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Citation de Cannetille


Notre monde tourne autour de l’invisible. Au cœur de tout, il y a un vide : l’énigme qui est notre origine et notre fin. Celle que nous cherchons à tout prix à percer sans comprendre que c’est impossible.
Mais vivre en faisant face à ce vide nous est aussi impossible. Il nous faut alors tenter de le remplir d’êtres invisibles, forgés de toutes pièces par notre imagination, dieux, saints, anges, démons, sorcières ou esprits, bref toute une ménagerie qui peuple notre tête et nous promet autre chose que la mort tandis que notre corps, lui, est occupé à mourir. C’est bien cela qui nous pousse à nous traîner dans la poussière, à nous flageller, à faire dix génuflexions ou à marcher sur des braises pour prouver notre sincérité et notre pureté d’âme. Tout cela pour que nous ne puissions comprendre que tout est de notre propre fait, vivre comme mourir, aimer comme haïr, donner la vie comme la prendre – ta main qui tient le couteau n’a jamais été aussi libre, comprends-le bien, ô guerrier qui prétends obéir aux dieux !
Shivnath, lui, n’éprouve aucune crainte face au vide : ses croyances sont aussi fausses que la statue à son image dans son temple. L’on aurait pu penser qu’il craindrait de proférer, ne serait-ce que dans sa propre pensée, de telles hérésies, mais ce n’est pas le cas. Non, il sait que lorsqu’il mourra, ce qu’il ressentira, ce sera le bois brûlant autour de son corps, et le feu qui le consume, et les étincelles qui l’éclairent une dernière fois tandis que sa peau fond comme du beurre et sa chair comme un sirop amer. Il sera ce corps pris dans une danse macabre à laquelle ceux qui le regardent seront totalement indifférents. Rien de plus.
Et donc, sachant sa fin, sa futilité, sa finitude, il peut y faire face sans avoir à se cacher et l’assumer avec la plus grande certitude : nous ne sommes pas faits pour être bons. Nous sommes mauvais dès la genèse, êtres retors, impulsifs, pervers, égocentriques, et même ceux qui croient faire le bien le font pour des raisons égoïstes – pour s’acheter un paradis, racheter une faute, se réhabiliter à leurs propres yeux. Il n’y a rien de plus faux que la sainteté des hommes dits saints, et ça, Shivnath ne le sait que trop bien. (Les êtres vraiment saints ne le crient pas sur tous les toits, ils risqueraient de mourir sur une croix.)
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