Au début, je me souviens j’ai voulu fuir. Si je ne l’ai pas fait, c’est que j’étais trop faible sans doute, mais il y avait autre chose encore : ce besoin de voir que me dictaient mes yeux, ce besoin d’arpenter qui ranimait mes membres endoloris, ce besoin de recueillir la moindre bribe de parole ou alors de parler en lieu et place du mutisme des autres, d’articuler quand ils ne pouvaient plus que gémir, de penser des pensées d’hommes alors que les hommes avaient cessé d’être des hommes, réduits à la chair souffrante et à l’angoisse terrifiée d’eux-mêmes.