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Christophe Gaultier (Autre)
EAN : 9791037507150
253 pages
Les Arènes (27/10/2022)
3.99/5   269 notes
Résumé :
Il y a 4 000 ans, Jérusalem était une petite bourgade isolée, perchée sur une ligne de crête entre la Méditerranée et le désert. Aujourd’hui, c’est une agglomération de presque un million d’habitants, qui focalise les regards et attire les visiteurs du monde entier.
Entre-temps, les monothéismes y ont été inventés, les
plus grands conquérants s’en sont emparé, les plus grands empires s’y sont affrontés. Tour à tour égyptienne, perse, juive, grecque, r... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (42) Voir plus Ajouter une critique
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C'est une BD documentaire qui est sortie en 2022 mais qui m'a semblé passé inaperçue. J'en ai entendu parler seulement le mois dernier alors que j'étais de passage à Paris où l'on voyait la couverture en grand sur les affiches publicitaires de certaines stations de métro. Il annonçait un phénomène au déjà 20000 lecteurs.

C'est vrai que cela a suscité ma curiosité. Je ne souhaite jamais passer à côté d'un phénomène en jouant les offusqués du cédage à la mode. Il est toujours bon de savoir pourquoi une oeuvre est lue par le plus grand nombre. Visiblement, dans le cas présent, c'est le bouche à oreille qui explique les bonnes ventes.

A noter également qu'il s'agit de l'une de ces oeuvres qu'on ne peut lire d'une seule traite sous peine de bourrage de crâne et de mal de tête. Il faut lire un chapitre à la fois et espacé dans le temps tant la somme d'informations historiques est importante car les auteurs vont remonter assez loin dans le passé de cette mythique cité antique. Oui, 4000 ans d'histoire nous contemplent !

Pour rappel, Jérusalem est une ville du Proche-Orient qui tient une place centrale dans les religions chrétiennes, juives et arabes. C'est également la capitale de l'état hébreux d'Israël. Il y a peu de temps, cette ville est revenue au coeur de l'actualité avec près de 300 drones et missiles iraniens qui ont failli l'anéantir s'il n'y avait pas eu l'efficace dôme de fer.

Cette ville cosmopolite cristallise véritablement toutes les passions du monde depuis des siècles. C'est à se demander pourquoi. L'histoire racontée dans cette BD (par un olivier) pourra nous fournir toutes les informations utiles et indispensables à notre connaissance. Pour ma part, j'ai mieux compris certaines choses et certains enjeux qui m'avaient totalement échappé.

On se rend compte également que c'est une très riche histoire car la ville a souvent été envahi par des empires étrangers. Il en reste toujours quelque chose malgré les multiples destructions et reconstructions. Gageons que cela soit encore le cas dans le futur malgré les menaces qui planent toujours.
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En fait, Bonaparte n'est jamais venu à Jérusalem.
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Ce tome retrace l'histoire la ville de Jérusalem depuis -1900 jusqu'en 2022. Sa première édition date de 2022. Il a été réalisé par Vincent Lemire pour le texte et le scénario, Christophe Gaultier pour les dessins et Marie Galopin pour les couleurs. Il comprend deux-cent-quarante-cinq pages de bande dessinée. Il s'ouvre avec une carte de Jérusalem aujourd'hui : les différents quartiers, les huit portes (des Lions, Dorée, des Maghrébins, de Sion, de Jaffa, Neuve, de Damas, d'Hérode), ainsi que la ligne de cessez-le-feu de 1949 séparant Jérusalem Ouest et Est. En fin de tome se trouvent deux pages de repères chronologiques pour chacun des dix chapitres, deux pages de ressources et bibliographie (recueils de sources, ressources en lignes, quelques ouvrages cités, ouvrages de synthèse, pour aller plus loin), une page de remerciements, et une page listant les autres ouvrages du scénariste et du dessinateur.

Un olivier salue le lecteur. Il se présente : il s'appelle Zeitoun, ou Olivia, comme on préfère. Il est né il y a environ quatre mille ans, au sommet d'une colline qui porte son nom : le mont des Oliviers. Har Ha-Zeitim en hébreu, Jabal al-Zaytoun en arabe. Derrière lui, le soleil levant, le désert à perte de vue, la mer Morte. Devant lui, Jérusalem, le soleil couchant, la plaine fertile et la Méditerranée. Sur cette ligne de crête, à huit cents mètres d'altitude, entre la terre et le ciel, entre les hommes et les dieux, entre le monde des vivants et le monde des morts. Jérusalem est le point de contact entre tout cela. Au commencement de cette histoire, il n'y avait rien. Enfin, il y avait lui, un noyau craché au sol par un berger qui passait par là. Il a fallu de l'eau, beaucoup d'eau, peut-être même un déluge, un peu de chance et du soleil. Beaucoup de soleil. Depuis quatre mille ans, ses racines se sont enfoncées dans le sol, ses branches se sont élancées haut dans le ciel. Il a tout vu, tout vécu, tout observé.

Pas facile de comprendre comment cette petite ville perdue au milieu des montagnes est devenue le nombril du monde. D'abord, Jérusalem est presque dépourvue d'eau potable. Jusqu'au milieu du 20e siècle, ce sera une vraie contrainte pour son développement. Il y a bien une maigre source, le Gihon, qui coule au pied du mont des Oliviers. C'est autour de ce point d'eau que les premières populations sédentaires se sont installées il y a environ 4000 ans, à l'époque où il est né. Il a alors vu apparaître les premières sépultures, sur le versant oriental du Cédron… et cela n'a jamais cessé depuis. Il est bien placé pour savoir que le climat de Jérusalem est particulièrement rude. Pas une goutte de pluie pendant six mois de l'année, entre avril et octobre. Des hivers rigoureux, des tempêtes de neige, des étés suffocants, des nuits froides, des orages, du vent. Dans la Ville sainte, le ciel se rappelle souvent au bon souvenir des hommes. Et puis, Jérusalem a toujours été située à l'écart des routes commerciales. de fait, Jérusalem est une ville assez inaccessible, on n'y vient pas par hasard.

L'histoire de Jérusalem en bande dessinée contient une double promesse, celle d'un ouvrage sérieux et documenté, et celle d'une lecture plus facile grâce aux dessins. L'auteur a adopté une construction chronologique, depuis -2000 à l'époque contemporaine. Cet exposé est découpé en dix chapitres : Au commencement était le Temple (–2000 à -586), L'ombre des empires (-586 à 312), Genèse de la Jérusalem chrétienne (312-614), Al-Qods, ville sainte de l'Islam (614-1095), le siècle des croisades (1095-1187), L'héritage de Saladin, l'empire des Mamelouks (1187-1516), La paix des Ottomans (1516-1799), La Ville sainte réinventée (1799-1897), le rêve de Sion (1897-1947), L'impossible capitale (1947-…). Ces différentes époques sont racontées au travers de séquences mettant en scène des personnages historiques et de simples citoyens de différentes confessions. L'exposé se fait sous la forme de cellules de texte et de phylactères, comme pour une bande dessinée traditionnelle. Comme il est coutume dans ce genre d'ouvrage historique, l'exposé mène la narration et les dessins y sont assujettis. le registre visuel est de nature réaliste avec un degré de simplification dans le rendu, et de nombreux détails descriptifs pour la reconstitution historique. Comme l'indique le titre, le point de vue choisi se focalise sur l'évolution de la ville, la coexistence des différentes communautés, les alternances de gouvernance, les guerres, les croisades, etc.

Le lecteur constate rapidement qu'il s'agit d'un livre d'histoire d'un genre différent, dans le sens où il ne raconte pas ou il ne reconstitue pas des événements historiques, par exemple il ne détaille pas la destruction du premier Temple ou du second Temple, il ne contextualise pas les conquêtes de Saladin, il ne donne pas le contexte de la guerre des Six Jours. Dans le même ordre idée, il ne fait oeuvre d'aucune manière de prosélytisme pour l'une ou l'autre des religions, ni ne porte de jugement de valeur sur leur credo. L'exposé commence par une contextualisation géographie sur le relief, le climat et l'approvisionnement en eau. Puis il est question des premiers témoignages existants sur cette cité, sur son développement, mêlé à la tradition comme le sacrifice d'Isaac ou la vocation de bâtisseur du roi Salomon fils de David. Viennent ensuite des personnages dont la réalité historique est avérée conquérant Jérusalem ou l'administrant. Une ville conquise puis reconquise, détrônée puis restaurée, détruite puis reconstruite. L'auteur met l'accent sur l'installation des tenants d'une religion puis d'une autre, sur leur cohabitation pacifique, sur les tensions, les massacres, la nature de l'autorité plutôt bienveillante et tolérante, ou au contraire exclusive et persécutrice. La gestion des lieux de culte et des lieux saints occupent une place essentielle dans chaque chapitre : leur préservation, leur gestion, leur accaparation.

Il est vraisemblable que le lecteur soit venu à cet ouvrage parce qu'il s'agit d'une bande dessinée, c'est-à-dire une forme narrative particulière qu'il apprécie ou qui lui semble appropriée à sa sensibilité pour aborder ce sujet complexe et passionnant. Il sait par avance que cette narration visuelle présentera un goût et un rythme très différent de celui d'une bande dessinée d'aventure, quel que soit le genre littéraire. Dans un premier temps, il goûte à l'incarnation du narrateur sous la forme d'un olivier, à la présentation visuelle de la ville, de ses abords, par le biais du survol d'une colombe. Puis il voit bien ce qu'apporte une reconstitution visuelle : montrer une époque au travers des tenues vestimentaires, des accessoires, des ameublements, des rues et des pièces intérieures, et bien sûr les états successifs du développement de la ville. Les limites de l'exercice lui apparaissent tout autant : la densité fluctuante du niveau de détails, les cases attestant d'un manque de matériau source pour représenter l'aspect d'un mur, ou l'aménagement d'une voirie. Pour autant, cela ne retire rien au fait de voir chaque époque, les bâtiments, les individus vivant dans cette ville.

Rapidement, le lecteur prend le rythme : la densité d'informations à chaque page, la mise en scène visuelle. L'artiste fait vivre les personnages aux différentes époques, permettant à ces différentes phases de s'incarner, faisant apparaître la continuité des lieux. Il montre aussi bien des scènes de la vie quotidienne que des moments historiques significatifs, ou encore le regard porté par des voyageurs ayant écrit sur la ville, et des voyageurs connus, écrivains ou généraux, chefs d'état. À quelques reprises, il met en scène un guide commentant un site aux bénéfices de touristes. le lecteur prend progressivement conscience de la coordination entre scénariste et dessinateur, de ce que le premier a confié au second en faisant porter des informations par les visuels. Il retrouve régulièrement cette conscience incarnée dans un olivier plurimillénaire. Il se rend compte que l'auteur a conçu un mode d'exposé qui repose essentiellement sur la parole des individus, par opposition à des sentences ou des explications professorales. Contrairement à ses a priori, le lecteur voit que les dessins dépassent la simple illustration littérale, pour raconter beaucoup dans une interaction pensée spécifiquement pour cet exposé.

Les auteurs tiennent la distance pour retracer les grandes phases de l'évolution de Jérusalem au fil des siècles. Ils font des choix quant à ce qu'ils évoquent, et ce qu'ils laissent de côté, au cours de ces quatre millénaires d'histoire. de séquence en séquence, le lecteur voit se dessiner des thèmes récurrents : les conquêtes de la ville, la prise par les armes, la politique inclusive ou exclusive, l'appropriation et l'accaparation de certains lieux symboliques. Les différents paramètres qui régissent la coexistence pacifique ou antagoniste entre les différentes religions. le deuxième effet est une évidence qui devient concrète : tout n'a pas toujours été comme la situation contemporaine. le troisième effet émerge petit à petit : au fil de l'alternance des gouvernances et la popularité de la Ville sainte en Europe, la façon dont elle est envisagée alterne entre un lieu de résidence pour des pratiquants bien vivants, et une ville abritant des lieux saints devant être préservés, sanctuarisés, comme dans un musée. Et bien sûr, chaque communauté l'instrumentalise pour son propre bénéfice, au gré des siècles.

Un projet déraisonnable : rendre compte du développement, de la vie d'une ville, encore plus ambitieux du fait qu'il s'agit de Jérusalem. Tout ne peut pas tenir dans un tel ouvrage : les auteurs ont fait des choix qui donnent un point de vue à leur approche, ainsi qu'une cohérence thématique tout du long, sans prendre parti, sans prosélytisme. le lecteur voit Jérusalem se développer sous yeux, voit les populations gérer l'importance accordée au lieux saints, cohabiter en bonne intelligence, se combattre, s'exterminer, subir les contingences politiques des empires et des nations. Mission accomplie.
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Vincent Lemire (scénariste) et Christophe Gaultier (dessinateur) on réussi un admirable et formidable tour de force.
Résumer en 256 pages et en dessin 4000 ans d'histoire et d'Histoire.
Nous mettre sous les yeux et en images tout le paradoxe de Jérusalem que l'on peut résumer simplement  : une bourgade ne présentant pas une importance stratégique majeure, dépourvue de ressources naturelles enviables, qui est est devenue le centre névralgique d'un conflit régional aux répercussions mondiales ; et son nom, aujourd'hui prononcé par des millions de personnes dans leurs assemblées liturgiques hebdomadaires, symbolise une espérance eschatologique universelle.

L'histoire de cette ville nous est contée par un olivier. Témoin silencieux....
L'arbre symbole de longévité et d'espérance, l'olivier est réputé éternel. Et c'est lui qui sera dans ce roman graphique notre compagnon de voyage, tout au long de ces ces 4 millénaires, témoin privilégié des vicissitudes de la Ville
Ainsi le décrit Hérodote " L'olivier fut brûlé dans l'incendie du temple par les barbares; mais le lendemain de l'incendie, quand les Athéniens, chargés par le roi d'offrir un sacrifice, montèrent au sanctuaire, ils virent qu'une pousse haute d'une coudée avait jailli du tronc ". Dans tout le bassin méditerranéen, on rencontre des oliviers millénaires, et parfois même réputés pluri-millénaires. Il est le témoin de notre histoire et l'accompagne à chaque instant.
L'olivier symbole de paix et de réconciliation n'est-ce pas le rameau d'olivier qui est choisi par Dieu pour signifier à Noé que le Déluge est fini et que la décrue commence, symbole du pardon.
L'olivier symbole de victoire qui est un cadeau chargé d'une signification gratifiante lors des jeux olympiques à Athènes. Couronne d'olivier et jarres d'huile d'olive sont ainsi offertes aux vainqueurs.
L'olivier symbole de force qui est réputé pour son bois très compact, très lourd et très dur. C'est en bois d'olivier que sont faites les massues d'Hercule et c'est avec un pieu en bois d'olive qu'Ulysse terrasse le Cyclope dans l'Odyssée.
L'olivier symbole de fidélité en effet c'est en bois d'olivier qu'est fait le lit d'Ulysse et Pénélope, lit qui n'accueillera aucun des nombreux prétendants au royaume d'Ithaque, durant les vingt ans d'absence du héros grec.

Et c'est au pied de cet Olivier bien. Protégés de son ombre , que nous retrouvons certains protagonistes de ce roman graphique : Eudoxie, un templier, 3 représentations des religions monothéistes, un turc et un écrivain voyageur...
Julien Gracq écrivait : "Jérusalem, comète historique dont l'histoire se réduit presque à un long sillage enflammé, posée sur sa colline brûlée comme une fusée sur sa rampe de lancement – tant de furie d'éternité dans un si petit corps – ville Pythie, ville épileptique, hoquetant sans trêve de la transe de l'avenir." (Lettrines, mars 1967.)

À la suite de cet exergue Vincent Lemire le disait lui-même : Comment faire l'histoire d'une « ville épileptique » ? Comment faire calmement l'histoire d'une ville écrasée de mémoires, fourbue d'identités, comprimée sous la pression des projections et des projets, broyée par les discours et les stratégies, démembrée par les revendications et les appropriations ? Jérusalem ne s'appartient pas, Jérusalem n'est pas à Jérusalem, Jérusalem est une ville-monde, une ville où le monde entier se donne rendez-vous, périodiquement, pour s'affronter, se confronter, se mesurer.
Berceau partagé des trois récits monothéistes, Jérusalem est observée par le monde entier comme le laboratoire du vivre-ensemble ou de la guerre civile, de la citadinité ou de la haine de l'autre. Depuis quelques années, au gré des combats et des affrontements qui traversent périodiquement la ville, Jérusalem est devenue le théâtre privilégié sur lequel se projettent les dangereux fantasmes des malfaisants forgerons du choc des civilisations.
Julien Gracq, en mars 1967, a parfaitement traduit l'impression accablante qui saisit tout historien raisonnable lorsqu'il s'approche de Jérusalem comme on s'approche d'un cratère en fusion : « comète historique », « long sillage enflammé », « ville Pythie » ou prophétique, qui s'épuise elle-même à conserver le passé le plus ancien et à augurer l'avenir le plus lointain, prise en tension dans un arc chronologique presque infini, de la Genèse à l'Apocalypse. Dans ces conditions, comment proposer une nouvelle histoire de Jérusalem, comment essayer de bâtir une histoire renouvelée d'une ville mille fois racontée, surexposée, exténuée par la conjugaison de récits réputés inconciliables et par la trame d'identités surimposées ?

Et bien, c'est ce remarquable exercice qu'ont réussi les auteurs de cette BD : mettre en image cette histoire millénaire, en renouveler l'approche, la rendre plus lisible plus "simple" à appréhender si tant est que l'on puisse la simplifier.

Les auteurs partent d'un postulat simple et évident :
il faut d'abord partir de ce surprenant paradoxe : Jérusalem est une ville sans histoire. le patrimoine est omniprésent, les vestiges archéologiques sont partout, les mémoires sont tonitruantes, les identités sont assourdissantes, mais l'histoire, au milieu de cette cacophonie hallucinée, est absente. L'histoire comme science humaine et sociale, comme discipline scientifique, comme tentative de confrontation des sources et de conjugaison des points de vue… L'histoire est absente à Jérusalem, ou plutôt elle s'est absentée et laissé ensevelir sous l'amoncellement des mémoires. Jérusalem est un garde-mémoire, pas un lieu d'histoire. Boîte noire universelle, conservatoire mondial des anciennes traditions, on se tourne vers elle pour y rechercher les souvenirs égarés d'un Occident oublieux, pour raffermir les identités lessivées de nos modernes désenchantements, mais rarement pour en connaître véritablement l'histoire.

Une ville sans histoire, donc, asphyxiée par des mémoires qui court-circuitent et brouillent la chronologie : dans la logique mémorielle le temps est compacté, comprimé, replié sur lui-même. La succession des époques et des séquences disparaît pour laisser place à des identités « éternelles », à des conflits « perpétuels » et à des communautés « immuables ». Au travers des 10 chapitres les auteurs font de Jérusalem un véritable objet d'histoire, pour montrer que Jérusalem n'est pas une ville plus « éternelle » qu'une autre et que chacune de ses époques raconte une histoire singulière.

Deuxième paradoxe, peut‐être moins perceptible pour les non-spécialistes : Jérusalem est une ville sans géographie. La géopolitique y est convoquée à tout bout de champ pour tout expliquer, les frontières semblent zébrer en tout sens son territoire, des cartes sont systématiquement exhibées pour illustrer les grands épisodes de son histoire-bataille, mais la géographie comme attention portée à la topographie, au relief, aux contraintes de site et aux potentiels de situation, au climat et aux sols, à l'agencement des quartiers urbains, à leur peuplement, à leurs activités et à leurs interactions… La géographie est absente, masquée par l'omniprésence de l'analyse géopolitique. L'histoire de Jérusalem est généralement racontée sans que les lieux (rues, monuments, collines, vallées, sources, roches, grottes, murailles, cimetières) soient autre chose qu'une carte d'état-major ou qu'un simple décor à usage folklorique ou patrimonial.

Le mot de la fin revient à ce témoin silencieux, pour tirer une conclusion protéiforme
: "À quoi ressemblera ma chère Jérusalem dans cinquante ans, dans cinq cents ans ?
J'ai assez de recul pour n'avoir aucune certitude...
Son histoire a si souvent bifurqué... Elle a si souvent été conquise puis reconquise, détrônée puis restaurée, détruite puis reconstruite... Je peux seulement partager avec vous quelques-uns des scénarios possibles...

Une ville-musée transformée en parc d'attractions, un Bible-Land rétro-futuriste, avec aéroports, téléphériques, aérotrains et réalité augmentée, dans laquelle chaque pèlerin, grâce à ses lunettes 3D, pourrait visiter les monuments correspondant à ses propres dogmes ou fantasmes religieux...?

Une ville internationale, une capitale universelle neutralisée, sans passé ni passif, sans odeur ni sa eu, qui accueillerait le nouveau siège de l'ONU sur le mont des Oliviers et que n'appartiendrait à aucun état en particulier, comme l'Antarctique, la Lune ou la planète Mars....?

Une ville théocratique dans laquelle les religieux auraient accaparé le pouvoir, expulsé les laïcs, construit le Troisième Temple et éradiqué toute trace de culture profane, dans l'espoir fiévreux d'un signe du Messie...?

Un désert post-apocalyptique, une ville en ruines, une nouvelle fois détruite par la foule des hommes..et une nouvelle, en attente de sa propre résurrection...?

Une capitale pour des états confédérés, une ville partagée mais non divisé, avec des institutions israéliennes à l'ouest, des institutions palestiniennes à l'est... Et, au centre de la ville, une municipalité commune, élue par tous les habitants, qui prendrait en charge les besoins de chaque citadin et les aspirations de chaque visiteur, quelles que soient sa religion et sa nationalité...? "

A moins que ce mot de la fin ne revienne à Meron Benvenisti (ancien maire de la ville) : L'histoire de Jérusalem s'apparente à une gigantesque carrière d'où chaque camp extrait des pierres pour la construction de ses mythes et pour les jeter sur l'adversaire.
Au gré des luttes territoriales et des espoirs politiques, la mémoire des morts et l'histoire des vivants se dévorent ainsi l'une et l'autre. Toujours plus nombreux à Jérusalem, les morts pourront-ils accepter de laisser la place aux vivants, pour les laisser écrire le nouveau chapitre d'une histoire partagée ? En tout cas voilà une ville qui ne finira par de soulever plus de questions que d'apporter des réponses...
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Cet ouvrage de Vincent Lemire est dense et le tout paraît important. Par quel biais l'aborder ? Après mures réflexions, j'ai décidé de plus particulièrement parler du dôme du rocher qui est un symbole monumental de la ville et des trois religions monothéistes.

L'histoire de Jérusalem nous est contée par un olivier de 4000 ans qui domine la ville sur le mont des oliviers. Jérusalem est situé sur la colline de l'Ophel ou mont du Temple entouré de deux collines. A l'Est, le mont des Oliviers. C'est sur cette colline que se déroulera le jugement dernier. A l'Ouest la colline de Sion. C'est elle qui a donné son nom au sionisme.

Sous le dôme du rocher, une pierre Fondatrice des trois religions monothéistes, celle sur laquelle Abraham s'apprêtait à immoler Isaac avant l'intervention de l'ange du Seigneur.

D'après le Livre des Rois, le roi Salomon, fils de David fit construire le temple destiné à vénérer le Dieu des Juifs. La centralisation du culte monothéiste à Jérusalem marque un tournant majeur : le temple sanctifié, profané, restauré, dupliqué, détruit, reconstruit … sera désormais le pivot de l'histoire de la ville.

Abd Al-Malik fait construire entre 680 et 692 le dôme du Rocher. Aujourd'hui c'est l'emblème de Jérusalem et le plus ancien monument islamique conservé au monde. Ni mausolée, ni mosquée, sa signification échappait souvent aux pèlerins, qui le confondent parfois avec l'ancien temple de Salomon. Son architecture est d'inspiration byzantine avec des influences perses. Un large dôme de vingt-cinq mètres de haut, des chapiteaux corinthiens, des mosaïques à fond d'or. le bâtiment vise d'abord à honorer la mémoire d'Abraham, cité soixante-neuf fois dans le coran. C'est sur ce rocher que Dieu lui aurait demandé de sacrifier son fils.

Urbain II déclare :
― Arrachez la terre sainte des mains de ces peuples abominables. Vous dessinerez la croix du Seigneur sur votre dos. Allez au combat et tous ceux qui mourront en route ou au combat, la rémission des péchés leur sera accordée ! le 7 juin 1099, mille croisés atteignent Jérusalem. le dôme du rocher, rebaptisé « temple du Seigneur », est surmonté d'une croix monumentale. Une contre-croisade est lancée par Saladin maître de l'Egypte. Les croisés sont vaincus. C'est un djihad. Il y en aura d'autres … Jérusalem vivra encore un millénaire d'affrontements.

Vincent Lemire sait de quoi il parle. Il est historien. Il a mis cinq ans à la rédaction de son scénario pour cette BD. Au fil des pages, le lecteur peut constater que ses descriptions reposent sur de nombreux auteurs qui ont écrit des pages d'histoire de la ville. Il s'est considérablement documenté.

Avant d'entamer la rédaction de la chronique, j'ai tenu à regarder sur Arte : « Les coulisses de l'histoire : Israël. ». Ce document cinématographique parle des années avant la proclamation de l'Etat d'Israël, c'est-à-dire celles sous mandat Britannique. le document déborde sur les années qui suivent la proclamation aux Nations-Unies à New York. Les résultats du vote tombent. Les arabes font grise mine, ils auraient préféré que la partition ne soit pas votée, que les juifs reste dans leurs pays d'origine. Ils entrent en guette contre une nouvelle nation sans armes. Golda Meir voyage dans différents pays pour récolter des fonds en vue e s'équiper en armement. Elle arrive à récolter le double des fonds espérés principalement soutenu par les sionistes américains. Des armes achetées sont importées de Tchécoslovaquie et chargées dans des camions ou le matériel est caché par une couche d'oignons. Armé, Israël repousse les arabes.

Les mandataires britanniques bloquent le quota d'immigrés. Ils veulent ménager les pays arabes producteurs de pétroles. Ils capture les immigrés des bateaux arrivant à Haïfa. Ces juifs immigrés sont mis en cage pour un voyage dans un camp d'internement à Chypre.

Dans le livre : « Les aventures extraordinaire d'un juif révolutionnaire », j'avais déjà lu à quel point les Israéliens ne pouvaient avoir que de la haine envers l'occupant britannique tant ceux-ci avaient un comportement odieux.

Cette BD de Vincent Lemire m'a rafraîchi la mémoire sur certaines données que le temps efface mais m'a également beaucoup appris. C'est avec grand intérêt que je le recompulserai dans le futur.
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J'ai eu un énorme coup de coeur pour ce roman graphique qui raconte l'histoire de Jérusalem des origines à nos jours. C'est après avoir vu l'auteur dans une émission de télévision où il parlait brillamment et modestement de l'histoire de la ville (C ce soir) que j'ai eu envie de m'offrir ce livre et je ne l'ai pas regretté. Il faut toutefois juste préciser une chose, c'est un vrai livre d'histoire. L'auteur est agrégé, docteur, chercheur, professeur à l'université. C'est un puit de science sur le sujet et le livre est très précis, très rigoureux. C'est tout simplement un livre d'histoire presque universitaire illustré. Pas vraiment donc le livre à offrir à un-e adolescent.e pour s'initier à l'histoire du Proche-Orient ( du moins est-ce mon impression ). le livre aborde même l'histoire de l'archéologie, des sources, c'est très fort sur le plan de l'histoire urbaine. Pour ce qui est de l'aspect graphique, j'ai été séduit par la sobriété et l'élégance de l'ensemble. Deux derniers points : le livre est très équilibré entre les différentes périodes historiques, et la partie contemporaine n'est pas si développée que cela. Enfin le livre est très nuancé, très subtil, si vous cherchez une histoire caricaturale dans un sens ou dans l'autre, passez votre chemin, car vous seriez déçu. C'est en tout cas la première fois que je lis un livre d'un tel niveau sous cette forme. Chapeau ! Vincent Lemire dit avoir passé 5 ans à y réfléchir, et le moins que l'on puisse dire c'est que vous n'aurez pas l'impression de lire un ouvrage bâclé...
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critiques presse (4)
Bibliobs
27 décembre 2023
Signé de l’historien Vincent Lemire et du dessinateur Christophe Gaultier, l’ouvrage, sorti fin 2022, propose une plongée lumineuse et rigoureuse de 250 pages pour comprendre les racines du conflit israélo-palestinien.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
NonFiction
07 mars 2023
Jérusalem évoque à la fois le berceau des grandes religions mais aussi un conflit d’identité qui semble indépassable. Son histoire est retracée dans cette bande dessinée ambitieuse et réussie.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Sceneario
16 février 2023
Ne soyez pas effrayés par la pagination, ni par la complexité du sujet, vous adhèrerez très vite au travail des deux auteurs et découvrirez les différentes phases d’occupation de Jérusalem, l’histoire des monuments emblématiques de la ville, et vous serez surpris par les différentes périodes durant lesquelles la cohabitation entre les trois grandes religions monothéistes fut de mise.
Lire la critique sur le site : Sceneario
ActuaBD
30 décembre 2022
Accessible tout en restant précise et rigoureuse, cette toute première histoire de Jérusalem en BD s’adresse autant aux simples curieux qu’aux amateurs d’histoire plus confirmés. Il faut espérer que d’autres histoires de ville aussi bien menées verront prochainement le jour chez Les Arènes BD !
Lire la critique sur le site : ActuaBD
Citations et extraits (46) Voir plus Ajouter une citation
Ce n'est pas la première fois qu'un récit légendaire détourne le trajet d'un grand conquérant pour le faire passer par Jérusalem... comme si cette onction symbolique forgeait les destins hors du commun...
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Pas facile de comprendre comment cette petite ville perdue au milieu des montagnes est devenue le nombril du monde. D’abord, Jérusalem est presque dépourvue d’eau potable. Jusqu’au milieu du 20e siècle, ce sera une vraie contrainte pour son développement. Il y a bien une maigre source, le Gihon, qui coule au pied du mont des Oliviers. C’est autour de ce point d’eau que les premières populations sédentaires se sont installées il y a environ 4000 ans, à l’époque où je suis né. J’ai alors vu apparaître les premières sépultures, sur le versant oriental du Cédron… et cela n’a jamais cessé depuis. Je suis bien placé pour savoir que le climat de Jérusalem est particulièrement rude. Pas une goutte de pluie pendant six mois de l’année, entre avril et octobre. Des hivers rigoureux, des tempêtes de neige, des étés suffocants, des nuits froides, des orages, du vent. Dans la Ville sainte, le ciel se rappelle souvent au bon souvenir des hommes. Et puis, Jérusalem a toujours été située à l’écart des routes commerciales. Il suffit de regarder une carte, ou de demander à mes amis les oiseaux. Les marchands passent plus au sud, dans le désert du Néguev, pour commercer entre la péninsule arabique, l’Égypte, via le Sinaï. D’autres routes passent plus à l’est, dans la vallée du Jourdain, entre l’Anatolie et la mer Rouge. Où plus à l’ouest dans la plaine littorale. De fait, Jérusalem est une ville assez inaccessible, on n’y vient pas par hasard. Dans ce relief accidenté, trois collines dominent. À l’est, le mont des Oliviers. Dans les traditions monothéistes, c’est sur cette colline que se déroulera le jugement dernier Yom HaDin en hébreu, Yawm ad-Dyn en arabe. Le jour des comptes. Au centre, la colline de l’Ophel. Une acropole qui était déjà un sanctuaire à l’époque pré-biblique. Aujourd’hui on l’appelle Haram ad-Sharif ou mont du Temple. À l’ouest, la colline de Sion, tantôt intégrée aux murailles, tantôt à l’extérieur, comme c’est le cas aujourd’hui. C’est elle qui a donné son nom au sionisme. Ces trois collines sont séparées par trois vallées profondes. La vallée du Cédron, à l’est, sépare la ville du mont des Oliviers ; elle abrite la source du Gihon. La vallée du Tyropéon, au centre, moins profonde, coupe la ville intra-muros en deux. Et elle a donné son nom à l’actuelle rue al-Wad, la vallée en arabe. La vallée du Hinnom, à l’ouest, très encaissée, rejoint les deux autres vallées en contrebas du village de Silwan, au niveau du puits de Job. Au Moyen-Âge, on y avait creusé un énorme bassin pour abreuver les troupeaux, le bassin du Sultan. Aujourd’hui, c’est une salle de concert en plein air. Imaginez un paysan qui puise de l’eau dans le puits de Job pour arroser un arbre au sommet du mont des Oliviers. Il doit gravir deux cents mètres de dénivelé pour à peine un kilomètre de distance ! C’est sûr qu’on n’est jamais venu ici pour faire fortune dans l’agriculture. La roche calcaire affleure presque partout, les sols sont minces, la terre dévale les pentes au premier orage, il faut la retenir avec des terrasses en pierres, que les hommes reconstruisent obstinément depuis des millénaires. Cette roche est percée d’une multitude d’alvéoles et de grottes, dont les habitants de Jérusalem ont toujours fait des nécropoles, des sanctuaires ou des citernes, après les avoir exploités en carrière… un vrai gruyère ! mes racines savent bien que la ville souterraine est aussi importante que la ville en surface : c’est là que sont conservés les morts, les vestiges, les traditions… et l’eau potable. Une dernière chose pour compléter ce tableau idyllique : Jérusalem est située sur la ligne de faille du grand Rift, qui sépare les plaques tectoniques de l’Afrique, de l’Arabie et de l’Eurasie. Vers l’Est, la ville domine le fossé jordanien, le point le plus bas du globe. Les tremblements de terre sont fréquents, destructeurs et meurtriers.
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Les identités religieuses ne sont jamais étanches, surtout à Jérusalem, où les traditions circulent intensément entre les communautés… et la conquête musulmane n’a fait qu’amplifier ce brassage. Le monument le plus célèbre de la ville sainte et là pour en témoigner. – On reste bien groupés ! Si on se perd, rendez-vous au car à midi ! Mu’Awiya, le fondateur de la dynastie Omeyade, s’est fait proclamer calife à Jérusalem en 661. Abd al-Malik, un de ses glorieux successeurs, a fait de même en 85. Entre 688 et 692, il a fait construire le dôme du rocher ; aujourd’hui, c’est l’emblème de Jérusalem, et le plus ancien monument islamique conservé au monde. Pas facile d’interpréter sa symbolique. Ni mausolée, ni mosquée, sa signification échappait souvent aux pèlerins, qui le confondaient parfois avec l’ancien temple de Salomon. D’autant plus qu’à l’époque Omeyade, dix Juifs et dis Chrétiens s’occupaient de son entretien, aux côtés des employés musulmans. Son architecture est d’inspiration byzantine, avec des influences perses. Un large dôme de 25 mètres de haut, des chapiteaux corinthiens, des mosaïques à fond d’or. Le bâtiment vise d’abord à honorer la mémoire d’Abraham, Ibrahim en arabe, cité soixante-neuf fois dans le Coran. C’est sur ce rocher que Dieu lui aurait demandé de sacrifier son fils. C’est donc un message qui parle aux gens du Livre, et aux Juifs en particulier. Mais, si on déchiffre les inscriptions, on découvre que le monument s’adresse aussi aux Chrétiens. Pour ça, il faut se replacer dans le contexte de l’époque. À la fin de 7e siècle, c’est Abd al-Malik qui compile la première version officielle du Coran dont il dicte des passages entiers à ses ouvriers.
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À quoi ressemblera ma chère Jérusalem dans cinquante ans, dans cinq cents ans ? J’ai assez de recul pour n’avoir aucune certitude. Son histoire a si souvent bifurqué… Elle a si souvent été conquise puis reconquise, détrônée puis restaurée, détruite puis reconstruite. Je peux seulement partager avec vous quelques-uns des scénarios possibles. Une ville internationale, une capitale universelle neutralisée, sans passé ni passif sans odeur ni saveur, qui accueillerait le siège de l’ONU sur le mont des Oliviers et qui n’appartiendrait à aucun État en particulier, comme l’Antarctique, la Lune ou la planète Mars ? Une ville-musée transformée en parc d’attractions, un Bible-land rétro-futuriste, avec aéroports, téléphériques, aérotrains et réalité augmentée, dans laquelle chaque pèlerin, grâce à ses lunettes 3D, pourrait visiter les monuments correspondant à ses propres dogmes ou fantasmes religieux ? Une ville théocratique dans laquelle les religieux auraient accaparé le pouvoir, expulsé les laïcs, construit le Troisième Temple, et éradiqué toute trace de culture profane, dans l’espoir fiévreux d’un signe du Messie ? Un désert post-apocalyptique, une ville en ruines, une nouvelle fois détruite par la folie des hommes, et, une nouvelle dois, en attente de sa propre résurrection ? Une capitale pour deux États confédérés, une ville partagée mais non divisée, avec des institutions israéliennes à l’ouest, des institutions palestiniennes à l’est… et au centre de la ville, une municipalité commune, élue par tous les habitants, qui prendrait en charge les besoins de chaque citadin et les aspirations de chaque visiteur, quelles que soient sa religion et sa nationalité ? Olivia et moi, on croit savoir dans quelle ville on aimerait grandir. Et vous ?
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Finalement, la Jérusalem hasmonéenne est une ville composite, pleine de contradictions. D’un côté, les traditions juives ancestrales se codifient avec la fixation de la Bible en hébraïque, qui pourtant par sa traduction en grec, dans le cadre d’une hellénisation culturelle qui se poursuit. À l’est de la ville, le Temple est agrandi et embelli, il attire chaque année des milliers de pèlerins. Vers l’ouest, de somptueuses villas de style grec sont construites sur les hauteurs du mont Sion. Le mot Judaïsme apparaît à cette époque, pour désigner une stricte observance religieuse et se distinguer des traditions grecques. Mais au même moment, en -104, Aristobule Ier, roi de Judée, prend le surnom de Philhellène et le titre grec de Basileus. Pour obéir aux interdits religieux, les représentations humaines et animales disparaissent sur les monnaies hasmonéennes, qui s’ornent cependant de motifs typiquement grecs, comme l’ancre séleucide ou le laurier, emblème de Zeus et d’Apollon. Ces processus contradictoires coexistent au sein de la société urbaine de Jérusalem. La dynastie hasmonéenne navigue entre ces différentes influences, mais ses héritiers se déchirent. Le royaume résiste aux menaces de l’Égypte ptolémaïque (au sud) et des séleucides (à l’est), mais la puissance de Rome ne cesse de grandir à l’ouest. En -63, pour mettre fin aux guerres fratricides des Hasmonéens, le général romain Pompée s’empare de Jérusalem, après avoir conquis la Grèce et l’Anatolie. En -40, un jeune potentat local profite de ces désordres pour se faire proclamer roi de la Judée par le Sénat romain : Hérode. Né d’une mère arabe et d’un père iduméen, fraîchement converti au judaïsme ; Hérode entre à Jérusalem en -37, extermine les prêtres et les derniers Hasmonéens. Sous son règne, Jérusalem connaît une prospérité inégalée.
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