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Citation de Charybde2


« Rien, rien, rien… » répète Mila.
Mais cette fois, j’entends aussi des halètements, comme si elle s’était mise à courir, puis un sifflement épouvantable qui me perce les tympans. J’arrache violemment mon oreillette. Je lève les yeux : deux caméras surveillent l’allée, elles ont dû détecter mon geste, ils m’ont envoyé ce bruit insoutenable pour me repérer. J’essaye de me persuader que Mila s’est déjà réfugiée quelque part, et que c’est donc certainement moi, le gibier principal. C’est sur moi que va se jeter la meute. Je serre instinctivement le cube métallique dans ma main. Je ne sais pas comment je vais pouvoir me sortir de là, le sang cogne contre mes tempes, je sens des crampes dans tous mes muscles. Je ne peux pas supporter l’idée qu’ils m’attrapent, j’ai vu tant de corps de camarades, les doigts triturés, les dents arrachées, la peau brûlée par l’électricité.
J’entends la sirène d’un des bateaux qui arrivent au port, à présent j’en suis à deux blocs de distance. Je joue ma dernière carte. Je me mets à courir. Je cours tant que je peux, le cube dans la main. Je cours tout en jetant du lest, je me débarrasse de tout ce qui est traçable, ma montre, le mini-récepteur, l’imperméable climatisé. C’est à peine si je vois les gosses des rues se précipiter sur les petits trésors que je sème derrière moi. J’entends dans mon dos les sirènes des voitures blindées qui se rapprochent, mais je me retourne pas, je continue jusqu’au débarcadère et je replonge dans la cohue des passagers empressés, qui descendent des ferries en se bousculant pour ne pas arriver en retard au boulot. Je me fraie un passage avec brusquerie, ils m’ouvrent une voie. Plusieurs agents de la police portuaire font leur apparition, essayant de m’arrêter en me frappant, mais j’esquive leurs coups, je pousse une vieille dame qui est restée paralysée sur mon chemin, les insultes pleuvent, la femme hurle. Un vigile sur un ferry utilise sa radio, je crois entendre deux coups de feu. Mais j’ai déjà sauté du quai, je reste un instant suspendu dans les airs, puis je plonge dans l’eau sale. Je coule, sans lâcher le cube, le peuple libre se noie avec moi, je ne peux pas le lâcher.
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