Quand vous êtes en arrêt maladie et accidenté, vous n'avez pas d'autre choix que de taper aux portes des assurances, de votre mutuelle ou de la Sécurité sociale. Je ne me plains pas, au contraire. En vivant cette maladie, j'ai pu me rendre compte de la chance que nous avons d'être si bien protégés et pris en charge dans notre pays.
N'ayant pas de progéniture, je leur apporte tout l'amour d'un tonton poule. Ils m'en sont reconnaissants, me couvrant de câlins et de bisous magiques, remplissant mes tiroirs de leurs chefs-d'œuvre encore loin de Picasso, même si les couleurs y sont.
Cette épreuve au mitan de ma vie m'aura beaucoup appris sur moi-même, sur l'être humain parfois aussi bon que méchant, sur la patience, sur l'espoir qu'il faut toujours garder au plus profond de soi, sur l'implication salvatrice des soignants et leur courage, sur le handicap qui brouille la vue des relations et sur la fragilité de l'existence.
Alerter, masser et défibriller. Voilà les trois mots magiques qui m'ont sauvé la vie.
La vie est un fil fragile sur lequel nous marchons parfois de manière insouciante. C’est lorsque ce fil se rompt ou se tord que nous prenons conscience de sa fragilité.
Être jeune avec un défibrillateur oblige à répéter votre histoire, revivant à chaque fois votre traumatisme. Dès que je commence à l’oublier, je dois m’expliquer sur le pourquoi, je dois me tenir à distance des champs électromagnétiques, des vibrations d’un marteau-piqueur, de lignes à haute tension… J’avoue que c’est assez désagréable de devoir se justifier encore et encore, alors que je fais tout pour le dissimuler.
Mettre mes maux en mots me permet de tenir à distance mon chagrin et mes angoisses.
À la manière d’un journal intime, j’exhume les souvenirs douloureux de mon passé. Ma relation ambiguë avec ce cœur bancal, ancré jusque dans mes gènes, s’apaise peu à peu, devenant ainsi moins injuste.