Un livre de jours

Superbe objet reçu pour mon anniversaire, ce livre est un petit bijou à conserver près de soi. Non pas sur sa table de chevet mais plutôt en vue sur votre bureau de travail: à chaque jour une image, quelques mots pour se rassurer que le monde est beau.

Quant contenu du livre ainsi que sa raison d'être, je vous invite à relire la très belle et très à-propos critique de Guillaume Signet.

Quant à moi, cette fois, je choisirai la paresse et vanterai le dilettante que je puis être devant un tel ouvrage.
Comme il est agréable de feuilleter un livre de photographies et de souvenirs. Tel un bréviaire où l'on puise ici une phrase, un souvenir déguisé en vérité, là une image tombée du ciel ou encore de la poésie capturée par le Polaroïd de la jeunesse de la chanteuse. Souvenirs souvenirs qui nous parlent de demain.
"Avec les pièces du paradis, j'appellerais le temps enfui."

Souvent deux par deux, face à face, les images, les textes se répondent, il y a l'avant et l'après, son passé qui est aussi le nôtre et notre descendance qui est aussi la sienne.

Ses amis, ses enfants mais aussi cette jeunesse, cette énergie qu'elle a si souvent incarnée, tout y est émietté, en aplats bien sûr, de quoi nourrir une année ou une vie, une page par jour. Poésie, que tu es poétique quand tu te caches derrière ta naïveté.
"La musique chante dans le sang de nos fils"

Et si vous fermez les yeux, telle ou telle chanson de Patti (vous permettez que je vous appelle Patti ?) bondira du livre et emplira votre journée de son intensité.

Depuis un demi-siècle, la chanteuse, écrivaine et photographe américaine partage son parcours à travers ses chansons, ses expositions et ses livres.
Patti Smith, 76 ans, ne se présente jamais seule. Dans sa voix, ses images et ses mots, résonnent les flux radieux des artistes qu'elle a croisés, Robert Mapplethorpe, Allen Ginsberg, William Burroughs ou encore Lou Reed, et de ceux qu'elle a rencontrés en plongeant dans leurs oeuvres.
Longtemps, elle s'est donné des missions et des rituels à accomplir, comme de partir en Guyane pour ramasser des cailloux qu'elle voulait donner à Jean Genet, ou de faire le tour du monde pour photographier une chambre, un lit, des objets personnels de poètes, peintres et musiciens.
Durant ces dernières années, quand elle n'était pas en concert ou ne préparait pas une exposition, Patti Smith s'est consacrée a rassembler dans Un livre de jours ses clichés pris durant une vie, qu'elle a ensuite légendés, jour par jour. La plupart sont d'apparence modeste : un moulin à eau construit au Japon par Akira Kurosawa, le lit où rêvait la peintre Georgia O'Keeffe à Santa Fe, la pierre tombale d'Albert Camus, le bureau de Jorge Luis Borges, le jardin où sont les cendres de Virginia Woolf, et puis sa main, le trait fluide de son stylo, les mots qui s'écoulent sur une feuille.
Un livre à son image, sobre, discret, délicat, beau.


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Avec son beau titre suggestif "Un livre de jours" est un recueil de photographies souvenirs où chaque jour de l'année est commenté par Patti Smith (y compris le 29 février). C'est un bel objet, un livre-cadeau qui a une belle couverture rigide en petit format très agréable avec une photo en noir et blanc de Patti Smith tenant son ancien appareil Polaroïd.

C'est sa façon de voyager durant la pandémie qui est à l'origine de ce livre dans lequel elle fête les anniversaires des gens qu'elle apprécie notamment sa fille et son fils mais aussi ses disparus et les lieux et objets qui les évoquent. On y croise donc ses proches, son mari, ses amis et amies et ceux et celles que Patti Smith admire. Il n'est donc pas surprenant de retrouver des souvenirs de Robert Mapplethorpe, Sam Shepard ou Arthur Rimbaud ainsi que Virginia Woolf, Emily Dickinson ou Albertine Sarrazin.
D'ailleurs, elle dit aimer beaucoup la France où elle a découvert ses poètes dans les années 1960, le pays dont la littérature, l'art et l'esprit révolutionnaire ont toujours été chers à son coeur.

Elle a vécu de nombreux deuils et les objets fétiches sont présents sur les photographies de toutes les époques y compris celle de son enfance car le souvenir est pour elle un devoir sacré. Un livre touchant pour cela sans être triste, loin de là.


Challenge Plumes féminines 2024

Alors que le Covid se muait en de nombreuses et peut-être moins virulents variants, on (certains médias) nous avait alarmé de l'arrivée d'un tsunami de publications (journaux, romans) en lien avec le confinement, et puis… plus rien. Les éditeurs avant tout ont fait barrage, ayant assez à éditer avec le retard pris lors du premier confinement de toute façon. Lentement cependant, des ouvrages ont vu le jour qui sont la conséquence même de la pandémie car écrit dans son contexte, même s'ils n'ont pas forcement le Covid comme thème central – on a envie de dire « heureusement » d'ailleurs. L'Échiquier de Toussaint en fait partie, Plexiglas de Chauvier aussi. Ce Livre de Jours, de Patti Smith, en est un aussi et des plus original : une photo par jour avec une note courte. Une année avec Boulgakov, Joan Baez, Beckett, Gogol, Jean Genet, Boulgakov, Rimbaud – très souvent -, des voyages dans le passé avec Burroughs, Ginsberg, Nico, la tombe de Susan Sontag ou encore des portraits de sa fille Jesse Paris Smith, une photo de René Daumal, un café au Flore. Voilà un très joli recueil qui dénote l'amour de Patti Smith pour l'art en général et la littérature en particulier - française bien souvent. Elle se raconte en toute liberté à travers des images, des personnalités, des lieux, des objets, tout ce qui fait Patti Smith, en somme, et ça marche.

Voici un ouvrage assez incroyable, d'une sensibilité fragile et tout en émotions contenues.
On peut ouvrir et piquer l'inspiration. On peut laisser ses yeux parcourir et s'arrêter sur un détail de photo ou un regard d'une des personnes invitées à figurer dans ce recueil.
Ou se dire qu'on cherche la date du jour et découvrir ce qu'il en est.
La préface spécifique pour la France et les pages démontrent cet attachement et la connaissance de Patti Smith à notre pays et sa culture.

D'une poésie douce.