Il m'a fallu deux lectures pour bien m'imprégner du climat de ce roman graphique car à la fin de la première j'avais le sentiment de n'avoir pas compris toutes les subtilités du scénario. Les illustrations m'ont profondément impressionnée par la rudesse des traits, la noirceur de l'ambiance, ces visages dessinés à coup de serpe crayon, expressifs, des tons gris, noir, jaunasses tout en dégradés, délavés....
Je reprends le lendemain l'ouvrage pour une deuxième lecture m'attachant plus à la narration et aux dialogues, au fond de l'histoire et là je prends une claque, car je m'étais totalement fourvoyée. Je ne veux rien dévoiler ( car je n'aime qu'on me dévoile la fin d'un récit alors je l'applique également) mais ce qu'il en sort c'est une vision d'événements totalement fausse, ne jamais se fier aux apparences, la confiance est parfois mal placée.
Dans ce village de l'Aude en 1864, coupé du monde, isolé, dévasté par le choléra dans le passé, le maire, comme dans beaucoup de communes, est une figure marquante, respectée et quand il décède il faut trouver des volontaires pour parcourir le chemin à flanc de montagnes afin que le curé puisse le bénir avant de le porter en terre. Peu de volontaires, il faut dire que le choléra a décimé les habitants, et puis il y a à faire, les moissons etc... mais tout de même, c'est le maire et il faut lui rendre ce dernier service pour tout ce qu'il a donné à la commune.
Comme dans tous ces petits villages il y a des jalousies, de la haine parfois (sans toujours en connaître l'origine), des préjugés. On s'aime ou on se déteste sans trop savoir pourquoi et il suffit parfois de peu de choses pour se découvrir sous un autre jour.
Et le chemin va être long et rude, les éléments vont être contre eux : orage, pluie, faune, nuit et puis le cercueil est lourd, les odeurs se répandent..... Les quatre hommes porteurs vont en profiter pour régler certains comptes, avouer certaines choses. Motus, le muet, lui ne dit rien mais écoute et va devenir la voix de la vérité.....
J'ai eu un peu de mal à me situer par rapport aux différents personnages, familles ainsi que les événements dont il est question, d'où la nécessité de la deuxième lecture, reprendre la chronologie des faits, mais au final quand on saisit le sens et la "morale" de cet procession funèbre, on est glacé.
Ce n'est pas mon style d'illustrations préféré mais elles sont tout à fait en adéquation avec l'histoire, le thème. Elles rendent tout à fait le climat de l'histoire, la rudesse des situations.
J'aime (je le dis et le redis) quand un ou des auteurs m'emmène sur un chemin et bifurquent vers un autre. Je n'ai pu m'empêcher de penser à La Loterie que j'avais lu il y a quelques temps....
Merci à ma bibliothèque de l'avoir mis en avant car de moi-même je ne sais pas si je l'aurai lu. Charogne, le titre résume au final totalement ce roman graphique !
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