Il était difficile, par-delà les vaches limousines qui disparaissaient dans l’herbe haute de la saison des pluies et par- delà les champs de maïs, d’imaginer qu’il y a cent dix ans seulement, ce grand entonnoir, dessiné par les montagnes et ouvert sur la mer, était une savane un peu plus arborée qu’aujourd’hui, avec banians, araucarias et pandanus.
Jean-Jean ne se posait pas ce genre de question. Il avait terminé sa semaine de travail, il était silencieux comme il savait l’être. Il se demandait déjà si, après la mise à l’eau, il allait se diriger vers le récif ou vers Pindaï. Les questions historiques, sociologiques, voire ethniques — qu’on est en droit de se poser à cause des événements politiques des années quatre-vingt — ne l’effleuraient pas. Son curieux copain métropolitain en avait pris son parti et ne posait plus de questions. De toute façon, il n’aurait eu, en guise de réponse, que ces quelques mots, très calédoniens : casse pas la tête !