Présentation du roman "Les golondrinas ou les 3 soeurs d'Alméria" par son auteur Denis Nunez
Réalisation Editions l'Harmattan
Le silence n'est jamais seul, il règne en maître et décide du moment où il délivre la musique étrange du vent dans les arbres, parfois douce, parfois violente comme le bruit d'une averse naissante ; de temps en temps, il laisse passer le sifflement lugubre d'une buse invisible ou le cri éraillé d'un canard coléreux.
(p. 62)
Qui n'a jamais pleuré en entendant une foule chanter à l'unisson ?
(p. 116)
C’était ça aussi notre Algérie, une réalité translucide, sucrée et irisée, pleine de bulles d’air comme le caramel des piroulis de la bonbonnière.
Un tissage méticuleux de ciel et de nuages donne à la fin de journée une atmosphère oxydée que l’on ne peut décrire tant elle varie à mesure que le tisserand empile sur les lisses des fils dont les couleurs grises et roses changent à la lumière tombante du soleil.
Mon oncle, père de quatre enfants, qui possédaient chacun une bicyclette, avait mis au point un astucieux stratagème pour leur faire croire que le Père Noël leur apportait un nouveau vélo chaque année. Comme par enchantement, tous les vélos disparaissaient vers le début décembre. Ils se retrouvaient chez nous, dans le magasin de matériel. Là, mon oncle révisait chaque engin et les repeignait entièrement de façon à ce que chacun de mes cousins trouve, le matin de Noël, un nouveau vélo, plus grand, plus brillant, plus beau que celui qu'il avait utilisé pendant l'année écoulée.
p. 105
Éléonore avait grandi dans cet esprit de révolte et de rébellion. Son esprit critique encouragé par l’éducation de ses parents, sa mère était également institutrice, s’affirma tout au long de sa scolarité au grand désespoir de certains de ses enseignants, tandis que d’autres s’émerveillaient de sa maturité et d’un sens de l’à-propos dévastateur.
(p. 33)
Un riff de guitare venu de loin occupe l'espace s'élargissant jusqu'à combler le moindre interstice. Il tourne sur lui-même comme un mantra.
(pp. 29-30)
Le grand chêne, à mesure qu’il avance en âge, craint l’arrivée de l’automne, peureux de ne pas retrouver ses feuilles au printemps.
[…] il ne se satisfera jamais d'un système inique excluant les déviants, fussent-ils des rejetons de la classe dominante.
(p. 106)
Nous sommes passés au travers du printemps de mai, sans nous soucier de ce qui agitait le pays. Trop jeunes, peut-être. Il faut dire aussi qu'à Bourges, l'encéphalogramme de la ville est resté plat comme d'habitude. En y repensant, je dirai que nous avons créé notre révolution à nous. Profitant de la fermeture du lycée, nous restions des journées entières à parler, parler, parler. Sans la contrainte du temps minuté des emplois du temps, des repas familiaux, des heures de rentrée obligatoires. Finalement c'est cela que je retiendrai de cette période agitée, le temps libre. Le temps defaire ce que nous avions envie de faire.