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Citation de VACHARDTUAPIED


Il s'étendit dans la neige et respira profondément la bouche ouverte. Le frisson durait toujours. Il dit en se relevant :
— Le mieux est de continuer à marcher.
Une pente raide, où le vent avait amoncelé plusieurs pieds de neige, descendait jusqu'au lac. Laurier s'y engagea en courant, mais la neige le happa et il continua en rampant à demi. Dupas le rejoignit.
— Passe derrière moi. Je ferai un chemin.
Laurier ne répondit pas. Il passa devant. Quand ils atteignirent le lac, Laurier se traînait à quatre pattes. Il avait perdu son bonnet de fourrure. La neige le recouvrait d'un masque, rosé là où était la bouche. Parvenu à côté de Dupas il s'étendit complètement sur le ventre, le visage dans la neige. Dupas attendit un moment, puis il le retourna sur le dos. Il avait les yeux hagards. Il soufflait sans arrêt. Dans sa poitrine l'air crépitait.
Dupas enleva ses moufles et lui essuya le visage. Le passage de l'air dans sa bouche était gêné par un voile d'écume rosé. Il l'en libéra.
Dupas enfin se coucha à ses côtés. Ses membres étaient rigides. Le moindre mouvement lui coûtait un effort insensé et il ne parvenait pas à alléger sa poitrine d'un poids qui l'oppressait. Le vent chassait des tourbillons de neige au-dessus d'eux. Il ferma les yeux et la panique lui étreignit le cœur. Il allait mourir ainsi, allongé à côté de Laurier, mourir de froid, de faim, enseveli sous la neige. La mort était ce grand espace blanc qui se dilatait dans sa tête, le faux sommeil qui le tirait par derrière, la torpeur de tout son corps. La mort s'offrait, séduisante, facile, glacée. Il n'avait qu'à se laisser couler, à s'abandonner. La mort monterait de ses pieds, lentement et il ne sentirait rien qu'un bienfaisant engourdissement. Elle monterait avec son sang, goutte à goutte. Il pourrait même la regarder venir les yeux ouverts. Il pourrait se pencher au-dessus d'elle pour la voir progresser. Une mort blanche, tendre, pacifiante.
Laurier parlait à côté de lui. Il essaya d'entendre, mais il ne comprit pas. Laurier délirait. Les mots lui sortaient de la bouche comme une respiration gelée. Ils n'avaient aucun sens. Les derniers mots qui lui restaient sur le cœur. Ils sortaient pour faire place à la mort qui montait en lui aussi, enveloppée de l'écume rosé
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