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Citation de KarineMLVL


C’est que personne ne les voit, ou du moins, c’est ce qu’elles croient, c’est ce qu’elles s’autorisent à croire pour se libérer un instant du carcan qui veut qu’une fille, une femme, ne montre pas son corps quand cela n’est pas strictement nécessaire, qui dit qu’il faut être folle, ou bien être une Femen, ce qui revient à peu près au même, pour pouvoir montrer ses seins, son ventre, ses genoux, son entrejambe, ses chevilles. Dans la voiture, la robe retroussée, les jambes écartées, pour plus de confort, les filles se montrent en entier, courbées dans l’habitacle, nudité originelle, innocente et impassible. Ce n’est pas obscène, c’est spontané : enfin, se montrer, sans que l’on puisse penser que le but est d’être vue, sans devoir imaginer ce que les autres vont fantasmer, ou penser à sa démarche en talons, sa jupe coincée dans sa culotte, son T-shirt qui dépasse de son short, son vernis écaillé, sa tache de sauce sur le chemisier, ses cicatrices dans le décolleté. C’est une position d’abandon, de nouveau-né épuisé, avant d’avoir existé, un moment de grâce qui ne leur arrive qu’une ou deux fois par an, parenthèse enchantée, et c’est ce que je souhaite à Victoire, de toutes mes forces. C’est ce que j’espère le plus pour elle, ma sœur, ma mère, et toutes celles que je n’ai pas su aimer : qu’elles puissent, un peu plus souvent, s’abandonner.
(Page 197)
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