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3.82/5 (sur 33 notes)

Nationalité : Pologne
Né(e) à : Gdańsk , le 08/03/1975
Biographie :

Martyna Bunda est une journaliste et écrivaine polonaise.
Elle a grandi dans la région polonaise de Cachoubie ; elle a étudié les sciences politiques et a travaillé dès l'âge de 18 ans comme journaliste de presse écrite. De 2012 à 2018, elle a dirigé les pages d'actualités nationales d'un grand hebdomadaire polonais (Polityka).
Elle vit aujourd'hui à Varsovie.

Source : Wikipedia
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Bibliographie de Martyna Bunda   (1)Voir plus

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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
"Staline est mort!" La radio ne diffusait plus que de la musique funèbre, les magasins étaient fermés, les drapeaux avaient été mis en berne dans toutes les administrations. Les gens ne parlaient plus de rien d'autre. Tout haut, disant que c'était le père de la nation, tout bas, un assassin et un voyou, et qu'enfin peut-être il y aurait un peu de liberté.
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Le village ne se mêlait pas de leur vie d'ermite et, pour leur part, elles évitaient les voisins. Quitte à manger un jour de plus de la soupe d'orties séchées pendant la période de soudure, quitte à se passer de pain de longues semaines, de longs mois. Otylia ne se serait jamais abaissée à quémander. Une jeune fille avec une enfant. Mère d'une petite bâtarde. Non, en aucun cas elle n'aurait donné aux gens un motif de de sentir mieux à ses dépens.
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En de rares occasions, elle éprouvait comme un regain de forces. Elle revenait à elle, pour un instant. Elle se remettait alors à distribuer des tâches à chacun. Les carottes devaient être découpées selon un modèle précis, ce que Rozela vérifiait ensuite elle-même ; les casseroles, dans la cuisine, devaient être rangées selon un ordre déterminé. Rozela avait une liste de choses à régler avant sa mort. Et en première place, sur cette fameuse liste, figurait l’achat de sa tenue pour le cercueil. Et, justement, au cours d’une de ces journées où elle sentait revenir un afflux de forces, elle informa Truda d’un ton catégorique qu’elle souhaitait un corsage blanc, une jupe noire et des chaussures noires – maintenant ! Sa fille était ennuyée : où donc pouvait-elle trouver ça ? Les magasins étaient vides, on allait faire ses courses comme on allait à la chasse. Dès que tombait la nouvelle d’une livraison dans un magasin, de longues queues se formaient aussitôt et on prenait ce qui se présentait ; et d’ailleurs, il n’y en avait jamais assez pour tout le monde. Rozela lui demanda d’informer Ilda. Ce que fit Truda, enfourchant à contrecœur le vélo pour se rendre à la poste de Kartuzy et téléphoner à Sopot. Deux jours plus tard, Ilda pointait de nouveau son nez à la Colline. La benjamine des sœurs voulait conduire sa mère chez la couturière. Elle n’allait se déshabiller devant personne, protesta vivement Rozela. À la fin, Gerta proposa d’aller jusqu’à Gdańsk en passant par Kartuzy et Kościerzyna, peut-être qu’elles réussiraient à trouver quelque chose quelque part. Une telle perspective ne réjouit guère Rozela. Elles partirent cependant. La tenue pour le cercueil, c’était le plus important après tout. À Kartuzy, elles ne trouvèrent rien du tout. À Kościerzyna, on vendait des corsages infroissables, mais, de ceux-là, Rozela ne voulait pas : c’était une calamité pire encore que le polymère, le plastique dont étaient faites les fleurs de l’enterrement d’Abram. Elles finirent par dénicher une blouse et une jupe à Gdańsk, dans une espèce de dépôt-vente que les marins fournissaient en vêtements venus de l’Ouest. Pour les chaussures, ce fut une autre paire de manches. L’État populaire prévoyait, pour les défunts dans leur cercueil, des chaussures en carton dont ne voulait absolument pas Rozela. Enfin, dans un quartier portuaire de Gdynia, elles trouvèrent des souliers en cuir noir. Bien que morte de fatigue, tout endolorie après une nouvelle expédition de plusieurs heures en voiture, Rozela était contente. Depuis ce jour-là, tous les vendredis, elle commençait sa journée par le repassage de ses habits mortuaires, elle les aspergeait aussi d’eau d’ortie contre les mites. De temps en temps, le jeudi soir, les filles de Gerta, de plus en plus grandes, mais toutes sosottes encore, des gamines, quoi ! sortaient les habits de Rozela de l’armoire et allaient les cacher dans le jardin, ou au grenier, et elles étaient aux anges lorsque leur grand-mère, paniquée après avoir ouvert l’armoire, poussait des cris et, impuissante, courait à travers toute la maison en pleurant qu’elle n’avait rien à se mettre pour mourir. Rozela avait déjà oublié que ses petites-filles s’amusaient toujours à faire disparaître sa blouse et sa jupe.
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Mais, c’était un travail de moine véritablement. Un tissu fin, des fils, des aiguilles de trois tailles différentes, un dé à coudre, une enveloppe contenant des lames de rasoir. Et avant cela, il fallait : transposer soigneusement le modèle sur du papier buvard, le redessiner à l’infini, de manière à obtenir une symétrie parfaite entre les pétales et les feuilles. Et, plus tôt encore, dénicher les tissus. Combien d’ingéniosité et de ruse nécessitait l’acquisition du tissu.
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Rozela avait une liste de choses à régler avant sa mort. Et en première place, sur cette fameuse liste, figurait l'achat de sa tenue pour le cercueil. Et, justement, au cours d'une de ces journées où elle sentait revenir un afflux de forces, elle informa Truda d'un ton catégorique qu'elle souhaitait un corsage blanc, une jupe noire et des chaussures noires
- maintenant ! Sa fille était ennuyée : les magasins étaient vides, on allait faire ses courses comme on va à la chasse. Dès que la nouvelle tombait d'une livraison dans un magasin, de longues queues se formaient aussitôt et on prenait ce qui se prés entait et d'ailleurs, il n'y en avait jamais assez pour tout le monde.
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Elle le pria de lui raconter d’où il venait. L’histoire qu’elle entendit fut celle d’une femme que l’on avait poussée d’un train pour Varsovie, au cours de la première guerre, par temps de grande famine, après lui avoir volé le pain qu’elle s’était procuré à la campagne. Rassemblant ses dernières forces, la femme avait marché jusqu’à la forêt, sans savoir où elle se trouvait, ni où elle allait. Dans cette forêt, au beau milieu d’un chemin, elle était tombée sur un nouveau-né. On avait fini par les trouver tous les deux, car l’enfant pleurait très fort. Elle avait donc survécu grâce aux cris du bébé, et lui, parce que la femme le réchauffait contre son corps. Et lorsqu’ils eurent enfin repris des forces, dans un village des environs de Radom, il se révéla que la maison de la femme avait été détruite, et ses enfants tués. Et ainsi ils restèrent ensemble, tous les deux. Lui, sans jamais connaître sa mère biologique, et elle, pour qui il remplaça ses enfants.
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Lorsque la petite eut fêté ses six mois, Gerta revint pour de bon avec l’enfant dans son appartement de Kartuzy. En sortant le landau dans la cour pavée, elle se demandait souvent pourquoi ce n’était pas elle qui habitait l’un de ces étages lumineux, dans un trois, voire quatre-pièces avec balcon. Et elle n’y voyait toujours qu’une seule raison : il s’agissait d’un châtiment. Peut-être pour cette grand-mère qui s’était présentée enceinte devant l’autel ? Ou bien pour un péché plus ancien encore, inconnu de Gerta ? Eh bien, soit ! Ce châtiment, il fallait qu’elle l’accepte pour elle, afin de ne pas le laisser en héritage à sa fille.
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Oubliée, la mort de Staline ! Les gens, dorénavant, parlaient de Gomuɫka. Qu’importe qu’il soit du parti ou pas, pourvu qu’enfin il y ait quelque changement. Gerta avait elle aussi ses espérances : dans leur immeuble de Kartuzy, pour la première fois depuis des années, un deux-pièces clair et spacieux devait se libérer. Gerta espérait beaucoup se le voir attribuer. Depuis des mois elle faisait le tour des administrations à cet effet. Toujours, elle se voyait opposer un refus ; l’une des femmes du bureau des demandes finit par l’informer aimablement qu’il s’agissait de Jan le Gitan. Après avoir finalement donné son pot-de-vin à qui de droit, ajoutant à l’argent de la vente des serviettes un siège de toilette obtenu par miracle à Gdańsk, Gerta n’avait plus qu’à attendre que le logement se libère. Ce qui arriva presque aussitôt après la naissance de sa fille. Edward avait juste à déposer la demande. Mais lui, il alla remettre le document à un autre fonctionnaire, pas le bon. Le courrier suivit un circuit imprévu, quelqu’un s’en était mêlé qui se souvenait de qui Gerta était la belle-sœur ; l’attribution prévue tomba à l’eau. Son mari considérait qu’il n’était en rien fautif. Par ailleurs, disait-il, pourchasser des fonctionnaires comme des perdrix était en dessous de sa dignité.
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Truda était plus indulgente envers Józek qu’envers son propre fils. Néanmoins, lorsqu’elle les surprit à fumer à deux une cigarette, de celles que lui envoyait Jakob pour qu’elle puisse les revendre à bon prix, même lui n’y coupa pas. Elle les poussa vivement tous les deux jusqu’à la cuisine des cochons, leur donna un paquet à chacun en leur ordonnant de fumer cigarette sur cigarette jusqu’à la dernière. Ils en fumaient une, verdissaient, vomissaient, allumaient la suivante. Jan-Flamme resta couché deux jours après ça, à vomir encore dans une bassine. Aux yeux de Truda, ce n’était que justice : à coup sûr, c’était lui qui avait entraîné son frère à fumer. Elle l’avait fait pour leur bien. Ils ne toucheraient jamais plus à une cigarette. Elle se montrait toujours sévère envers son propre fils, même lorsqu’il se faisait mal. Elle allait parfois vérifier si les garçons étaient déjà endormis, mais jamais elle n’était prise de tendresse envers le petit Jan. Pas même quand il dormait.
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Chaussures contre chaussures, épaules contre épaules, les sœurs marchaient d’un même pas.
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