Parce qu'il est aussi des romans salués par les critiques, encensés par les lecteurs qui chez moi font un flop.
le Lac de nulle part en fait partie.
C'est à l'aéroport de Minneapolis que notre narrateur, Trig-onométrie, retrouve sa soeur jumelle, Al-gèbre, et leur père, ancien professeur de mathématiques (!) dont ils étaient sans nouvelle depuis deux ans. A l'origine de ces retrouvailles, « un texto du père réclamant une dernière aventure », une expédition en canoë d'un mois en plein mois d'octobre au coeur du parc provincial Quetico.
Séduite il y a quelque temps par les descriptions poétiques et sensibles des espaces majestueux et hostiles des Highlands écossais dans Je pleure toute la beauté du monde et des îles Hébrides dans Je suis une île, j'avais hâte de me plonger dans le dernier roman de l'écrivain
Pete Fromm. L'idée de voyager dans les méandres des lacs canadiens, de contempler avec Trig la beauté farouche de ces grands espaces, de m'émouvoir devant le spectacle des aurores boréales, laissaient présager des heures de lecture propices à l'évasion et à la rêverie.
Quelle n'est donc pas ma déception, quand au fil des pages, je découvre une narration dont la monotonie semble mimer la routine bien huilée de nos trois aventuriers, organisée autour des petits déjeuners - ce matin, c'est flocons d'avoine ou pancakes ? -, des heures de navigation à la recherche du prochain portage, de l'installation du campement, de la pêche, des repas et des « ablutions ».
Bien sûr, le roman se lit comme un « page-turner » et j'ai enchaîné les chapitres au rythme de la progression des embarcations sur lesquelles les aventuriers glissent d'un lac à l'autre. Pourquoi ce père qui n'a pas donné de nouvelle depuis deux ans décide subitement de partir à l'aventure avec ses deux jumeaux ? Que cachent ces moments - de plus en plus fréquents - où il semble s'absenter du monde et de lui-même alors même qu'il est censé mener l'expédition ? Pourquoi al ne manque-t-elle pas une occasion de manifester sa colère sourde mais vivace à son égard ?
Les longues heures de navigation vont donner l'occasion au père et à ses enfants de se laisser aller à la nostalgie d'un passé révolu, mais aussi d'affleurer non-dits et secrets familiaux jusque-là inavoués. Par le prisme du narrateur, mais aussi par celui de Dory, la mère des jumeaux, la grande absente de l'expédition, se dessine peu à peu le portrait d'une famille dysfonctionnelle. Pourtant, les moments d'introspection, les dialogues où les vérités douloureuses et horribles se dévoilent pudiquement, se voient trop souvent relégués d'un coup de pagaie par le récit un peu insipide à la longue des longues journées de canoë.
Au final, c'est une première rencontre ratée avec
Pete Fromm.