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Citation de Partemps


Qu'est-ce que c'est, un adulte. C'est quelqu'un qui est absent de sa parole comme de sa vie - et qui le cache. C'est quelqu'un qui ment. Il ment non sur telle ou telle chose, mais sur ce qu'il est. Un enfant devient adulte quand il est capable d'un tel mensonge profond, essentiel. J'usais donc, avec plus ou moins d'habileté, de cet art du semblant. J'en usais sur un temps très court. Il me semblait importun de dire en vingt lignes ce qui pouvait l'être en dix. Un mot souvent suffit. Et même aucun. Pour toutes ces raisons, j'ai d'abord eu envie de vous répondre : "Ce qui donne un sens à ma vie ? Rien, et surtout pas l'écriture". Car je suppose que vous m'interrogez en raison des quelques livres que j'ai écrits. On demande toujours beaucoup trop aux écrivains. Comme s'ils détenaient un savoir abondant, disponible jour et nuit. Comme si l'on écrivait à partir d'un savoir. C'est l'inverse qui est vrai : on ne peut bien écrire que de ce qu'on ignore. On ne peut bien écrire qu'en allant vers l'inconnu - et non pour le connaitre, mais pour l'aimer. Philosophe et mystique ont beaucoup brodés sur ce thème. Beaucoup tissés de lourd manteaux. Les philosophes m'ennuient. Leur langue est amère. Leur désir est bien trop impatient pour être jamais comblé. Les mystiques m'enchantent quand ils vivent d'amour et d'eau pure, non quand ils pensent. On ne peut pas penser quand on est amoureux. On est trop occupé à brûler sa maison. On ne garde aucune pensée pour soi. On les envoie toutes vers l'aimée, comme des colombes, comme des étioles, comme des rivières. Quand on est amoureux, on est ivre. On est comme cet homme, hier, dans la rue. Il avançait, étourdi de boisson. La voix forte, le geste ample, il s'entretenait avec lui-même. Il a soudain fouillé dans son manteau, en a sorti de l'argent qu'il a jeté, par poignées, sur la route. Puis il s'en est allé, dédaigneux de sa fortune. Délié de soi. Dépris de tout royaume. Oui, on est un peu comme ça, quand on est amoureux. On vide ses poches, on perd son nom. On découvre avec ravissement la certitude de n'être rien. (...)
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