Faveur
Petits signes de peur favorite…
Une voix crie…
Qui es-tu, masque et habit
De charogne, ou harmonie sémite ?
Autour de moi les tableaux telles des pages
D'un livre noir de mers.
En moi tu navigues, et sur le ciel
Aux yeux de tanagra amers.
Le soleil mord... Frère, le pied
Fond sur l'asphalte.
Je pleure et jette dans l'air blanc
La mémoire vers la limpidité.
(p. 48)
Le mystère banal des jardins
Où marchent édens et calices
Je n'ose le savoir,
Je me tairai, la main sur le regard.
(p. 31)
Et comme les pélicans gardent la nourriture
Dans le jabot pour leurs nouveau-nés
Ainsi la divinité tient sur sa langue
Cette macération de larmes joyeuses.
Tu la recevras à l'heure où ton vouloir d'aimer
Sera plus fort que ta nuit.
(p. 63)
MAÎTRE DE LA FATIGUE
Le papier sur lequel j'écris
Sent la saucisse,
La ville où je vis sent le cadavre,
Le peuple sent la suif,
Le triomphe sent la détresse.
Où aller, où mettre ma tête ?
Sur la pierre de l'anachorète,
Sur les genoux des chevaliers errants,
Dans ton sommeil,
Sur le ventre du chevreuil,
Dans ta matrice.
(p. 55)
Quiétude
Furoncle mûri, désir, à travers moi c'est la brise
Et tu me mords suavement.
Le jour se trouve doux de sang et de crachats,
Le printemps laisse en moi sa gorge guillotinée.
La vie m'attise d'effrois venus du Sud.
Le verbe me manque, mais j'essaye d'aimer.
La hache oublie la guerre dans un orme nu
Qui se prépare à la fuite.
(p. 79)
Voyez-vous ma vie est incurable
Pour un rien, une guimauve,
Une édulcorée danse noire.
Si Dieu me prête une autre vie
Je saurai mieux mourir.
Je peux dire que la vie verrouillée
En mes yeux se fait
La chair même du miel.
(p. 26)
Le divin est à ta portée dans la muraille
Sous forme de pierres et aux ailes écaillées.
Dans les angles des portes
Ta voix appelle les morts à ce repas.
(p. 30)
ÉCRITURE
Entrer dans les lignes des rochers,
Ainsi je rêve dans les matins qui me suivent.
À travers l'étain, je descends du cauchemar dans les miettes
Des voix porteuses des cryptes et rives.
Utopie vierge par où je conjure
Le secret de la pierre à vivre.
La main éloigne de mon visage le brouillard
Et révèle dans la chair une trismégiste écriture.
(p. 43)
Mère oublie dans la pâte une larme
Qui doux y met le sel.
(p. 60)