Le tribunal de l'ombre

Le tribunal de l'ombre n'est rien moins que le septième thriller que je lis de Serge Boudoux.
Le sujet principal de ce dernier est contenu dans cette phrase : « On ne combat pas le terrorisme aveugle avec le seul arsenal des lois ordinaires. »
Il s'agit d'un thriller d'anticipation. La première partie se déroule à Nice, promenade des Anglais le 15 novembre 2025, avec l'exécution d'une sentence prononcée par ce fameux tribunal de l'ombre, thème central du roman. Pour saisir ce qui s'est passé, un retour en arrière est nécessaire et le lecteur se retrouve alors le 10 août 2024. Les J.O vivent leurs dernières heures. Dans sa demeure de Montauroux, le déjà bien connu écrivain Serge, est en train d'apprécier la pluie qui s'est enfin décidée à tomber sur ce superbe pays de Fayence. Il est alors appelé sur son téléphone par son ami Régis, avec qui il a par ailleurs écrit son dernier livre de l'autre côté du tunnel. Celui-ci lui enjoint d'allumer la télé. Des évènements atroces viennent de se produire. le lendemain, ils vont être suivis par l'assassinat du Président de la République venu se recueillir sur les lieux du carnage.
Le samedi suivant, Serge reçoit une invitation non signée qui lui demande de venir en urgence et en toute discrétion à un rendez-vous fixé près du village de Saint-Cézaire-sur-Siagne, accompagné de son ami Régis.
Les deux hommes se rendent à l'adresse indiquée, excités par l'atmosphère de mystère.
Ils sont reçus par une élue régionale dans une ancienne bergerie rénovée, puis présentés à deux députés et un criminologue. S'ils ont été conviés à cette réunion secrète, c'est que leur participation à un projet leur serait très utile. Mais de quel projet peut-il s'agir ?
La réponse qui leur est donnée est simple : l'État étant incapable de protéger la population contre le terrorisme, « pour suppléer à l'impuissance du pouvoir, nous allons créer une sorte de juridiction occulte qui s'interposera avant. »
Serge Boudoux, partie prenante du thriller comme vous l'avez compris, après avoir émis beaucoup de réserves sur l'illégalité de ce projet répond de façon convaincante à toutes les questions que le lecteur est en droit de se poser : pourquoi ces éminents personnages font-ils appel à des petits inconnus comme lui et Régis, qui exécutera la sentence de mort, sans oublier les risques que chacun encourt du fait de son adhésion à un groupement d'individus formés en vue de la préparation d'un ou plusieurs crimes ou délits.
Bref, en ces temps où le terrorisme revient avec force sur le devant de la scène, où l'extrême-droite est florissante, le tribunal de l'ombre, cette oeuvre de fiction n'a jamais été aussi proche de la réalité et pourrait sans aucun doute tenter plus d'un gouvernement d'utiliser « cette justice préventive ». Ce serait alors pour un état totalitaire le contrôle et la surveillance absolue de la population, mais n'est-ce pas déjà en place dans certains pays, suivez mon regard...
Il fallait bien la plume libre et sauvage comme Serge Boudoux ne craint pas de se définir pour oser imaginer un tel scénario.
Dans le contexte assez tendu parfois dans lequel se déroule cette machination, il n'hésite pas à se référer à la mythologie grecque, évoquant par exemple la boite de Pandore, les écuries d'Augias, ce cinquième des douze travaux d'Hercule ou encore Cassandre…
Toujours aussi surprenant, peut-être avec un peu moins de gouaille, cette fois-ci, avec son style complètement atypique, tellement peu conventionnel, Serge Boudoux a su, pour mon plus grand plaisir, une nouvelle fois, me tenir en haleine, du début de l'intrigue jusqu'à son dénouement et qu'il soit ici remercié très sincèrement pour sa confiance renouvelée.

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