Extrait du livre audio « La Ballerine de l'ombre - le Château des secrets, tome 2 » de Marie-Bernadette Dupuy lu par Morgane Hainaux. Parution numérique le 22 mai 2024.
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Oui, il doit exister entre l'amour et l'amitié un sentiment infiniment précieux et délicat qui s'appelle la tendresse.
Aristide Dubreuil contenait son impatience. Mettre la main sur Jean Dumont lui vaudrait de la considération. Un déjeuner interminable et des discussions ennuyeuses lui feraient perdre un temps précieux...Il traversa la place à longues enjambées, les pans de son manteau noir battant au vent.
Ce qui me glace, c'est d'imaginer l'homme que j'aime dans les bras de celle qui a tué toutes ces personnes dont deux enfants, sans pitié, sans raison. J'ai l'impression qu'il m'a trahie doublement...J'aurais préféré qu'il soit amoureux d'une fille bien, pleine de qualités. Pas de cette femme qui est une pauvre psychopathe.
Parvenue dans l'enceinte du parc, elle enferma Riton dans le pavillon et, sans même changer de robe comme elle l'avait prévu, elle enfourcha sa bicyclette et dévala la route en direction du château des Régnier et de la métairie. Lorsqu'elle franchit le porche, une peur viscérale la submergea à la seule perspective d'être confrontée à son père. " Je suis sotte, il ne me fera rien, je ne dépends plus de lui ni de son autorité. En épousant Justin, je suis devenue majeure et libre " se dit-elle.
- Vous pouvez disposer, Angélina.
Encore une chose, j'ai la fâcheuse tendance à être plus sévère avec celles chez qui je sens d'excellentes capacités.
- J'ai compris, madame Bertin !
- Il y a fort à parier que vous suivrez les traces de votre mère.
Ces paroles ravirent Angélina. Elle se promit de ne pas décevoir la sage-femme en chef, en hommage à Adrienne Loubet, sa chère maman disparue.
Le vieil indien écoutait tendu à l'extrême. Des larmes coulaient sur ses joues. Toshan comprit ce que pouvait ressentir son aïeul. D'entendre la langue montagnaise portée par une voix aussi pure, avait la valeur d'un hommage, rendu à toutes les nations indiennes du Canada, dispersées et humiliées au nom de la colonisation et du modernisme, au nom du besoin virulent des hommes blancs de déboiser, de construire et de freiner le cours des rivières, quand ce n'était pas au nom de la volonté de faire oublier aux prétendus petits Sauvages leur langue natale, justement, dans les pensionnats de la honte.
Quand j'ai du chagrin, Viviane, je me durcis pour ne pas sombrer dans la mélancolie. Après cet aveu, Olympe se dirigea vers une des fenêtres et observa d'un œil humide les rideaux de pluie qui tombaient du ciel.
L'alezan prit le trot immédiatement en s'ébrouant. De son siège, la jeune fille jeta un coup d'œil vers les arbres du parc. Elle aperçut une bête noire, tapie parmi les fougères, et une silhouette masculine en partie cachée derrière le tronc d'un chêne.
" Maubert Guérin nous épiait, il était là avec son chien, se dit-elle. Mais pourquoi ?"
- Bonjour, mademoiselle Millet, dit-elle enfin après avoir attrapé un bol dans le vaisselier. On est matinale.
- Matinale et pareille à la brebis égarée, ajouta le prêtre avec douceur. Que vous est-il arrivé, Isaure ? Peut-être voulez-vous être entendue sous le sceau de la confession?
- Non, ce n'est pas la peine. Je n'ai rien fait de mal. Hier soir, mon père avait bu. Il m'a frappée et chassée de la métairie. Jamais il n'avait été aussi violent, jamais...
- C'est la grippe espagnole. Il y a eu plusieurs cas à Québec et à Montréal. Nos soldats ont ramené la maladie d'Europe. Là-bas, on parle de milliers de morts déjà.
Une angoisse sourde brisa l'euphorie de Joseph.
- Crois-tu que cette saleté peut se répandre jusque chez nous ?