Honnêtement, je ne lis pratiquement jamais d'essais, et des essais philosophiques encore moins. Mais pourquoi avoir coché ce titre lors de la dernière opération Masse Critique ? le titre a attiré mon attention : «
Ode à la fatigue », comment célébrer une sensation si désagréable ?
En commençant par écrire le mot en lettres capitales dans une jolie couleur dorée qui contraste merveilleusement bien avec la couverture bleu sombre. « Graver en lettres d'or », la fatigue se trouve d'ores et déjà embellie !
Il est vrai qu'une ode peut aussi être triste et traiter d'un sujet désespérant, ce choix d'écriture, très original, permet à l'auteur d'aborder la fatigue sous différents angles.
L'introduction nous présente ses motivations, liées principalement à l'universalité de ce sentiment : «Ils n'en mourraient pas tous, mais tous étaient frappés » et à la pauvreté des écrits consacrés à ce sujet.
Dans le prélude qui suit,
Eric Fiat nous parle des origines de la fatigue. Des considérations sur le passage du temps et ses effets sur les objets/machines, les plantes et les animaux nous permettent de comprendre ce qui distingue la fatigue de l'Homme des autres : « l'homme nous semble occuper une place particulière ».
La strophe est consacrée aux bonnes fatigues. Conséquences d'activités choisies, d'activités qui ont un sens, elles permettent un bon repos. Ce sont les fatigues enfantines, l'enfant qui vit plusieurs vies en une seule journée, grâce aux jeux et à son inépuisable curiosité face au monde qu'il découvre « on dirait que je serais… ».
Nous grandissons et confrontés à un environnement confus, à un rythme accéléré et à des contraintes de plus en plus marquées, nos fatigues deviennent mauvaises et le repos est de plus en plus difficile, ce qui fait l'objet de l'antistrophe dans laquelle je me suis réellement reconnue. « Une vie fatiguée n'est autre chose qu'une vie pauvre en possibilités et riche en impossibilités ».
L'épode nous présente enfin les bienfaits de la fatigue. La somnolence, la baisse d'attention, la diminution de la vigilance nous inciteraient à nous retirer du monde, à interrompre les interactions avec notre entourage et nous permettraient par là-même de nous « recentrer », de prendre le temps de nous écouter et de gagner en richesse intérieure. Vaste champ de réflexions que je n'ai pas fini d'explorer !
Une lecture qui a tenu toutes ses promesses, l'examen minutieux de la fatigue m'a permis de mieux l'appréhender. En ouvrant ce livre, je me disais que pour bien combattre son ennemi il fallait apprendre à le connaître. En le refermant, je n'ai plus forcément envie de m'opposer, j'accepte plus facilement ma vulnérabilité qui fait de moi un être humain. Je reste lucide, le monde actuel exige de nous d'être toujours plus performants, je connaîtrai probablement encore de nombreuses mauvaises fatigues, car « le métier d'homme est difficile », mais j'espère les aborder plus sereinement.
Un grand merci à Babélio et aux éditions de l'Observatoire pour cette lecture enrichissante.