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Citation de marinos22898


Vous oubliez ces « morts » infligées par une simple parole malheureuse, blessante, humiliante, meurtrière, prononcée contre vous. Nous les connaissons tous. Une ignoble vacherie peut vous renverser. Votre amour vous apprend un matin qu’il ne vous aime plus : il vous tue. Ce sont des expériences que nous avons tous vécues. Dans ces moments-là, nous prenons conscience de l’effroyable pouvoir de la parole. A contrario, si la parole vous tue, elle peut vous rendre la vie. J’ai eu une adolescence extrêmement pénible : j’avais l’impression de vivre dans un néant absolu. Je me détestais. J’avais l’impression partout d’un défaut d’amour si affreux. Je ne maîtrisais rien. Je subissais tout. Et cette incapacité à saisir l’attelage de ma vie me sortait du monde. La parole des écrivains a été alors pour moi une source de réconfort incomparable. Et pas seulement celle des écrivains que je vénérais, comme Balzac, mais quelqu’un d’aussi profondément antipathique que Montherlant m’a transmis aussi quelque chose – ne serait-ce qu’à travers ses Jeunes Filles. Je le lisais et relisais à quatorze ans. De lui aussi je recevais une invitation à voir plus loin que ma vie sans qualité. Cette parole m’a sauvée. Et ce n’est pas une métaphore ! Je n’étais donc pas dans le néant. Ces écrivains témoignaient, chacun selon son génie propre, d’une autre réalité, de la réalité d’autre chose.
Je suis toujours étonnée, quand je vais dans les librairies, de passer devant ces rayonnages de livres qui « font du bien ». Le bien-être me déprime. Je ne dois pas être normale. À côté de cette littérature-là, un très grand livre, s’il me raconte une histoire effroyable avec un sens de la maîtrise, de la beauté, de la verticalité, m’aidera considérablement à vivre. Relisez La Cousine Bette : voilà le portrait d’un être néfaste, méchant, affreux, mais quelle force de vie ce roman vous donne 
Amélie Nothomb
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