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Critiques de Association des Historiens Mod (2)
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L'opinion publique en Europe : (1600-1800)

L’opinion publique est devenue, sans conteste, un des enjeux majeurs des démocraties modernes. En période électorale, pas une jour sans sondages. Au quotidien, largement sollicitée par l’ensemble de l’espace économique et social, l'opinion publique pèse lourdement sur les jugements et les choix des décideurs de tout ordre.

Les historiens modernistes réunis pour cette brillante étude ont choisi d’aborder le sujet dans un moment historique qui va de la naissance de l’absolutisme européen à l’émergence des Lumières. Passionnante, difficile mais très lisible, leur approche consiste à définir et revisiter les concepts, reconsidérer l’historiographie du sujet, réévaluer la doxa adoptée par la majorité des chercheurs dans le sillage de Pierre Bourdieu et Jurgen Habermans : avant 1750, pas d’opinion publique

L’opinion publique a-elle une histoire ? Quand une société peut-elle exprimer des jugements ? Exercice périlleux que d’identifier un concept moderne, paradoxalement ignoré par penseurs des Lumières. Gorgée de sociologie historique, d’érudition et d’analyses, Lucien Bély, Daniel Roche, Cédric Pichon, Sandro Landi, Hélène Duccini, Alain Hugon et Jean-François Dunyach, mènent un rude challenge.

Comment définir un concept aussi flou, alors même que, comme objet culturel, il est une composante fondamentale de l’histoire intellectuelle et politique de nos sociétés. Cédric Michon réalise ce tour de force : « L’opinion publique est l’opinion du public. C’est donc une opinion collective, elle exige une relative unanimité, ». Elle n’a pas d’appartenance sociale déterminée et n’est pas le fait d’une élite proche du pouvoir. « Elle est spontanée, authentique, elle doit être audible ». Elle se caractérise, enfin, par une ambivalence parfois déroutante : contre-pouvoir ou outil de propagande royale.

Les études de cas, exemples extrêmement significatifs, donnent un « consistance sociale » au propos. L’Italie (article Sandro Landi) est aux avant-postes de la pensée théorique. Machiavel, le premier, dans « Le Prince » et « Les Discours », disserte sur « l’art de gouverner qui doit prendre en compte les opinions populaires pour mieux les contrôler et les soumettre », et son contemporain Pietro Pompanazzi à Padoue de lui emboîter le pas. L’opinion publique sous Louis XIII (article de Hélène Duccini) avec ses 3300 pamphlets, libelles et mazarinades, l’importance de l’oralité, des crieurs, de la chanson, l’omniprésence de l’image dans les récits populaires offre un tableau tout aussi convaincant de liberté et de manipulation de l’opinion. L’Angleterre du XVII è siècle ( article de Jean-François Dunyach) définit très tôt les contours d’un modèle social où l’opinion a une importance fondamentale jusqu’à faire reculer le pouvoir à plusieurs reprises. Le Royaume de Naples (article de Alain Hugon), en guerre avec l’occupant espagnol - vit une autre guerre pour le contrôle des opinions, un autre combat pour gagner les esprits.

Au final d’une étude savamment menée, Lucien Bély s’interroge à nouveau : « Existe-il une opinion publique internationale des temps modernes ? » La réponse est oui et Lucien Bély avance des arguments de poids : l’information et les conflits font désormais fi des frontières, la liberté de la presse - force nouvelle- bouleverse les modes d’information traditionnels, l’antagonisme religieux (catholiques/protestants) - dans un souci de survie - s’oblige à toucher au plus près le cœur et l’esprit, et dans ce but développe des stratégies bien au-delà des entités territoriales. Toutes ces conditions transforment en profondeur le paysage social et les mentalités. Ils concourent l'harmonisation des modes de pensée qui s’est poursuivie jusqu’à nos jours.
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L'opinion publique en Europe : (1600-1800)



L’opinion publique est devenue un des enjeux majeurs des démocraties modernes. En période électorale, pas une jour sans sondages. Au quotidien, largement sollicitée par l’ensemble de l’espace social, l’opinion publique pèse lourdement sur les jugements et les choix des décideurs de tout ordre.

Les historiens modernistes réunis pour cette brillante étude ont choisi d’aborder le sujet dans un moment historique qui va de la naissance de l’absolutisme européen à l’émergence des Lumières. Passionnante, difficile mais très lisible, leur approche consiste à définir et revisiter les concepts, reconsidérer l’historiographie du sujet, réévaluer la doxa adoptée par la majorité des chercheurs dans le sillage de Pierre Bourdieu et Jurgen Habermans : avant 1750, pas d’opinion publique.

L’opinion publique a-elle une histoire ? Quand une société peut-elle exprimer des jugements ? Exercice périlleux que d’identifier un concept moderne, paradoxalement ignoré par les penseurs des Lumières. Gorgée de sociologie historique, d’érudition et d’analyses, Lucien Bély, Daniel Roche, Cédric Pichon, Sandro Landi, Hélène Duccini, Alain Hugon et Jean-François Dunyach, mènent un rude challenge.

Comment définir un concept aussi flou, alors même que, comme objet culturel, il est une composante fondamentale de l’histoire intellectuelle et politique de nos sociétés. Cédric Michon réalise ce tour de force : « L’opinion publique est l’opinion du public. C’est donc une opinion collective, elle exige une relative unanimité, ». Elle n’a pas d’appartenance sociale déterminée et n’est pas le fait d’une élite proche du pouvoir. « Elle est spontanée, authentique, elle doit être audible ». Elle se caractérise, enfin, par une ambivalente parfois déroutante : contre-pouvoir ou outil de propagande royale.

Les études de cas, exemples extrêmement significatifs, donnent un « consistance sociale » au propos. L’Italie (article Sandro Landi) est aux avant-postes de la pensée théorique. Machiavel, le premier, dans « Le Prince » et « Les Discours », disserte sur « l’art de gouverner qui doit prendre en compte les opinions populaires pour mieux les contrôler et les soumettre », et son contemporain Pietro Pompanazzi à Padoue de lui emboîter le pas. L’opinion publique sous Louis XIII (article de Hélène Duccini) avec ses 3300 pamphlets, libelles et mazarinades, l’importance de l’oralité, des crieurs, de la chanson, l’omniprésence de l’image dans les récits populaires offre un tableau tout aussi convaincant de liberté et de manipulation de l’opinion. L’Angleterre du XVII è siècle ( article de Jean-François Dunyach) définit très tôt les contours d’un modèle social où l’opinion a une importance fondamentale jusqu’à faire reculer le pouvoir à plusieurs reprises. Le Royaume de Naples (article de Alain Hugon), en guerre avec l’occupant espagnol - vit une autre guerre pour le contrôle des opinions, un autre combat pour gagner les esprits.

Au final d’une étude savamment menée, Lucien Bély s’interroge à nouveau : « Existe-il une opinion publique internationale des temps modernes ? » La réponse est oui et Lucien Bély avance des arguments de poids : l’information et les conflits font désormais fi des frontières, la liberté de la presse - force nouvelle- bouleverse les modes d’information traditionnels, l’antagonisme religieux (catholiques/protestants) - dans un souci de survie - s’oblige à toucher au plus près le cœur et l’esprit, et dans ce but développe des stratégies bien au-delà des entités territoriales. Toutes ces conditions transforment en profondeur le paysage social et les mentalités. Ils concourent à une relative harmonisation des modes de pensée qui s’est affirmé jusqu’à nos jours.
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