Un roman aussi noir que flamboyant…Le flamboyant, à notre grand soulagement, sera vainqueur !...
Pas fûtée pour un sou…suis-je ?!!! Je vais m'expliquer… j'ai découvert cet écrivain-paysan-poète… par hasard dans une librairie au nom, allant de pair avec l'univers d'
André Bucher : Il s'agissait de « La
Cité du vent » [Saint-Flour / Cantal ], où j'étais de passage chez des amis, à l'automne 2016… Voilà, dans un premier temps, le contexte de cette première acquisition…
Une première lecture… trop rapide, trop superficielle, de cet écrivain même si l'enchantement a opéré, avec une langue musicale, poétique à souhait… Il aura juste fallu, un échange très récent, enthousiaste, complice avec une camarade (qui se reconnaîtra sûrement !…) appréciant également très fort cet écrivain singulier… pour me souvenir de cette «
Fée d'hiver »… que j'ai été aussitôt extraire de mes rayonnages…
Cette fois , quelque peu coupable de ma lecture première , négligente, j' ai fait une relecture, plus attentionnée…Car, « gourde que je suis »…. Je n'avais pas même percuté au jeu de mots… du titre, phonétiquement à double sens donné à cette narration passant du drame, de l'horreur à l'Enchantement recréé….dans des existences pourtant fort mal parties !...
En effet, ce récit débute par un drame : le destin de deux gamins, deux frères ,
Richard et
Daniel, dont l'enfance a été brisée par un « fait divers »… : leur père a tué leur mère, épouse « infidèle » pour se suicider ensuite. Ces deux enfants seront mis en famille d'accueil. A partir de ce drame,
Daniel, le cadet , en perdra la parole… et communiquera par l'écriture… le grand frère,
Richard, lui se console avec la musique… Les deux frères sont très attachés l'un à l'autre et se protègent, se trouvant assez isolés et en marge…
L'amant, le fermier voisin, et père de trois enfants ;
Robert,
Pierre et la petite
Alice… Les
Monnier [sans oublier le cousin,
Louis, qui deviendra un temps le mari de la Belle
Alice] seront des « Ennemis jurés »…Les enfants restant enferrés dans les rêts de la tragédie et de la haine de leurs parents…,hormis
Alice…Figure solaire du récit
Des êtres cabossés, en dehors d'
Alice, figure féminine rayonnante, qui tente de garder la tête hors de l'eau , dans cet environnement glauque et malsain… Dans cette sorte de huis clos entre gens du pays, arrive L'Etranger,
Vladimir,serbo-croate, bûcheron au grand coeur, ayant fui la guerre de son pays…sa famille, massacrée ! En exil, il se loue pour des petits boulots… Et se retrouve un jour devant la porte de la scierie familiale d'
Alice et de ses horribles frères…
Heureusement,
Richard, le voisin détesté des patrons de
Vladimir, viendra lui offrir son amitié .
Vladimir, très seul après ses journées de travail est logé très chichement par « ses patrons »dans une piètre caravane… le « bûcheron en exil »trouvera enfin accueil et chaleur humaine auprès des deux frères , orphelins…
Je n'en dis pas plus long… Ces êtres « cabossés », abîmés…. se reconstruiront grâce à leur bienveillance réciproque ainsi qu'à la venue dans ce cercle intime de la "
Fée d'hiver",
Alice… Un petit noyau amical, amoureux va se coudre, se créer, réparer les blessures profondes de leurs passés…
De magnifiques descriptions de la forêt, des montagnes, de Dame Nature, tour à tour merveilleuse, réconfortante ou cruelle !
Du « Fait divers » atroce, monstrueux… la narration fort lyrique d'
André Bucher nous emportera de l'autre côté de la rive, infiniment plus ensoleillée, celle de la «
Fée d'hiver « …
Des Renaissances, des Reconstructions de vies ,mises à mal prématurément. Ces vies en lambeaux, que l'on accompagne dans une première partie, nous demandant si une éclaircie va se décider à se montrer ?! Eh bien, Oui…Les chemins seront durs… mais les personnages très attachants… parviendront à se construire, à trouver un équilibre, un sens, une chaleur humaine fiable, dont ils ont manqué tous les quatre…
Daniel,
Richard,
Vladimir et
Alice…
Les frères d'
Alice, trop abîmés, embourbés ou pas assez intelligents pour redresser la fatalité les ayant frappés dans leur enfance, resteront dans leur microcosme étriqué et stérilisant…
Un très beau roman… magique, nous offrant un moment de grâce : l'Espoir , la Joie de suivre des personnages attachants, que l'on voit grandir, changer le cours de leur vie, avec une détermination farouche…Même si rien n'est jamais acquis … définitivement !
«
Vladimir se frotte les yeux, il pense que les fées d'instinct savent que pour enchanter le monde, il y a forcément , dans l'attente du jour, une petite marge d'erreur. « (p. 152)
Désirant poursuivre cette sensation d'enchantement... j'ai réservé à ma médiathèque deux autres textes de ce "paysan-poète", qui vont être dans mes toutes prochaînes lectures: - "
Le Pays qui vient de loin" et "
Le cabaret des oiseaux"...
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Voir lien : https://lemotetlereste.com/litteratures/alecart/