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Citation de Aym


Aym
20 février 2014
Le coeur du West-End abrite de nombreuses petites rues calmes, inconnues de presque tous, sauf des chauffeurs de taxis qui les traversent avec facilité, et arrivent à Park Lane, Barkeley Square ou South Audley Street.

Si, en venant du parc, vous tournez dans une ruelle sans prétention, et tournez à nouveau une ou deux fois, à gauche puis à droite, vous aboutirez dans une rue tranquille, où se dresse l’hôtel Bertram. L’hôtel Bertram se trouve là depuis longtemps. Durant la guerre, les maisons sur sa droite furent démolies, ainsi que celles, un peu plus loin, sur sa gauche, mais le Bertram fut épargné. Toutefois, il ne put éviter d’être meurtri et marqué de cicatrices (comme diraient les agents immobiliers), mais grâce à une somme d’argent raisonnable, il fut restauré et reprit son aspect original. En 1955, il était précisément le même qu’en 1939, imposant sans ostentation et discrètement coûteux.

La clientèle du Bertram se recrutait, depuis toujours, dans la hiérarchie ecclésiastique, parmi les ladies douairières de l’aristocratie, arrivant de la campagne et les jeunes filles qui, sortant d’institutions coûteuses, retournaient chez leurs parents pour les vacances. « Il y a si peu d’endroits où une jeune fille seule soit en sécurité à Londres, mais bien sûr, le Bertram est tout à fait convenable, nous y sommes allées durant des années. »

Il avait existé naturellement beaucoup d’autres hôtels du même genre que le Bertram. Certains subsistaient encore, mais presque tous avaient été victimes des bouleversements sociaux d’après-guerre.
Il leur fallut obligatoirement se moderniser, s’adapter à une nouvelle sorte de clientèle. Le Bertram aussi avait dû changer, mais cela avait été fait d’une manière tellement habile qu’on ne le remarquait absolument pas au premier coup d’oeil.

Au pied des escaliers, menant aux larges portes, se tenait ce qui semblait être, à première vue au moins, un feld-maréchal. Galons dorés, décorations, ornaient sa large poitrine. Son attitude était parfaite.
Il vous recevait avec une affectueuse attention alors que vous émergiez d’un taxi ou d’une voiture avec des difficultés rhumatismales, vous conduisait avec précaution au haut des marches et vous guidait à travers les portes battantes mais silencieuses.

À l’intérieur, lorsque vous visitiez le Bertram pour la première fois, vous éprouviez, avec une pointe d’angoisse, la sensation que vous pénétriez dans un monde disparu. Vous aviez l’impression d’être transporté hors du temps. Vous vous trouviez à nouveau dans l’Angleterre « édouardienne ».
Certes, il y avait le chauffage central, mais cela ne se voyait pas. Dans l’immense salon se dressaient deux magnifiques cheminées, près desquelles de grands seaux à charbon en cuivre brillaient comme les faisaient briller les domestiques de l’époque édouardienne, et ils étaient remplis de morceaux de charbon tous de même grosseur. Ces cheminées, tout autant que le riche velours rouge, donnaient un sentiment de confortable intimité. Les fauteuils n’étaient pas de notre époque. Ils s’élevaient bien au-dessus du sol, de telle sorte que les vieilles ladies arthritiques ne risquaient point de perdre leur dignité en tentant de se lever. Les sièges, eux-mêmes, ne s’arrêtaient pas, comme la plupart des coûteux fauteuils modernes, à mi-chemin entre la cuisse et le genou, ce qui inflige d’atroces douleurs à ceux souffrant de sciatique. De plus, ils n’étaient pas tous de même modèle. Les uns présentaient un dossier droit, d’autres un dossier incliné. Ils étaient encore de largeurs différentes, convenant au mince comme à l’obèse.

On était à l’heure du thé, le hall se trouvait rempli de monde.
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