Cette uchronie aurait pu aussi s'appeler "Le jour où le tailleur rose Chanel de Jackie ne reçu pas la cervelle de John Kennedy"…
Titre sans doute non retenu car trop long. Trop gore aussi… Pas une bonne pub pour les tailleurs Channel, ni pour les décapotables.
À propos de capote, il semblerait que JFK était un chaud lapin qui tirait très souvent son coup (sauf que le dernier tir fut pour Lee Harvey Oswald – ok, je sors).
L'a-t-il fait plus souvent qu'un certain DSK, ça, l'Histoire ne le dit pas car on n'a pas compté les tirs.
Pour revenir aux choses sérieuses, le titre en V.O était bien trouvé car mystérieux (Trois balles – Celle qui l'a manqué, celle qui l'a tuée et celle qui a changé le monde).
Le portrait de JFK est sans paillettes et loin de ce que j'ai toujours entendu depuis que je suis gosse : Kennedy, le gendre idéal, parfait, le bô gosse, le jeune président, le sourire ravageur.
Les médias nous ont vendu un homme qui n'existait pas, on nous a fabriqué une légende, dressé un portrait flatteur de JFK et passé sous silence ses défauts, ses manies, ses erreurs, ses amitiés avec la mafia, les magouilles de son élection.
Dans cette uchronie, on part du principe que JFK n'a pas été abattu à Dallas, le 22/11/63… Qu'est-ce qu'il se serait passé ensuite, si John avait pu travailler à sa réélection ? Vous avez 432 pages pour y répondre.
Mêlant habillement la politique de l'époque, les personnages réels et ceux de fiction, cette dystopie nous montre un JFK tel qu'il était et nous sommes loin de la légende qu'on nous a fait bouffer durant des décennies.
Le portrait réel de John n'est pas flatteur et on a même envie d'aller le classer parmi les présidents les plus catastrophiques alors qu'on aurait eu envie, avant, de le mettre parmi les meilleurs.
Propagande, quand tu nous manipules et qu'on te croit sur parole.
Mais
Ellory ne se contente pas de nous montrer les coulisses du pouvoir et de la chambre, il propulse aussi Mitchell Newman, un pauvre journaliste raté, dans une enquête sur un événement qu'il semble avoir eu lieu à Dallas, au moment où Kennedy traversait Dealey Plaza dans sa Ford Continentale décapotable.
Ce n'est pas lui qui avait soulevé le lièvre, mais son ex-petite amie, que l'on vient de retrouver suicidée (alors qu'elle avait un chat !) et dont la police est venue chercher tous ses papiers de journaliste. Louche, très louche.
Newman va devenir un nouvel homme (son nom était-il prédestiné ?) en se lançant sur l'enquête, commençant à sortir de sa léthargie, de son laisser-aller, de son apitoiement sur lui-même et ce qu'il va découvrir, sur l'enquête et sur lui-même, va le changer. Et il va hériter d'un chat.
L'équilibre est bien respecté entre le côté politique et celui de l'enquête de Mitch, qui est parti de quasi rien et à tout de même remonté une fameuse piste, sans jamais rien lâcher, emmerdant tout le monde dans cette quête qu'il n'accomplit que pour tenter de se racheter, tant il s'en veut encore d'être pari en Corée, laissant sa copine seule.
Il n'a manqué qu'une chose dans le roman : des émotions.
Ellory m'a habitué à des émotions dans ses romans, certains m'ayant même foutu le coeur en vrac, mais ici, j'en ai moins ressenti, n'arrivant pas à m'attacher à Mitch, le trouvant un peu trop pathétique de vouloir effacer sa faute du passé en se rachetant aux yeux d'une morte.
Maintenant, ce n'est pas parce que je n'ai pas ressenti des émotions qu'il n'y en avait pas, juste que je suis restée de marbre face à elles.
Une uchronie bien ficelée, qui nous montre l'envers du décor, l'envers de la légende et croyez-moi, elle n'était pas reluisante, la légende de JFK, ni celle de sa famille.
Le roman nous montre un président accro aux médocs, à la santé chancelante, aux appétits sexuels gargantuesques et un homme qui ne tenait pas si bien la barre du pays qu'on a voulu nous faire croire.
Ellory n'a pas choisi la facilité en revisitant un événement marquant du siècle dernier, cette scène d'un président qui s'écroule et de son épouse qui fiche le camp (j'aurais fait pareil), de ces images qui furent diffusées des milliers de fois.
En s'affranchissant de cet assassinat qui fit couler beaucoup d'encre et dont on ne saura jamais le fin mot, l'auteur développe un autre roman, une autre histoire, comme le fit
Stephen King, mais d'une autre manière.
Le sujet n'était pas facile, il était glissant mais
Ellory tire son épingle du jeu dans cet univers de l'uchronie et nous propose un roman qu'il est difficile de lâcher, même si, comme je l'ai dit, je n'ai pas ressenti des émotions.
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