie est chose "maudite", mais qui, malgré leur certitude, souffrent parfois de ne pas obtenir les suffrages qu'ils méprisent."

Pendant la 1re partie de Brillant comme une larme, j'avais l'impression de relire une 2e fois le chef-d'oeuvre de Radiguet, puisqu'il s'est inspiré de sa liaison aussi brève qu'intense avec Alice pour dépeindre celle que le narrateur du roman entretient avec une certaine Marthe, institutrice et peintre amateur. Beau parleur et manipulateur, "Ray" n'aime rien tant que ce qui lui résiste ; sûr de son talent et très audacieux pour son jeune âge, il ne craint pas de se réclamer d'Apollinaire, quitte à passer pour pédant...Il sait s'entourer de personnes influentes et frapper aux bonnes portes, jouer de son orientation sexuelle. S'il agace les surréalistes Breton et Aragon, il subjugue Picasso et Cocteau, secrètement amoureux, qui le prendra sous son aile, l'emmenant dans le Sud pour l'éloigner des plaisirs nocifs de la capitale et le forcer à travailler.

A travers la restitution de ce Paris des Années folles où les artistes décadents se tirent la bourre entre Montparnasse et Montmartre, l'on assiste à la trajectoire d'un génie fauché en pleine gloire, qui court de jupon en pige, de bal parisien en guinguette sur la Marne, faisant tourner les cœurs et les têtes à un rythme dont il sera le premier à souffrir, puisqu'il se tuera à la correction de son 2e roman, Le Bal du conte d'Orgel, alors que sa santé décline déjà.
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Tandis que je me dénude

Je l'ai abandonné après une soixantaine de pages...



Je l'avais acheté en écoutant l'auteure en parler dans une émission de PPDA car le titre ne correspond pas du tout au thème.

Si, au second degré bien sûr et on peut tout à fait imaginer les journalistes fouiller au plus profond de votre vie pour démasquer le scoop, la révélation sensationnelle.



Mais bon je n'accrochais pas et quand on reprend sa lecture comme un fardeau et non comme un pépite, ça m'éluge, Na !
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Debout sur mes paupières

Jessica L. Nelson Debout sur mes paupières Belfond

( 18€ - 298 pages)



Avant d 'attaquer la lecture, commencez par détacher le marque -page offert.

Merci au concepteur pour cette idée géniale. La couverture convoque par la beauté sidérante de l'icône. Ne dévoilons pas son identité, mais vous l'avez reconnue !

Le titre peut interpeller, il est emprunté au poème d' Éluard que Jessica L.Nelson met en exergue. L'auteure frappe fort en nous offrant 2 fins.

La «  FIN », qui ouvre le roman, insère un fait divers (notez la date : 22/01/17 ! ) relatif à la «  Belle au banc dormant ».Et on a «  faim » de la suite, pressés d'arriver à «  la vraie fin. »



Si un livre peut changer une vie, ici c'est une photographie de Man Ray qui déclencha la vocation de l'héroïne pour la sculpture, ainsi que le film culte de Cocteau : «  Le sang d'un poète » dans lequel une statue «  de chair et non de marbre » s'anime.



Jessica L.Nelson déroule le parcours de son héroïne Elisabeth M., sa famille, sa reconversion de danseuse en sculptrice. Elle remonte son passé jusqu'à son mariage et son installation à Paris. Dans «  sa nacelle de femme mariée » elle se sent muselée. Son mari devient «  mortellement ennuyeux », leur fils Ulysse est confié à Célestine.



L'écrivaine nous implique, nous apostrophe par des injonctions : «  Observons », «  gentil lecteur » ou par cette proximité : «  notre brunette », « notre héroïne ».



Elle entrecoupe son récit «  in progress » par des échanges avec son éditrice, Céline, laissant transparaître ses doutes, ses dilemmes, ses tâtonnements.

Certaines auteures se plaisent à dire lors d'une nouvelle publication, qu'ils viennent d'accoucher , montrant ainsi le labeur que ce livre a demandé.

C'est ainsi que Jessica L. Nelson met en parallèle la genèse d'une oeuvre artistique, l 'écriture d'un livre et la gestation d'un enfant, montrant ce que «  produire » signifie.



On devine la volonté de la narratrice de réhabiliter Lee Miller, cette «  icône libre », «  cette créature fantasque et surprenante », qui la fascine, «  hante ses nuits » et devient un modèle pour Elisabeth. Tant de points communs entre elles deux (pères tyranniques, quête de beauté, ennui chronique), mais aussi avec Jessica L. Nelson.



Tout en se livrant à des digressions, elle glisse un indice rappelant que son but est de montrer la descente , la «  lente dégringolade » de cette «  femme.. » vers la folie.



Les pages insérées du journal d'Elisabeth de 2007 laissent transpirer les angoisses d 'être mère, l'appréhension face à de telles responsabilités. La voici taraudée à l'idée de sacrifier sa vocation de sculptrice, la préparation de son expo. Elle confie à son journal sa première liaison à quinze ans, puis laisse échapper sa vision du couple sans enfant, rappelant ces militantes du «  No kidding », qui veulent s'épanouir.

C'est en présence d'une amie qu'elle fait le test de grossesse et qu'elle cède aussitôt à la panique.Comment l'annoncer à cet «  ange » de mari, juste au moment où il a prévu d'investir dans un appartement, au moment où une promotion lui offre un poste à New York. La narratrice restitue les réactions opposées du couple.

Pour Elisabeth, c'est un tel tsunami intérieur qu'elle s'adresse à son «  vermisseau »!Propos touchants, attendrissants de la future mère, contradictoires par ailleurs.

Par moult détails, l'auteure insiste sur les traumatismes que certaines femmes peuvent subir durant leur grossesse et à l'accouchement. Avec empathie, elle nous plonge dans la détresse de l'héroïne qui distille son ultime dialogue avec sa «  princesse ».

Vibrante cette litanie de «  Je me souviens » et cette conclusion : «  Je suis l'assassin de ma création ». Car comment surmonter une telle épreuve ?



Le rapport au corps : «  cette jolie machine à huiler et entretenir » est une thématique obsédante, peut-on subodorer, pour la narratrice. N'a-t-elle pas écrit sur l'anorexie ?





Jessica L. Nelson soulève le problème pour une femme de concilier le rôle de mère, d'épouse et d'artiste, s'interroge sur le temps consacré à ses proches. Que penser de cet éloignement d'Elisabeth, phagocytée par son modèle ? N'est-elle pas égoïste à priver son fils, Ulysse, de son amour ? Or «  nous courons tous après l'amour ».

Elle est devenue «  une biche cabrée » toujours en fuite, au grand dam du mari.



Quant à l'exposition elle guette le regard des autres sur son travail. Thème déjà abordé dans « Tandis que je me dénude ». Elle montre que toute création est un véritable combat. Que ce soit avec les mots ou la glaise, la pierre, le créateur tâtonne, puis dompte sa matière, la pétrit ou la façonne, la cisèle, la modèle. Pour cette « work-addict » son atelier lumineux, «  son cocon » devient son « home » quotidien.



La narratrice rend hommage à toutes ces artistes féminines qui se sont imposées, notant qu'elles sont sans enfant : Virginia Woolf, Frida Kahlo, Karen Blixen, Jane Austen. Veut-elle sous- entendre que la création exige la solitude , l'isolement et que l'enfantement d'une oeuvre n'est pas sans douleur, même pour un écrivain ? Ne faut-il pas de l'opiniâtreté, de l'obstination pour réussir, se surpasser ?



Bientôt les trois figures féminines vont se superposer,une vraie osmose, au point de les confondre comme la narratrice elle-même : « Je suis l'Auteur, je suis Elisabeth, je suis Lee, qui suis-je ? ». Force est de constater qu' « un artiste se fait dévorer par sa création, son sujet ! Pour créer il faut se confondre ». Écrire emprunte à l'amour ce qu'il a de plus intense. Écrire, c'est faire acte de chair. On songe à Camille Claudel, même énergie créative, même fougue, même furie destructrice glissant vers la folie.

Jessica L.Nelson s'interroge sur le génie et la pérennité de l'artiste. Ne faut-il pas créer à tout prix, laisser des traces ? Ne serait-ce que pour entrer dans le who'swho ?



L'épilogue, qui a pour cadre la Closerie des Lilas, est une pirouette déstabilisante,

car deux victimes devisent. Elisabeth, l'héroïne, qui s'estime trahie, exige des démentis auprès de l' éditrice.Celle -ci concède ne pas avoir été assez vigilante, mais son écrivaine revendique sa liberté de choisir le destin de ses protagonistes et rappelle que «  les auteurs sont des vampires qui aspirent l'intimité de ceux qui les entourent » et courent «  après l'amour du public ». Des mystères s'expliquent .

Insolite cette présence du chat noir «  et un peu blanc » ! Finies les interrogations sur « les deux touffes de poil qui avaient viré au blanc » ! Ce n'était pas le stress, ni un virus qui avait «  grisaillé » le pelage de son « fidèle compagnon » et confident.



Jessica L Nelson signe un roman, hypnotique,complexe, dense, troublant, dans lequel elle décortique l'emprise progressive, de plus en plus dévorante de Lee sur l'héroïne et sur la narratrice. Une obsession insidieuse, telle une «  maîtresse possessive ».

Quand il quitte ce trio féminin, le lecteur est subjugué, sous le charme !



NB : Que Cocteau soit omniprésent dans ce roman est nullement étonnant, puisque Jessica L Nelson, cofondatrice des éditions des Saints Pères, a publié Le mystère de Jean l'oiseleur.
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