S'il retrouvait Ariane, Vincent n'oserait plus caresser sa peau. Ses mains avaient atteint des proportions qu'il ne reconnaissait pas. Dures, les doigts gonflés, leur enveloppe épaisse, rugueuse et sèche; elles s'étaient métamorphosées. La corne qui les recouvrait était si aride que, même lorsqu'il les lavait, longuement, soigneusement, elles ne s'attendrissaient pas. Il restait toujours une constellation de fissures noires qui s'enfonçaient profondément dans l'écorce de ses paumes, de ses phalanges. La terre les avait tatouées de son empreinte indélébile en s'infiltrant dans les gerçures et les crevasses qu'avaient entaillées deux hivers en Allemagne.