Elles étaient veuves et sexagénaires toutes les deux. Aigries, elles vivaient mal de petites rentes laissées par des maris morts au travail et elles en voulaient à tout le monde de leur jeunesse perdue, de leurs existences ratées, de la gêne où elles se débattaient. Elles en voulaient à tout le monde et principalement, à la belle Domenica Subiaco qui, avec son époux, tenait le café-restaurant « La Belle Véronaise » dans la Via Sottoriva qui longe l’Adige. Domenica était jeune et très jolie, ce qui suffisait largement à irriter les femmes du quartier et de plus, il semblait qu’elle fût de mœurs dissolues ce qui excitait les indignations les plus vertueuses et les envies les moins avouables.