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sur 504 notes
L'auteure nous livre un roman féministe, se déroulant en Italie, Nous faisons la connaissance d'Octavia Selvago, jeune fille de 15 ans , qui a décidé du jour au lendemain, de quitter l'école pour devenir une grande cheffe cuisinière, suivre les traces de son père, et prouver qu'en tant que femme, elle pourra réaliser son rêve. Une situation cocasse, aux yeux de sa famille, surtout en Italie, où la femme est reléguée aux taches domestiques, en plus d'élever leurs enfants et étant des épouses loyales,
Aujourd'hui Octavia à trente huit ans, mariée trois enfants, elle fait le point , se remet en question,, Son mari assume tout, pars on égoïsme . Elle se donne corps et âmes à son travail, elle ne vit que pour cela, et jusqu'à l'épuisement. Une femme qui revendique son indépendance, mais à quel prix . Arrivera t'elle à trouver les réponses à ses questions , reprendre contact avec la réalité,
L'auteure m'a transportée, avec une facilité déconcertante dans son histoire, Un roman court puissant, subtile , sensible, je me suis laissée envahir par les effluves de ces repas gastronomiques.
La plume de l'auteure est fluide , entraînant une lecture passionnante , et addictive. le personnage d'Octavia , dégage une empathie extrême .
Une belle découverte, une lecture que je vous conseille vivement.
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Ottavia est passionnée. La fougue qui la maintient année après année, depuis sa plus tendre enfance se traduit par une créativité et un acharnement sans trêve autour de ses fourneaux. Après avoir vécu dans l'ombre de la célébrité de son père, lui aussi chef, la jeune femme s'est construit une réputation et les clients le savent.

Le revers de la médaille affiche une autre histoire. Celle d'un premier amour, répudié lorsque la pression de démons artificiels l'a rendu invivable. C'est ensuite une furtive rencontre avec Clem, qui lui a donné une adresse à Paris avant de s'envoler brutalement vers la France, où elle le retrouvera au cours d'une rencontre éclair C'est finalement Bensch, un critique culinaire réputé qui est tombé sous le charme et est devenu le père de ses trois enfants. Mais le souvenir de Clem la hante.

Le feu qui anime la narratrice est de ceux qui ne s'éteignent pas et qui incendient tout sur leur passage. Elle vit sans concession, et épuise son entourage. C'est aussi ce qui est à l'origine des passions qu'elle déchaine.

L‘ambiance est ardente dans ce roman qui mêle la cuisine italienne dans ce qu'elle a de plus séduisant, et les amours complexes de la jeune cheffe. La chaleur des âmes et des fourneaux s'incarne sous les traits de l'héroïne tout feu tout flamme.

Une écriture travaillée mise au service d'une histoire plaisante.

300 pages Iconoclaste 17 Août 2023
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Ce roman était appétissant avec sa couverture colorée, la promesse de retrouver la plume de Julia Kerninon que j'avais beaucoup aimée dans Liv Maria et le décor romain qui s'esquisse dès l'incipit. Ce titre intrigant aussi : sauvage, c'est un mot qui a un goût de liberté brute, de naturel comme une plante qui pousse à sa guise, mais quelque chose de rude aussi.

Et effectivement, je n'ai fait qu'une bouchée de la première moitié du livre, séduite par l'intrigue nouée autour d'Ottavia Selvaggio qui, à quinze ans, décide de quitter l'école pour cuisiner. de sa plume sensuelle, l'autrice nous fait ressentir l'adrénaline des coups de feu en cuisine, respirer des arômes méditerranéens, goûter des saveurs tellement italiennes – salades de puntarelle aux anchois, carciofi alla romana… Dans les sauces et les spaghettis se lovent des relations dont la tectonique est restituée à merveille. Les femmes de la famille sont échaudées par le mariage, Ottavia est déterminée à s'accrocher coûte que coûte à sa liberté. Forcément, un tel personnage nourrit l'intrigue, la rend imprévisible, et je n'ai pas boudé mon plaisir.

Et pourtant, mon appétit s'est tari par la suite. J'ai eu l'impression que la quête éperdue de liberté d'Ottavia ne lui permettait pas de savourer l'ensemble des possibles, mais l'empêchait de les investir. Elle qui était supposée représenter une femme libre, émancipée, m'a semblée au contraire paralysée, dévorée par les doutes. Comme le dit la quatrième de couverture, même la maternité ne la fait pas dévier de sa route, mais quelle route ? Cette femme qui pourrait tout se permettre ne me semble pas réaliser grand-chose. Sa quête a fini par me sembler dépourvue de sens et j'ai eu de plus en plus de mal à m'y intéresser. L'excipit, qui pousse à son paroxysme la hantise de liberté de la protagoniste, m'a laissé un entêtant sentiment d'inaccompli.

Peut-être est-ce précisément le propos du roman de nous interroger sur la quadrature du cercle que représente la conciliation d'une passion professionnelle, de la maternité et de la vie de femme. Mais cela m'a laissé un sentiment frustrant.
Lien : https://ileauxtresors.blog/2..
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Voilà un beau portrait de femme passionnée, très vivante et passionnante.

Ottavia Selvaggio vit à Rome. Son père est restaurateur, au grand dam de sa femme qui refuse ostensiblement de faire la cuisine à ses enfants pour manifester sa colère contre ce choix d'un métier aussi absorbant.
C'est pourtant la même voie que va choisir Ottavia, contre l'avis de sa mère, parce que la passion d'une cuisine différente et inventive l'anime plus que tout.

Et pourtant Ottavia va avoir trois hommes dans sa vie.

Le premier, Cassio, qu'elle a entraperçu dans la cuisine de son père, et pour qui elle éprouve un coup de foudre immédiat, est comme elle passionné de cuisine. Il détient un secret jusque-là jalousement gardé : la recette de la fameuse Sacher Torte que seul le grand restaurant autrichien détenait. En échange de la transmission de cette recette au père d'Ottavia, il va rentrer dans sa brigade et apprendre le métier. Avec Ottavia ils vont pratiquer ensemble pendant des heures entières, concentrés sur les tâches à exécuter, et les gestes remplaceront les paroles inutiles.
Cassio demeurera sa grande passion, même si elle le quittera sans un regard en arrière quand elle comprendra qu'il s'abîme dans l'alcool et la drogue, alors qu'il tient son propre restaurant.

Ottavia elle aussi va avoir son propre restaurant. Mais avant cela elle rencontrera un autre homme, Clem, étudiant français aux Beaux-Arts, dont elle tombe amoureuse au premier regard. Lui aussi souhaite la revoir et lui donne son adresse parisienne. Alors, quand Ottavia prend le train direction Paris, elle fonce tête baissée telle qu'elle l'a toujours fait : sans un remords, elle est prête à tout pour retrouver le bel étudiant dont elle ne sait rien.
Arrivée à Paris, elle va retrouver ce Clem qui semble l'attendre passionnément, lui aussi, mais après une soirée et nuit d'ivresse, il la laisse repartir, et ensuite ne lui donne plus aucune nouvelle : Ottavia en ressortira profondément blessée , et plongera dans le travail comme elle a toujours su le faire en apprenant la cuisine française et en rencontrant une compatriote, Marina, avec qui elle scellera une amitié durable.

Et enfin Ottavia va rencontrer Bench, un critique gastronomique, mais sur tout un homme telle qu'elle en a besoin, qui prend soin d'elle et lui donne trois enfants, et fait en tant que mari tout ce qui est nécessaire pour que la famille fonctionne, puisque bien sûr Ottavia, malgré ses maternités, se consacre toujours avec autant de passion à la quête d'une cuisine qui soit la sienne uniquement.


C'est un très beau portrait de femme parce qu'Ottavia vit intensément tout ce qui lui arrive, qu'elle ne dévie pas d'un pouce de la ligne qu'elle s'est fixée, et qu'elle avance dans la vie avec sa passion dévorante nichée au coeur de ses pensées, ses actes et la majorité de son temps de travail.

On peut la décrire égoïste, tyrannique, individualiste et même sans coeur (ses enfants craignent qu'elle les abandonne) mais elle a le mérite de la cohérence et de se dévouer à une quête qui n'aura pas de fin.

Alors quand Clem surgit du passé pour lui expliquer ce qui s'est produit suite à la nuit parisienne et veut effacer le passé pour donner un avenir à leur relation, Ottavia va hésiter. Fera-t-elle le chemin inverse et sera-t-elle prête à tout quitter à nouveau pour suivre celui dont elle est tombée amoureuse il y a quelques temps déjà ? le récit nous le dira, mais ce n'est pas le plus important.

Le plus important c'est cette flamme logée dans son coeur qui n'est pas près de s'éteindre. Quiconque a vécu auprès d'un artiste peut comprendre cette forme d'égoïsme qu'incarne celui qui vit pour sa passion. Ici c'est la cuisine (et Julia Kerninon en parle très bien) mais ce pourrait être la peinture (comme dans « La nourrice de Francis Bacon »), la musique (comme dans « le grand feu » de Leonor de Recondo) ou bien sûr la littérature.

Intense, ce pourrait être le qualificatif qui traduirait la vie d'Ottavia, une femme attachante parce que profondément libre de suivre le cours de sa destinée.
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Comme Liv Maria, Ottavia est une femme forte. Déterminée. Intense. Passionnée par son métier de cheffe. Qui, à 38 ans, mariée, 3 enfants, se retrouve à la croisée des chemins. Quelle route aurait été la sienne si elle avait suivi ses premiers amours ? Difficile de savoir, difficile surtout de renoncer à ce qu'offre le monde dans son entièreté. Même au profit de ceux qui l'aiment. Ottavia ne se laisse jamais enfermer.
De sa plume sensuelle et rythmée, Julia Kerninon narre une histoire d'amour, de couple et de passion dans laquelle on plonge avec gourmandise. Et où les mots sonnent vrais.

« Dans nos vies, certains hommes étaient partis en avaient été remplacés, mais les femmes et les enfants demeuraient, comme l'exprimait Antonia avec défiance. Est-ce que ça veut dire que les femmes ne peuvent pas partir ? je lui avais demandé un jour. - Je ne crois pas. Je crois que c'est plus que ça n'a pas d'importance pour nous, on n'a pas besoin de fuir, on est là mais on est aussi toujours ailleurs, dans nos têtes. »

J'aurais seulement fait l'impasse sur l'excipit 😉
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Julia Kerninon explore dans son dernier roman, Sauvage, le thème de la femme libre, autonome, à travers le personnage flamboyant d'une Italienne, Ottavia Selvaggio, fille d'un grand cuisinier romain réputé, qui se libère du monde patriarcal dans lequel elle est née et a grandi, où certes les femmes ont le droit de faire la cuisine, mais à condition que cette activité soit cantonnée à la popote ménagère.
En effet, s'il y a bien un métier où les représentations, celles de personnages fictifs ou réels, collent avec une idée puissamment masculine, c'est celui de la gastronomie, celui des chefs cuisiniers, qu'ils soient étoilés ou non d'ailleurs.
Le milieu de la restauration est l'un des plus sexistes qui soit. Car si les femmes ont toujours nourri l'humanité dans la sphère domestique, les hommes s'attribuent les casseroles et les fourneaux professionnels depuis l'Antiquité. Dès qu'il s'agit de régaler les puissants et de décrocher les étoiles du ciel pour les agrafer à leurs toques, ce sont eux qui mettent la main à la pâte.
Ottavia Selvaggio, la narratrice, a à peine la quarantaine lorsque nous faisons sa connaissance. Ce qui compte pour elle, c'est d'avoir réussi à monter son propre restaurant dans le centre de Rome, c'est de prendre son indépendance, c'est de tracer sa route. Nous allons ainsi découvrir que son métier devenu une passion est lié très intimement à sa vie personnelle, ses histoires d'amour, sa famille, ses amis...
Julia Kerninon nous brosse le très beau portrait d'une femme déterminée, hyperactive, mère de famille… Son héroïne ne désire qu'une chose, s'accomplir dans la grande cuisine. Les jours avancent, elle a su s'affranchir de l'emprise du père, prendre de la distance avec sa mère, les amours surviennent, les enfants aussi, les amitiés féminines demeurent, essentielles, tout comme son travail…
Ottavia vit intensément tout ce qui lui arrive, elle ne dévie pas d'un pouce de la ligne qu'elle s'est fixée, elle avance dans la vie avec sa passion dévorante nichée au coeur de ses pensées, de son ventre, de ses actes et de son espace-temps, son travail semble absorber la majeure partie de sa vie.
L'existence d'Ottavia va être traversée par trois histoires d'amour différentes, trois rencontres qui résonnent avec sa vie de femme, de mère de famille, de cheffe cuisinière aussi, mais la part des hommes dans son existence est-elle si importante, ces trajectoires croisées laisseront-elles une empreinte gravée dans son coeur ?
C'est un personnage qui assume ses choix, qui s'assume, qui parfois hésite mais toujours repart de l'avant. Elle est entourée, aimée mais est-ce suffisant pour la combler, répondre à son éternelle insatisfaction ?
D'une plume ardente et minutieuse, Julia Kerninon compose une figure féminine qui agit selon ses désirs et ne veut renoncer à rien. Ce qu'Ottavia veut, Ottavia l'obtiendra.
J'ai donc suivi Ottavia dans ses pérégrinations, dans son évolution de femme, - racontant par de belles ellipses son chemin depuis l'âge de quinze ans, ses pas de côté en tant qu'amante, puis dans sa maternité, il y a plein de questions qui traversent le chemin intense de ce livre, qui viennent s'agréger au récit au fil des pages. Beaucoup de thèmes sont venus me toucher en tant qu'homme.
Je ne vous cacherai pas que c'est un texte gourmand qui se dévore et qui m'a dévoré.
C'est bien l'histoire d'une autonomie, d'une utopie matriarcale, ce monde où cette femme a tout et pourtant ce qui l'intéresse de plus en plus, c'est être seule avec elle-même, seule en sa cabane, une chambre à soi à la manière de Virginia Woolf, déterminée à aller au bout de ce qu'elle veut.
En ce sens c'est un roman résolument féministe, d'un féminisme déployé avec intelligence, subtilité, mais dans la forme aussi, dans la manière de faire exister ce personnage, par rapport à ses actions, dans son rapport aux autres, dans son rapport au monde.
Julia Kerninon fait entendre une vraie voix de femme, une vraie héroïne. Elle le dit d'ailleurs dans une interview : pour elle écrire c'est remettre les femmes au centre du roman, les faire agir dans le roman comme elles agissent dans la vraie vie.
C'est un roman sur la vie quotidienne, Julia Kerninon y fait entrer la gestion de la vie domestique, les grossesses, les maternités, les enfants, les discussions avec les parents, les chemins de traverse aussi...
C'est un livre dense, mystérieux, en même temps réaliste et proche de nous, Julia Kerninon nous montre qu'il est possible de faire de la belle littérature avec un récit prosaïque ; en même temps je vous avoue que ce que je vous dis ici est en contradiction avec ma relation habituelle avec la littérature romanesque. Comme quoi... !
Il y a des passages d'une très grande poésie, elle sublime les choses extraordinaires qu'on voit tous les jours.
Ottavia nous embarque dans son sillage, dans ses colères, dans ses fugues ; elle s'octroie la même liberté qu'un homme, est-ce si désagréable à entendre, à voir ? En réalité, elle ne fait rien qu'un homme ne fasse depuis toujours c'est-à-dire privilégier son envie, son désir, ses ambitions, son travail...
J'ai cru par moments entrevoir une flamme logée dans son coeur qui n'est pas près de s'éteindre. Elle vit avec passion son métier, mais pas seulement cela.
Ottavia est un personnage lumineux et complexe qui peut nous séduire par sa liberté de penser et d'agir et la seconde d'après nous agacer. D'aucuns la trouveront égoïste, comme si on acceptait moins ce sentiment chez une femme.
Mais derrière les certitudes d'Ottavia, des questions surviennent, des chemins buissonniers aussi qui semblent parfois la dévier de sa trajectoire, l'amène à douter des choix qu'elle a pu faire, par la vision qu'a d'elle un homme qui l'a aimée, l'a croisée dans sa vie, l'aime peut-être encore, surtout dans la manière qu'il a de lui poser des questions et elle de les entendre, de les recevoir, d'en être bouleversée. Moi aussi, ces mots m'ont bouleversé.
Parfois des fulgurances d'amour viennent déstabiliser Ottavia, c'est beau, tandis que se glisse dans le texte une manière sensuelle et poétique de dérouler la vie et de se surprendre à être surpris.
Il y a des instants presque sibyllins qui touchent au coeur comme cet échange tendu un jour entre Ottavia et sa mère, cette dernière demandant à sa fille de la traiter avec un peu de douceur.
" J'avais répondu entre mes dents :
- Mais je ne sais pas ce que c'est, parce que jamais tu ne m'as donné de la douceur, Maman.
- Je t'ai donné toute la douceur que j'avais . Ce n'est pas ma faute s'il n'y en avait pas beaucoup. "
C'est aussi la rencontre d'un vieil homme qui lui rappelle son père, c'est se perdre durant quelques heures dans un appartement rive gauche de Paris avec un amant et la compagnie des papillons qui s'invite dans le ventre, c'est un mari dont elle s'éloigne chaque jour sans bruit depuis quelques semaines, c'est son premier mari qu'elle revoit plus tard par hasard et la manière dont ils se sont séparés malgré tout ce qu'ils avaient cru possible ensemble...
C'est la vie qui continue, belle, intense, fragile... Sauvage.
Tiens, savez-vous comment se dit sauvage en italien ? Selvaggio.
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Ottavia - quel merveilleux prénom ! - se veut libre depuis son adolescence. Elle grandit auprès d'un père restaurateur et d'une mère littéraire et féministe. Elle abandonne la scolarité très rapidement pour devenir elle aussi cheffe de son propre restaurant (et non celui de son père). Passionnée par son métier, elle n'accorde que peu de place à son mari et ses enfants. Elle fait preuve d'un grand égoïsme et je n'ai pas retrouvé de valeurs féministes dans son récit. La liberté au détriment des autres m'a dérangée ; Ottavia n'est au final pas si libre que cela. Je n'ai pas ressenti la grande respiration émancipatoire que j'attendais, mais plutôt un court souffle de temps en temps.
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Il y a quelques romancières que je me promets de ne plus lire, tout en y retournant à chaque fois qu'une nouveauté paraît parce qu'elles sont talentueuses et que je suis faible devant la littérature. Julia Kerninon en fait partie.

Je ne sais plus quel écrivain disait qu'écrire, c'est rédiger différentes versions du même texte, et c'est particulièrement vrai pour Julia Kerninon. Ottavia Selvaggio, la « sauvage » de ce roman, pourrait être la jumelle de Liv Maria, ou de la Julia Kerninon narratrice de « Toucher la terre ferme » voire des deux, car j'ai la curieuse impression à chaque fois de retrouver le même personnage sous des traits différents, et des thématiques chères à l'autrice (la maternité comme un fardeau, la langue anglaise comme idiome de l'ailleurs, de la mise à distance de soi, du pouvoir de la littérature comme retranscription d'une recherche de soi sans concession ni réel souci des autres). Dans « Sauvage », l'héroïne fait preuve de cet individualisme habituel qui m'a toujours beaucoup dérangée, mais moins cette fois. Pourquoi ? Parce que comme Ottavia qui, comme son mari le lui lance lors d'une dispute, ne cuisine que pour elle, je soupçonne Julia Kerninon de faire de même avec l'écriture, et d'enfin l'assumer pleinement.

J'ai vu dans « Sauvage » le roman du désir, ou plutôt des désirs d'une femme, Ottavia, pour la cuisine avant tout, dont elle fera son métier, une manière de s'opposer à sa mère qui ne cuisinait pas tout en se rapprochant de son père dont c'était le métier ; désir pour des hommes qui n'honoreront pas toujours leurs rendez-vous mais dont l'absence pour certains, la présence pour d'autres, participeront à la construction de sa cuisine ; désir enfin d'être libre de toute contrainte que pourrait lui imposer sa vie familiale.

Mais c'est aussi en parallèle le roman d'une femme sauvage, dure, qui, après deux déceptions amoureuses, n'a pas voulu louper le coche de la relation suivante. Elle s'est inconsciemment domestiquée, au point de donner à son restaurant le nom de son mari, de faire des enfants sans le vouloir vraiment, avant de se réveiller et de se rendre compte qu'elle est passée à côté de sa vie et qu'elle se demande qui elle est devenue (heureusement que les hommes de sa vie lui diront qui elle est réellement, pour la guider, la pauvre…!)

Cette introspection est l'occasion pour l'autrice de délivrer une nouvelle fois sa vision très négative de la maternité, vue comme un boulet au pied, l'antithèse de la liberté.
D'un côté je le comprends, la vie de famille est très éloignée de celle d'une célibataire sans attache ; et d'un autre côté, je trouve Ottavia d'un égoïsme absolu : sa réussite a été possible grâce à son mari qui s'occupe de tout sans se plaindre, et elle est à s'apitoyer sur sa prétendue absence de liberté. Mais cette vie-là a été librement consentie par elle !

Malgré cela, « Sauvage » est un très beau portrait de femme, magnifiquement écrit. L'intensité d'Ottavia, sa dureté qui masque une fragilité étonnante, ont a su me conquérir. Je peux cette fois me dire que j'attends avec impatience le prochain roman de Julia Kerninon !
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Ma cuisine, mes amours, mes emmerdes

Julia Kerninon a un talent fou pour les portraits de femmes. Après Liv Maria, elle nous entraîne sur les pas d'Ottavia, en Italie. Après quelques déboires, va choisir d'ouvrir son restaurant. Un roman savoureux !

Ottavia a un caractère bien trempé et une idée précise de la voie qu'elle souhaite emprunter. Après ses études, elle choisit de rejoindre son père dans son restaurant, de s'investir entièrement à la cuisine au lieu de se lancer dans des études supérieures. À son côté, mais surtout à celui de Cassio, le jeune cuisinier qui partage ses journées, elle va apprendre. Une initiation qui se double d'une histoire d'amour venue presque naturellement. Mais très vite la passion va céder le pas à la rivalité et les mots doux aux insultes. La température va monter jusqu'à l'ébullition, jusqu'à la rupture.
Il faut dire qu'entre-temps Livia a croisé le regard de Clem. L'homme lui a laissé un bout de papier avec son numéro et une adresse à Paris. Alors, elle décide d'aller se perfectionner dans la capitale française, de retrouver ce Français qui la fascine.
Son arrivée est comme un enchantement. le monde s'ouvre à elle et sa première nuit se déroule comme dans un rêve. Mais cette fois encore, il va lui falloir déchanter. Alors, elle s'investit à fond dans le travail, accumule les expériences et peaufine son savoir-faire avant de rentrer en Italie bardé d'une certitude: elle ne doit compter que sur elle-même. Mais cela Cassio ne peut le comprendre et va encaisser une nouvelle rupture. Ottavia choisit alors d'ouvrir son propre restaurant et d'être seule aux commandes. C'est dans son établissement que la fille Selvaggio va déployer son talent. La notoriété de sa cuisine parvient jusqu'aux oreilles d'Arturo Bensch, rédacteur de chroniques gastronomiques dont on sait dès l'incipit qu'il épousera Ottavia et que le couple aura trois enfants.
En retraçant le parcours d'Ottavia sur plusieurs décennies, Julia Kerninon réussit à nouveau un superbe portrait de femme. Superbe, parce qu'il n'omet rien de ses aspérités. La volonté de s'émanciper, de se construire hors du schéma traditionnel –allant même jusqu'à refuser de reprendre le restaurant de son père – va s'accompagner de renoncements, de rendez-vous manqués, d'une vie de famille tronquée. Car l'engagement et la passion, surtout dans un milieu aussi exigeant où les tensions sont permanentes, ne peut s'accommoder de demi-mesures.
Après la fantasque Liv Maria, Ottavia Selvaggio (selvaggio veut dire sauvage) vient compléter cette superbe galerie et nous emporte une nouvelle fois par son style à la précision diabolique et à sa science de la narration. Elle nous fait partager avec finesse la psychologie de ses personnages et éclaire une nouvelle fois ses thèmes de prédilection que sont le matriarcat et la maternité. Et les choix qu'une femme peut être amenée à faire au cours d'une vie, fussent-ils contradictoires. Cela nous vaut de superbes pages sur la relation mère-fille et, plus surprenant mais fort en émotions, une magnifique lettre-confession signée d'un mari qui a accepté de renverser les rôles. Dans la lignée du déjà superbe Liv Maria, voilà une nouvelle preuve du talent de Julia Kerninon dont l'écriture sensuelle trouve ici une nouvelle façon de s'épanouir.


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J'avais quitté Liv Maria émerveillée par le parcours de cette femme hors du commun mise en mots et en musique par Julia Kerninon, je referme Sauvage tout aussi enthousiaste.

Ottavia Selvaggio, notre belle italienne, notre belle romaine, a choisi de marcher sur les pas de son père. Elle a repris le flambeau et est devenue une cuisinière hors pair. Il lui a fallu faire un choix, ou plutôt des choix , amours, travail, voyages, travail, enfants, travail .. et maintenant à la la quarantaine est-ce qu'elle va encore se satisfaire d'être la Reine en sa cuisine? ..
Encore une fois Julia Kerninon brosse le portrait d'une femme qui assume ses choix, qui s'assume , qui parfois hésite mais toujours repart de l'avant. Elle est entourée, aimée mais est-ce suffisant pour la combler et satisfaire son éternelle insatisfaction? Va savoir.

Julia Kerninon a la plume facile, alerte, pas de temps à perdre le client en salle attend son plat. Seule remarque j'ai pris au moins 3 kilos à force de saliver à l'évocation de tous ces plats préparés dans la cuisine d'Ottavia . Ah ne me parler pas de la vie de lectrice !!


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