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Critiques de Béatrice Delpire (9)
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Jessica Blandy, tome 16 : Buzzard Blues

Ce tome fait suite à Jessica Blandy, tome 15 : Ginny d'avant (1998) qu'il vaut mieux avoir lu avant. Cette histoire a été publiée pour la première fois en 1999, écrite par Jean Dufaux, dessinée, encrée par Renaud (Renaud Denauw), et mise en couleurs par Béatrice Monnoyer. Elle compte 46 planches. Elle a été rééditée dans Jessica Blandy - Intégrale 05 qui contient les tomes 14 à 17.



Jessica Blandy conduit sa voiture au soleil couchant, sur une route déserte longeant une grande étendue d'eau dans un état du Sud. La radio diffuse du blues, celui de l'artiste appelé Buzzard, avec des paroles évoquant le fait que la paysage n'est qu'un reflet de ce que l'on souhaite découvrir, de ce qui est déjà inscrit dans le voyageur. Sur le porche d'une maison en bois, une vieille femme afro-américaine chante un blues, pendant que son compagnon l'accompagne au banjo. Jessica arrive à sa destination, descend de voiture et se rend dans le bar de la ville. Elle demande où elle peut trouver la maison d'Earl Memphis, dit le Buzzard. Le barman lui répond, mais les clients la regardent bizarrement. À la nuit tombante, Benny et Dan Calder sont descendus de leur voiture en laissant le conducteur attendre à l'intérieur. Ils sont tous les deux armés d'un fusil et décident de se séparer pour retrouver Bud Busky. Dan entend le hennissement d'un cheval et s'avance prudemment, prêt à faire feu. Il découvre un magnifique cheval blanc dans une clairière, qui se remet à hennir. Soudain, il entend un coup de feu : il se met à courir dans cette direction pour savoir sur quoi Benny a tiré. Il le retrouve mort, pendu à un arbre. Il entend alors le klaxon de leur voiture en continu. Il y court et découvre le conducteur mort, affalé sur le volant et sur l'avertisseur sonore.



Alors que le ciel est toujours chargé d'orage, Jessica Blandy a atteint la demeure d'Earl Memphis, s'est garée devant et lit la note sur la porte. Earl Memphis en a eu assez d'attendre et il est parti à un rendez-vous. Jessica Blandy peut aller demander la clé en frappant à la porte de la grange et Peck lui donnera en la glissant sous la porte, ce qu'elle fait. Elle rentre dans la maison et se couche dans le lit de la chambre des invités pour la nuit, nue comme à son habitude. Elle est réveillée le lendemain par Earl Memphis habillé, avec un fusil dans a main, et en train d'admirer son corps. Elle le prend à parti mais sans l'émouvoir, sans obtenir d'excuse. Elle va prendre un bain dans la pièce d'eau, et cette fois-ci elle est interrompue par M'am Lizzy, elle non plus pas gênée par sa nudité. Lizzy ajoute même que Jessica va plaire au vieux, en parlant d'Earl Memphis. Enfin, Jessica va prendre son petit-déjeuner avec Earl Memphis et lui explique qu'elle est venue pour l'interviewer, mais aussi pour savoir d'où lui est venue l'inspiration pour parler de Razza dans une de ses chansons.



Dans le tome précédent, Jessica Blandy arrivait dans une petite ville à l'invitation d'une ancienne amie, inquiète du fait de la survenance de plusieurs décès violents sans explication. L'histoire évoquait l'existence d'un mystérieux personnage appelé Razza à l'influence maléfique, une sorte d'individu à l'aura surnaturelle très floue. Lorsque Jessica indique qu'elle souhaite en savoir plus sur Razza, le lecteur comprend que cette histoire contient elle aussi une touche surnaturelle. En fonction de sa sensibilité, il peut s'en offusquer parce que le scénariste va mettre à profit cet élément non rationnel pour s'affranchir pour partie des contraintes de logique et de cohérence, ou il peut l'accepter en l'état en sachant que cela autorisera des situations angoissantes peu probables. D'une certaine manière, l'existence de ce personnage libère Dufaux de devoir tout expliquer. Un exemple : qui a pendu Benny à un arbre dans la forêt, comment ? Peu importe : l'important est dans la mise en scène macabre. D'ailleurs qu'est-ce que ce canasson vient faire là ? Peu importe : c'est un symbole, une allégorie de la folie galopante, hurlante à chaque fois qu'un personnage est confronté à une manifestation de violence hors de contrôle. Sous réserve d'accepter de passer en mode métaphorique, ou de savourer les choses comme elles sont, le lecteur ressent ces moments irrationnels comme étant l'expression de l'irrationalité de l'être humain, que ce soit ses émotions qui prennent le dessus, ou une réaction primaire dictée par son cerveau reptilien, ou encore une manifestation de son inconscient, ou encore le diktat d'un archétype de l'inconscient collectif. Avec un de ces principes en tête, le lecteur retrouve la touche de folie qui était présente dans les premiers tomes, celle qui anime l'être humain à son insu, qui rend un comportement horrible par son anormalité.



De fait, l'intrigue recèle plusieurs sorties de la normalité. Certaines sont évidentes : la manifestation du cheval, le frère fou d'Earl Memphis, la voyante, le suicide pendant l'interrogatoire, les individus entendant ou voyant Razza. D'autres sont plus subtiles : le décalage entre ce que Jessica considère comme normal et ce qu'Earl Memphis considère comme normal (la regarder nue comme étant un droit), la puissance d'évocation du blues, la dette que Stella est persuadée qu'elle doit payer. L'intrigue entraîne le lecteur dans un microcosme plausible et réaliste : le musicien qui essaye d'emballer tout ce qui passe à sa portée comme un vieux beau, la méfiance entre les différentes communautés, la défiance vis-à-vis d'un ancien détenu, l'hostilité envers les forces de l'ordre. Le scénariste ne force rien de tout ça, restant dans les antagonismes ordinaires. Du coup, la composante surnaturelle s'apparente encore plus à une métaphore qu'à des conventions du genre horrifique à prendre au premier degré, ou à des facilités pour scénariste paresseux. Comme d'habitude, les dessins de Renaud sont au diapason du récit. Le lecteur est direct plongé dans cette région des États-Unis avec la première page : la teinte orangée du ciel, se reflétant sur l'étendue d'eau, les arbres décharnés sans feuille, la maison de maître abandonnée. Bienvenu dans le Sud.



Par la suite, le lecteur retrouve l'urbanisme très aéré des villes américaines quand Jessica Blandy va demander son chemin dans le bar. En planche 3 et suivantes, l'artiste prend soin de représenter une végétation qui correspond aux essences présentes dans cette région du monde. La mise en couleurs a conservé les nuances évidentes dans le tome précédent. Elle complète les dessins, nourrit les contours des formes délimités par le trait encré très fin, sans entrer en compétition avec, sans alourdir les cases. Dans le même temps, le lecteur imagine ce que serait une planche avant la mise en couleurs et perçoit bien ce qu'elle apporte. Les dessins présentent plusieurs aperçus de la maison d'Earl Memphis et de sa grange, permettant de se faire une bonne idée de l'extérieur comme de l'intérieur de la propriété. Le lecteur regarde quelques ouvriers travailler aux champs. Il se tient devant les mobil homes de la population défavorisée. Il regarde le cyclone se déplacer et tout détruire sur son passage. Comme à son habitude, Renaud met en œuvre une direction d'acteurs de type naturaliste, l'état d'esprit des personnages pouvant se voir dans leurs postures et leur visage. Le lecteur ressent bien l'hostilité passive des clients du bar regardant Jessica Blandy, le début de gêne de Jessica se trouvant nue devant M'am Lizzy alors qu'elle n'est pas pudique, la méfiance d'une mère et d'une fille afro-américaine en voyant un conducteur les observer depuis sa voiture en passant, l'effroi qui gagne progressivement le détenu interrogé par la police, la résignation de la mère de Bud Busky alors que son interlocuteur commence à user de la violence pour l'intimider.



En 3 pages, le lecteur est déjà immergé dans le récit : le trajet en voiture de Jessica, son premier contact avec la population locale, la mort bizarre de Benny. Il constate que comme la plupart du temps, Jessica Blandy n'exerce pas son métier d'écrivaine, et que l'interview pour un article n'est qu'un prétexte. Il note également que cette fois-ci elle est proactive dans le sens où elle a pris l'initiative de contacter Earl Memphis pour en savoir plus sur Razza plutôt que de juste se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment. Pour autant, elle reste un personnage parmi d'autres qui ne résout rien à elle toute seule, qui n'incarne pas un héros salvateur. Au-delà des comportements violents ou excessifs et de l'agressivité banale et ordinaire, la dynamique du récit repose sur un amour malencontreux, un crime banal, une volonté de vengeance. D'une certaine manière, il s'agit d'un fait divers, d'une histoire qui tourne mal parce que l'être humain est soumis à la survenance du mal (l'influence de Razza) contre lequel il n'a pas de défense. Il ne s'agit pas du poids d'une condition sociale, d'un milieu défavorable, mais plus d'une fatalité implacable, celle qui hante le blues.



La narration visuelle de Renaud est toujours aussi impeccable, sans affèterie ni effets de manche, emmenant le lecteur dans des lieux réalistes et consistants, le faisant côtoyer des personnages plausibles et humains. Jean Dufaux continue d'utiliser un personnage qui ne se fait sentir que par sa présence, amenant une touche de surnaturel. S'il ne se braque pas sur ce dispositif narratif, le lecteur se rend compte qu'il concourt à ramener la folie destructrice qui hantait les criminels des premiers tomes, ramenant paradoxalement plus de réalisme dans les événements et les comportements.
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Jessica Blandy, tome 15 : Ginny d'avant

Ce tome fait suite à Jessica Blandy, tome 14 : Cuba ! (1998) qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant. Cette histoire a été publiée pour la première fois en 1998, écrite par Jean Dufaux, dessinée, encrée par Renaud (Renaud Denauw), et mise en couleurs par Béatrice Monnoyer. Elle compte 46 planches. Elle a été rééditée dans Jessica Blandy - Intégrale 05 qui contient les tomes 14 à 17.



Jessica Blandy a pris l'avion pour se rendre à l'invitation d'une ancienne amie : Meg. Elle descend de l'avion et Meg la repère facilement grâce à sa silhouette inchangée par rapport à l'époque où elles avaient toutes les deux 17 ans. Meg emmène son amie jusqu'à sa voiture et commence à lui expliquer pourquoi elle lui a demandé de venir. Tout a commencé en février avec l'incendie de la manufacture. Certains ouvriers ont pensé que c'était Hogan, le propriétaire qui aurait mis lui-même le feu à l'atelier principal. Le lendemain, son cadavre a été retrouvé dans sa voiture qui avait versé dans un ravin. Le soir-même, le mannequin servant à exposer les robes de mariée s'est mis à briller dans la vitrine, sans raison apparente, sans explication rationnelle, phénomène qui se reproduit chaque nuit. Ce mannequin est surnommé Ginny, parce qu'il rappelle une fille qui avait vécu dans cette ville et dont tous les garçons du coin en étaient fous. Un jour, elle a disparu et personne n'a jamais su ce qu'elle était devenue. Deux mois après l'accident d'Hogan, Fletch un habitué et un brave type travaillant pour la mairie est entré dans son bar habituel et a ouvert le feu sur les clients. Il a gardé la dernière balle pour lui et s'est sauter le caisson. Il n'a donné aucune explication de son geste. Il a juste prononcé ces mots : le fléau est sur la ville.



Meg gare sa voiture devant chez elle en indiquant que son mari Billy a lui aussi entendu la dernière phrase de Fletch car il était dans le bar. Meg présente Jessica Blandy à son mari. Celui-ci lui parle de son patron Ryan Dougby. Un jour, ce dernier a reçu une boîte en carton au bureau, que sa secrétaire lui a apportée. Il l'a ouverte, et est devenu tout pâle. Il s'est levé, s'est habillé pour sortir, et est parti en emmenant la boîte et son mystérieux contenu. Le soir, il a téléphoné à Billy pour lui dire qu'il ne reviendrait plus au bureau, car de toute façon le fléau les emporterait tous. Puis, il s'est pendu dans sa chambre. La boîte et son mystérieux contenu n'ont jamais été retrouvés. Meg raconte ensuite comment le pompier Tobby s'est jeté dans le feu du haut de la grande échelle à la fin d'une intervention. La nuit, Bambing, un sans domicile fixe, se rend devant la vitrine des robes de mariée pour admirer le mannequin Ginny en train de briller. Le lendemain, Meg emmène Jessica Blandy devant l'épave d'un bateau où ont été retrouvés les corps de sept adolescents (5 garçons, 2 filles), morts d'overdose, avec une inscription relative au fléau.



Comme à chaque tome, l'horizon d'attente du lecteur est conditionné par les caractéristiques récurrentes de la série. Il en retrouve la plupart : un environnement nord-américain, une touche d'érotisme, Jessica enquêtant sur des morts sordides, des comportements anormaux apparaissant monstrueux. Le lecteur remarque rapidement que la mise en couleur a franchi un palier d'élégance. Béatrice Monnoyer continue d'utiliser des aplats de couleurs pour les surfaces détourées d'un trait fin et précis par Renaud. Elle se lance dans un rendu peint pour les arrière-plans, avec plus de confiance que dans le tome précédent, et peut-être plus d'expérience. Cela devient évident à partir de la planche 5, avec une pelouse verte qui contient des reflets jaune. Il ne s'agit plus d'un coloriage qui permet de refléter la couleur réelle et de faire ressortir les formes détourées les unes par rapport aux autres, il s'agit d'apporter des informations supplémentaires (une partie plus soumise au soleil) qui ne se limitent pas aux traits de contour ou à des effets spéciaux comme les flammes. Cet apport se retrouve avec évidence sur la planche 7 où le reflet de l'eau se retrouve dans le camaïeu du ciel alors que Jessica et Meg observent la silhouette du navire échoué au loin. La coloriste réalise des magnifiques cieux marins tout du long de cette promenade. Au fil des pages, le lecteur admire un ciel bleu traversé de reflets orange, une mer émeraude avec un ciel grisâtre, un coucher de soleil embrasé, la terre des champs avec des reflets roux.



La complémentarité entre les couleurs et les traits encrés est étonnante. Renaud est toujours aussi précis et minutieux dans ses cases : il est visible qu'il a délimité des zones avec moins de traits, avec l'intention que la coloriste les habille. Il continue de prendre en charge tous les autres éléments d'information visuelle, y compris les textures. Le lecteur ressent la frontière définissant la nature de la complémentarité entre les deux artistes. Chaque personnage dispose d'une apparence spécifique, souvent élégante, et de tenues vestimentaires appropriées aux conditions climatiques, à son occupation, à son profil socioculturel. Jessica Blandy est toujours aussi bien habillée, et séduisante, sans être vulgaire ou aguichante, un peu glaciale parfois. L'érotisme est présent à trois reprises avec une femme dénudée, très léger. Le jeu des acteurs est naturaliste, avec des postures variées et parlantes, et des expressions de visage sans exagération qui amènent parfois le lecteur à se demander ce que pensent vraiment les personnages en train de s'exprimer.



L'un des grands plaisirs de cette série est de pouvoir se projeter dans les différents lieux où se déroule l'histoire, de profiter du talent de l'artiste pour la description précise et réaliste. Dès la première page, le lecteur constate que l'exactitude tient à cœur de Renaud : les fixations des anneaux de verre sur la terrasse de l'aéroport sont techniquement irréprochables. Par la suite, le lecteur se projette avec plaisir dans plusieurs endroits : la rue de desserte bordée de pavillons dont celui de Meg, le champ s'étendant à perte de vue avec des meules de foin de ci de là, la grande terrasse de la maison de Meg avec une table pour manger dehors, la magnifique piscine de la demeure des parents de Loomie Max (une case de la largeur de la page, somptueuse, on n'a qu'une envie : s'assoir dans un transat), le diner sans panache où Jessica Blandy offre un café à Bambing, la ruelle pavée où se déroule l'agression, les pièces de la demeure de Razza et sa piscine, etc. La mise en scène est tout aussi limpide et factuelle, avec des séquences mémorables. L'artiste rehausse la démarche factuelle de sa narration par une mise en scène clinique qui fait ressortir l'étrangeté ou l'horreur de ce qui est montré. En voyant l'habitué tirer sur les clients avec son fusil à canon scié, le lecteur a l'impression de vivre un fait divers, ressentant toute l'horreur de cette tuerie arbitraire. Il éprouve l'impression d'accompagner Meg et Jessica sur la plage, de lever les yeux pour regarder passer une mouette. En tournant une page, il se retrouve dans un cimetière de nuit, à attendre de voir ce que Bambing va trouver dans un cercueil. Comme Dougby, il est troublé par la nudité de Ginny sur la plage. Il est pris à la gorge par la monstruosité du comportement d'un groupe d'individus quand ils commettent un crime abject, et dans le même temps il voit bien à quel point c'est plausible, possible comme en atteste les faits divers. Ce mode de narration visuelle produit également un effet étrange pour les éléments inexpliqués comme la meute de chiens sauvages qui se retrouvent silencieux devant la maison de Meg de nuit, ou la brillance inexplicable du mannequin dans la vitrine.



Avec cette histoire, Jean Dufaux assume pleinement une composante chronique de la série et parfois sous-entendue : une touche de surnaturel. Il n'y aura pas d'explication à la brillance du mannequin : c'est comme ça. Il n'y aura pas d'explication à la mort d'un personnage dans la piscine de la demeure de monsieur Razza : c'est comme ça. Pareil pour le comportement de la meute de chiens. Ce parti pris narratif peut agacer : le lecteur peut y voir un raccourci facile qui dédouane l'auteur de raconter une intrigue cohérente où tout est expliqué de manière rationnelle. Dans ce cas-là, il est vraisemblable que ce tome le convainc d'abandonner la série. Il est également possible de considérer que cette part d'irrationnel est le reflet ou la matérialisation de ce que le comportement humain peut avoir d'irrationnel en étant le jouet des émotions, un petit peu comme peu le faire Stephen King dans ses romans, toute proportion gardée. Sous réserve d'accepter cet outil narratif (la touche de surnaturel), le lecteur se rend compte que la série a retrouvé ses racines : confronter des êtres humains (dont Jessica Blandy) à des comportements irrationnels. Avec ce point de vue en tête, la série retrouve sa richesse thématique : l'individu qui commet un geste irréparable inexplicable et incompréhensible (mettre le feu à son usine, tirer dans la foule et se suicider..), imposer sa volonté par la force, l'usage des armes à feu, la culpabilité qui ronge le coupable mais aussi son entourage. Toute la saveur malsaine de la série est de retour : anormalité, comportement aberrant, violence infligée aux autres et à soi-même, irrationnalité.



Ce quinzième tome amène une évolution dans la série. Renaud est de plus en plus soigneux dans ses dessins combinant une précision remarquable avec une lisibilité optimale, la collaboration avec la coloriste gagnant également en sophistication. Jean Dufaux s'éloigne du simple polar réaliste avec une intrigue logique, en utilisant un élément surnaturel qui lui permet de s'affranchir d'un déroulement logique et cartésien. Cela ne peut pas être du goût du tous les lecteurs, mais il utilise cet outil avec élégance, pour des séquences malsaines qui mettent mal à l'aise, sans avoir besoin de verser dans le gore ou de mettre en scène des monstres folkloriques. L'être humain est beaucoup plus monstrueux.
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Jessica Blandy, tome 14 : Cuba !

Ce tome fait suite à Jessica Blandy, tome 13 : Lettre à Jessica (1997) qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant. Cette histoire a été publiée pour la première fois en 1998, écrite par Jean Dufaux, dessinée, encrée par Renaud (Renaud Denauw), et mise en couleurs par Béatrice Monnoyer. Elle a été rééditée dans Jessica Blandy - L'intégrale - tome 5 - Magnum Jessica Blandy intégrale T5 qui contient les tomes 14 à 17.



Un américain a arrêté sa voiture sur le Malecón, une promenade en front de mer de huit kilomètres de long au nord de la Havane. Ruiz Mendin (34 ans) est sorti de sa voiture et attend en regardant la mer : il a rendez-vous avec Jessica Blandy. Il se retourne en entendant un pas derrière lui. Il s'agit d'un enfant dans un habit militaire, peut-être un cadet de l'école militaire. L'enfant tient une boîte devant lui et s'arrête devant Mendin en lui demandant s'il attend bien une américaine, une femme blanche. La réponse étant positive, l'enfant prend le revolver dans la boîte et abat Mendin de 2 coups tirés à bout portant dans la poitrine. Jessica Blandy appelle son contact pour l'informer de l'absence de Ruiz Mendin au rendez-vous. Son contact lui explique ce qui est arrivé et lui dit d'appeler Antonio à la Laguna de Leche, près de Sagula, celui-ci lui donnera de nouvelles instructions. Jessica Blandy se rend sur le bateau de pêche qu'on lui a indiqué : elle y trouve le cadavre de son contact. Elle n'a plus qu'à attendre et à espérer que le réseau Hannah parviendra à la joindre autrement. À Cuba, une réunion présidée par un officiel cubain prénommé Santos se déroule en présence de responsables cubains et américains. Santos explique que le colonel Rosario, ayant fait partie d'un lobby anticastriste, doit être libéré dans les jours à venir. Il a demandé l'asile politique à l'ambassade de Bolivie. Il doit la rejoindre dans une voiture officielle en passant par le Malecón. Un attentat a été organisé pour l'abattre dans la voiture, quand elle sera prise dans la foule sans pouvoir avancer. le tueur pourra s'échapper sans difficulté.



Dans un autre quartier de Cuba, Jessica Blandy se présente à l'entrée d'un immeuble : elle vient voir un dénommé Ortiz. Après avoir montré patte blanche devant Mamita (un jeune garçon), elle est reçue par Ortiz qui ne l'imaginait pas comme ça, il pensait qu'elle aurait été plus moche. Elle lui répond du tac au tac qu'elle pensait qu'il aurait été plus mince. Les deux sourient. Au cours de la réunion des officiels, Santos mentionne la présence de Jessica Blandy et le risque qu'elle représente. Concomitamment Jessica Blandy explique qu'elle a été mise au courant de la défection du colonel Rosario, par l'écrivain Cabron Salute qui avait été incarcéré pendant deux mois dans la même prison. le colonel Rosario avait organisé un attentat contre Fidel Castro, grâce au financement d'un lobby anticastriste basé à Miami. Actuellement, le colonel Rosario séjourne dans une résidence surveillée où les américains ne peuvent rien tenter. Haydée, la prostituée engagée pour divertir le colonel Rosario, sort de ses appartements et va piquer une tête dans la mer, sous le regard envieux de soldats. Quand elle sort de l'eau, elle retrouve leurs deux cadavres.



Changement de décor pour Jessica Blandy qui quitte les États-Unis pour une mission à Cuba, alors sous la présidence de Fidel Castro (1926-2016) dirigeant de la République de Cuba, pendant 49 ans, d'abord en tant que Premier ministre (de 1959 à 1976), puis comme président du Conseil d'État et président du Conseil des ministres de 1976 à 2008. Jean Dufaux a concocté une histoire utilisant les conventions du genre espionnage, Jessica Blandy s'y retrouvant impliquée comme journaliste. Il est donc question de prisonnier dont la libération risque de gêner du monde, d'intérêts officieux voire occultes des États-Unis à Cuba, de réseau de résistants (le réseau Hannah), d'assassinats pour éliminer les gêneurs, avec un tueur professionnel. S'il le souhaite, le lecteur peut considérer le récit sous l'angle initial de la série : les comportements criminels relevant d'une pathologie psychiatrique. Il est confronté aux actes meurtriers d'un enfant, sans explication, supposant qu'il a été embrigadé et qu'il se conduit comme un bon soldat avec un extraordinaire contrôle de lui-même. Il y a également l'assassin professionnel, aussi compétent que dépourvu de toute empathie pour ses contrats, et très chatouilleux quand on critique ses compétences. Il y en a un autre qui fait aussi froid dans le dos que l'enfant : Santos, la soixantaine. Il semble dépourvu d'émotions, uniquement focalisé sur les objectifs à atteindre et les stratégies à mettre en oeuvre, plus froid que l'assassin professionnel.



Le changement de lieu est également l'occasion de pouvoir apprécier la manière dont Renaud décrit Cuba. Au fil des tomes précédents, le lecteur a appris à voir le soin apporté par l'artiste pour représenter les environnements. Tout commence donc sur un tronçon large du Malecón, et une belle vue dégagée sur une mer émeraude. Par la suite, le lecteur se dit qu'il prendrait bien un verre au restaurant sur pilotis où se trouve Jessica Blandy. Il ferait bien un tour sur le bateau de pêche même s'il est bien attaqué par la rouille. Il regarde les colonnes du bâtiment officiel à La Havane, cité surnommée la ville aux mille colonnes. Il éprouve l'impression de lever la tête pour regarder la cage d'escalier de l'immeuble où se trouve Ortiz, avec des vitraux au pallier. Il aimerait bien séjourner dans la belle demeure servant de résidence surveillée (mais pas en temps que détenu) au bord de la mer dont il a un aperçu vu du ciel, puis sur la plage privée aux côtés de Haydée alors qu'elle va se baigner, et enfin de la magnifique architecture intérieure quand Jessica Blandy finit par y pénétrer pour rencontrer le colonel Rosario. Renaud représente également plusieurs rues de la Havane, avec sa précision descriptive habituelle et son souci du détail réaliste, que ce soit pour attendre le bus dans un quartier populaire, ou pour aller prendre un verre dans un bar en sous-sol.



Le plaisir de la lecture ne se limite pas à la possibilité de voir des sites bien représentés, au fur et à mesure du déroulement du récit. La mise en scène de Renaud est toujours aussi évidente et naturaliste, rendant chaque scène plausible. le lecteur est pris par surprise par la mort du contact de Blandy dans la première page, dans un environnement ensoleillé. Il regarde ensuite les cubains en train de prendre tranquillement un verre pendant qu'elle téléphone au comptoir. La description du déroulement de l'assassinat dans la voiture montre la foule, ainsi que le tueur s'avançant et tirant rendant le plan concret et réaliste. Planche 13, le lecteur sent une petite goutte de sueur perler en revoyant l'enfant avec sa boîte : d'abord de dos en short et teeshirt (il ne peut pas savoir que c'est lui), puis en plan poitrine avec son regard fixe et juste le dessus de la boîte fermée, en écho à celle de la première planche, une belle narration visuelle en sous-entendu. Il sourit en voyant un vieux pick-up remonter une rue en escalier (des marches de petite hauteur et très longues) puis dévaler une rue pavée étroite. Il observe la brève discussion entre deux membres du réseau Hannah en plan fixe à un arrêt de bus, la prise de vue se faisant depuis le trottoir d'en face. Il mesure la justesse du jeu des acteurs quand un autre membre du réseau assis tient en joue le tueur professionnel debout en face de lui sans défense et qu'il prend conscience qu'il n'a pas le sang-froid nécessaire pour l'abattre. Un peu honteusement, il sourit quand Jessica est obligée de se déshabiller pour qu'un employé de madame Lucia (responsable d'un groupe de prostituées) tâte la marchandise pour en vérifier la qualité.



Le récit de Jean Dufaux est un peu lié à la situation politique de cuba et à son histoire, plus à ses sites en tant que décors. le scénario n'est donc pas générique : l'environnement a une incidence réelle sur le déroulement de l'intrigue. Jessica Blandy se retrouve instrumentalisée au sein d'une opération de grande envergure qu'elle ne découvre que progressivement. Comme d'habitude, elle ne joue pas le rôle de l'héroïne dont l'enquête va permettre de résoudre une situation conflictuelle ou un crime. Elle participe aux événements, sans être forcément l'élément moteur ou la sauveuse. le lecteur a également à l'esprit que les aventures de Jessica Blandy sont des drames, et les auteurs ne le détrompent pas avec ce récit. Les actions des protagonistes et leur sort sont dictés par le système dans lequel ils évoluent, par leurs convictions et leur culture. L'Histoire a porté un jugement sur le régime castriste (mais aussi sur celui qui l'a précédé) apportant une valeur morale au rôle des uns et des autres dans cette histoire. D'un autre côté, le lecteur voit des adultes en train d'agir avec des moyens allant jusqu'à donner la mort dans les deux camps, pour des enjeux pas si simples dans un contexte complexe. À la fin, il se rend compte qu'il peut éprouver de l'empathie et même de la compassion pour chacun d'eux, ne voyant pas d'alternative simple et propre à leurs agissements.



A priori, le lecteur n'est pas forcément enthousiasmé à l'idée de plonger dans un thriller se déroulant à Cuba, mais ne se confrontant pas directement à Fidel Castro, à sa politique, à son régime, à ce qu'il a apporté au peuple cubain, à l'exemple qu'il a pu donner de résistance à l'hégémonie américaine. Rapidement, il retrouve ses marques dans la narration visuelle impeccable de Renaud, acceptant cette mission un peu particulière de Jessica Blandy souhaitant interviewer un anticastriste avant qu'il ne disparaisse, volontairement ou non. Au-delà de l'intrigue, il se retrouve pris au piège d'un système et d'un historique comme les protagonistes.
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Jessica Blandy, tome 14 : Cuba !

A Cuba, un américain est abattu par un enfant déguisé en cadet de l'armée en plein Malecon, l'avenue principale de La Havane. Salute, un exilé cubain à Miami propose à Jessica Blandy de partir sur l'île pour rencontrer le général Rosario, compagnon de la première heure de Castro, qui doit bientôt sortir de prison. Avec la belle Haydée, Jessica va devoir supporter bien des tribulations et des humiliations avant de pouvoir quitter l'enfer castriste sans jamais rencontrer le général en question.

Ce 14ème tome des aventures de la bimbo blonde change le lecteur de cadre et de sujet. Cette histoire pleine de meurtres et de fureur a un très fort arrière-plan politico historique. Elle aborde la réalité des réseaux d'opposants au dictateur, des filières de fuite du pays, des tractations secrètes entre les cubains et les américains, sans parler du rôle des exilés de Miami. Tout cela est trouble, assez compliqué. Le lecteur comprend que Blandy est à son insu la chèvre qui doit servir à démanteler le réseau d'opposants, mais il peine un peu sur le rôle des américains et des exilés. Le cadre est magnifiquement rendu du point de vue du graphisme. L'histoire est racontée de façon hachée, dans un style cinématographique prononcé, ce qui ne facilite pas la compréhension d'une affaire déjà passablement embrouillée. Pas le meilleur de la série.
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Jessica Blandy, tome 15 : Ginny d'avant

D'étranges évènements se produisent dans la petite ville où vient de débarquer Jessica sur l'invitation d'une amie d'autrefois : la manufacture de M. Hogan a subi un grave incendie provoqué semble-t-il par le propriétaire lui-même, Fletch, un brave employé de mairie pris d'un coup de folie, a déclenché une fusillade qui a fait un véritable carnage chez Maxie, un pompier s'est jeté dans la fournaise, cinq garçons et deux filles ont été retrouvés morts suite à une overdose dans la cale d'un bateau échoué, un homme s'est pendu, un autre s'est noyé dans la mer. Un véritable fléau s'est donc abattu sur cette ville. Il semblerait qu'il ait un rapport avec une certaine Ginny d'autrefois.

Ce 15ème tome des aventures de Jessica Blandy, la bimbo blonde à qui arrivent toutes sortes de malheurs, commence comme un roman noir avec une longue suite d'horreurs qui serait la conséquence logique d'un événement dramatique survenu de nombreuses années plus tôt. Situation et intrigue ultra classiques, grand nombre de personnages et difficulté à mettre en corrélation la suite d'évènements qui se produisent attisent la curiosité du lecteur. Malheureusement, l'intérêt retombe dès qu'est dévoilée la clé de l'énigme et la déception devient encore plus grande quand arrive une conclusion aussi embrouillée qu'invraisemblable. Un bon départ et une médiocre arrivée ne donnent pas un bon épisode. Attendons le suivant et oublions cette demi-réussite ou ce demi-échec...
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Jessica Blandy, tome 16 : Buzzard Blues

Jessica Blandy débarque dans une petite ville du fin fond de la Louisiane où elle est venue rencontrer Earl Memphis, dit « Le Buzzard », un ancien bluesman qui a eu son heure de gloire et qui est maintenant assez oublié. Plusieurs faits inquiétants se produisent dans le pays : un cheval blanc comme neige apparaît et disparaît; un homme est retrouvé pendu, un autre égorgé dans sa voiture à l'arrêt; Ta Bepo, une vieille femme noire diseuse de bonne aventure, est assassinée, une caravane explose... Et ce n'est que le tout début d'une longue suite de catastrophes...

Ce 16ème tome des aventures de Jessica Blandy se distingue par une ambiance très « Deep south » particulièrement bien rendue autant par les vignettes magnifiquement soignées que par l'intrigue pleine de mystère, de sorcellerie, de vaudou et d'éléments hostiles (bayous impénétrables, cyclones dévastateurs). Le lecteur a même droit à une tornade en direct ! Mais, une fois de plus, l'histoire se termine dans la confusion : réapparition furtive du fameux Razza (déjà présent quoique invisible dans le tome précédent). Il s'agit bien sûr de maintenir le suspens et l'intérêt, mais la ficelle est un peu grosse. Cela mis à part, une belle réussite à savourer avec de vieux blues de Sam Cooke, Muddy Waters ou Lightning Hopkins en fond sonore...
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Jessica Blandy, tome 16 : Buzzard Blues

Une nouvelle aventure de Jessica Blandy, dans la continuité de la précédente, dans la continuité du fantastique et du paranormal.



Une Jessica Blandy qui prend les commandes au lieu de se laisser guider par les autres, et qui part à la recherche de Razza, mystérieux personnage qui sème la mort depuis le tome précédent.



Mais, contrairement au tome précédent, tous les éléments sont cette fois-ci présents afin de crédibiliser le fantastique et le surnaturel qui entourent ce nouveau récit. Des personnages typés, un endroit éloigné, une tempête qui approche, une vieille femme noire qui lit les cartes, mais surtout le blues baby.



De la musique qui a plus d’une fois réussi à mettre cette série dans l’ambiance adéquate et qui crée ici une atmosphère propice au surnaturel ... car quand le blues appelle, le Diable n’est jamais loin et la mort omniprésente.

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Jessica Blandy, tome 15 : Ginny d'avant

On quitte Cuba dans ce quinzième tome pour une nouvelle enquête de Jessica Blandy dans un petit village américain. Appelée à la rescousse par son ancienne amie Meg, Jessica Blandy va tout faire pour découvrir le secret que cache cette petite communauté et ainsi trouver une explication à la série de meurtres et suicides inexpliqués.



Après avoir flirté avec le fantastique dans les neuvième et dixième tomes grâce aux forces obscures qu’incarnaient Louis et Victoria Charman, cette série récidive avec le surnaturel dans ce tome. Mais, alors que la précédente incursion dans le fantastique (vaudou) était plutôt crédible et collait parfaitement à l’ambiance du récit, on a l’impression que cette histoire et cette petite communauté n’est pas trop faite pour se marier au fantastique.



On a finalement l’impression de se retrouver à cheval entre une enquête classique de Jessica Blandy et un épisode pas vraiment réussi des X-files.
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Jessica Blandy, tome 14 : Cuba !

Voilà déjà un titre et une couverture plus attrayants que ceux du tome précédent. Par contre, si le tome précédent avait tout d’un ‘classique’ de la série Jessica Blandy, celui-ci est tout le contraire.



Déjà on retrouve moins cette atmosphère typiquement ‘States’ et particulière qui caractérise la série, car l’histoire se déroule à Cuba. En suite, la vraie force de cette série est normalement l’évolution des personnages qui vont et reviennent au gré des tomes, mais dans ce quatorzième tome on ne retrouve aucun personnage connu, mis à part Jessica Blandy. Du coup, sans Robby, Gus, Victoria et autres, et sans l’ambiance hollywoodienne on est un peu perdu.



Pour finir, l’intrigue qui est d’habitude plutôt policière vire vers l’espionnage. On se retrouve donc avec des personnages annexes qu’on ne connaît pas, qui ont des liens compliqués, le tout pourvu d’une histoire qu’il faut relire douze fois avant de pouvoir vraiment tout comprendre. Et au milieu de cette histoire tirée par les cheveux, une Jessica Blandy plutôt spectatrice dans un univers qui n’est pas le sien et dont on finirait par se demander ce qu’elle fabrique dans cet album.



Bref, le moins bon tome jusqu’à présent.
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