Il me fallait un livre qui se passe dans un cirque pour un challenge, aussi c'est tout naturellement que je me suis dirigée vers ce roman, car j'avais bien aimé le premier de l'auteure " La Fabrique de poupếes".
Et je me demande si
Elizabeth Macneal n'est pas attirée vers les sujets un peu dérangeants, un peu grinçants, les ambiances un peu malaisantes, car je ne me suis pas sentie bien dans cette lecture, rapport au sujet .
On est en Angleterre en 1866, dans un minuscule village très pauvre, dont la principale activité est la cueillette et le conditionnement de petites fleurs, et Nell est différente. Aujourd'hui , on connait sa maladie , le vitiligo ( la peau est parseminée de taches marrons bien plus grosses que des grains de beauté) , mais à cette époque, les gens pensaient qu'elle était une créature dont il fallait se méfier, une créature à éviter, un peu diabolique, un monstre donc... Quand un cirque s'établit non loin de chez elle, son père la vend !
Désormais Nell fera partie des numéros du Cirque des Merveilles tenu par Jasper, un homme un peu extrême, un peu border line, et évoluera en compagnie de la femme à barbe, de triplées, d'une naine, d'une géante, toutes des créatures montrées du doigt dans la "vraie vie" mais qui trouvent étrangement leur place ici...
Il faut savoir que ce genre de "numéro" était extrêmement prisé à l'époque, que les cours royales aimaient voir des êtres différents mais en 2023 , tout cela est extrêmement dérangeant ! Voir des personnes achetées, kidnappés, presque réduits à l'état d'esclaves, d'objets, est extrêmement perturbant.
Dans la note de l'auteure en fin de roman, elle précise qu'au départ, elle voulait prendre comme personnage principal un des "monstres" ayant existé, mais que très vite , elle y a renoncé par respect, qu'elle ne se voyait pas lui inventer une vie, lui prêter des sentiments, des pensées qui peut-être n'était pas les siennes, qu'elle aurait eu l'impression de ne pas valoir plus que ces directeurs de cirque, aussi , a-t-elle complétement bifurqué, et créé entiérement le personnage de Nell. J'ai trouvé ça bien, correct . Elle nous raconte aussi que pas plus tard que 1974, des cadavres de ces créatures différentes étaient exposées, notamment par Barnum qui " se souciait aussi peu d'elle vivante que morte, du moment qu'il pouvait en tirer un profit. ce fut grâce à ce "succés" que P. T. Barnum , soi-disant "le plus grand directeur de cirque au monde ", lança sa carrière."
Tout cela m'a écoeurée, si bien que je n'ai pas aimé être au milieu de ces pages, alors que c'est un excellent roman, hyper bien documenté, mais un peu trop cruel pour moi.
Le monde du cirque , ses tatonnements de débutants : photos à vendre, "salles" d'exposition, manque de sécurité lors des numéros, souffrance physique des artistes, la précarité, sa pauvreté (ils ne mangeaient pas tous les jours à leur faim, et certains chassaient ou volaient), sa violence, les visites et exibitions devant la reine Victoria, vécues comme une consécration ou une humiliation, etc.. tout cela est excellemment montré.
On se rend compte du chemin ("vertueux") parcouru par le monde du cirque, en Europe, depuis le XIX siècle.
Le Cirque des merveilles, merveilleusement cruel , malaisant et beau à la fois...