MADAME RIIS. Pourquoi n'êtes-vous pas venu ?
NORDAN. Vous savez bien que je ne vais jamais ni aux mariages, ni aux fiançailles. Aller voir ces pauvres animaux qu'on mène au sacrifice, voilés et couronnés... pouah !
Acte I, scène I
SVAVA (s'avançant sur le devant de la scène). On croirait vraiment que pour les hommes, le mariage est une lessive...
RIIS. Oh, oh !
SVAVA. ... et qu'ils peuvent venir s'y laver quand ils veulent et comme ils veulent.
RIIS. Non, mais...
SVAVA. Oui : et c'est extrêmement flatteur pour moi, ta fille, que tu puisses penser seulement que je sois capable d'une pareille besogne... Mais je te le dis une fois pour toutes, jamais, jamais, jamais.
Acte II, Scène II
Le monde des esprits enveloppe
La vie comme un nuage,
Dès l’aube de notre pensée
Encore inconsciente.
La vérité est qu’il avait quelque chose du tempérament qu’on attribue aux Français : il était très fort à la première, à la seconde attaque, quelquefois même à la troisième, mais il faiblissait à la défensive, parce que son impressionnabilité l’emportait sur son sang-froid. (p.7)
Nul ne deviendra grand
S’il ne regarde pas
Les autres comme
Les hochets de ses jeux.
Nul ne connaîtra
La Gloire
S’il ne bâtit cette gloire
Sur celle des autres.
Ce sont les victimes des puissants de la terre !
Voilà le prix de l’éclat
Du Trône et de l’Autel
Du Sceptre et de la Mitre
Qui ont gouverné le pays et les âmes.
Le pont
Qui mène au pouvoir et aux honneurs
A été fait
De cadavres et de cadavres
LE DOCTEUR
A propos, Ingeborg, lis-tu quelquefois les journaux, toi ?
INGEBORG
Les journaux ?... Oui, celui qu'on me donne à la cuisine, tous les jours avant d'aller au marché.
LE DOCTEUR
Non, pas celui-là.
INGEBORG
Ah ! celui qu'on apporte tous les matins chez M. le Consul ? Non, celui-là, je ne le lis pas. On y dit de trop vilaines choses.
LE DOCTEUR
Tu n'as pas de goût pour ça, toi.
INGEBORG
Dame ! Nous autres nous en entendons assez comme cela; pas la peine d'aller en lire. Maintenant... les gens chics en ont peut-être besoin.
Suivez bien mon raisonnement : au fond, qu'est-ce que la monarchie, je vous le demande ? Une vulgaire compagnie d'assurances, pas autre chose, dans laquelle les prêtres, les fonctionnaires, les nobles, les propriétaires et les gros commerçants ont pris des actions; et c'est bien le diable si ceux-là permettent jamais au directeur de faire des bêtises.
Harald
Mais il y a autre chose. Vous vous plaignez de la politique ; vous prétendez qu'elle dessèche le coeur, qu'elle endurcit notre nature...fort bien. Mais au moins, si vous ne vous sentez pas la force de lutter contre elle, n'entravez pas l'oeuvre de ceux qui cherchent à vous en débarrasser ? Vous vous plaignez de l'état actuel des choses, et vous le soutenez quand même ; ce n'est pas logique.
De Arne Garborg
Qu'est ce donc que la conscience ? L'opinion publique en nous mêmes, la sainte terreur devant les "on-dit", la morale, vieil héritage démodé, cet instinct du troupeau, inné, incarné en nous, qui nous fait distinguer le bien du mal !