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Citation de chris49


Ce fouillis des chambres d'enfants, vous le retrouvez dans la chambre d'écriture. Cette manie de garder près de soi une brindille, une pierre, un silence, vous la retrouvez dans l'histoire de Pascal, dans l'histoire dite du Mémorial : dans la nuit du lundi 23 novembre 1654, Pascal écrit quelques phrases qui n'iront dans aucun livre. Il note une chose qu'il a vue d'un regard pour toujours. Il retient une lumière dans cette nuit-là pour toute la nuit du monde. C'est une étoile au front de Dieu. C'est un soleil dans l'encre noire. Il écrit sur un papier qu'il coud ensuite dans la doublure de son pourpoint. Les déliés de l'encre sont désormais invisibles pour quiconque, et d'abord pour leur auteur. Du moins peut-il, par une légère pression de la main sur l'étoffe, entendre le froissé du parchemin. Huit années passent. Huit années glissent sur le grain du papier sans le corrompre. Le 19 août 1662, à une heure du matin, Pascal agonise. Il est comme un enfant, perdu dans une école glacée et vide. Il meurt et s'égare dans les milliers de jours où tout renaît, sans lui. L'effacement de cet homme sous un peu de terre, puis, plus profond encore, sous son propre nom, nous a rendu sa pensée familière. Nous avons rassemblé ses écrits dans le fond d'un livre. Nous avons appris à entendre ses paroles dures comme l'or. Mais la grâce nous fait défaut, qui nous permettrait de lire cette feuille de novembre 1654 - cette mince cloison de papier entre son cœur et le monde. Cette feuille de trois fois rien. Elle lui mangeait ses forces. Elle lui donnait comme un corps de lumière, brûlé jusqu'au sang. Elle faisait de son cœur une chambre d'enfant, d'un désordre incroyable.
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