Danièle Couture

Comme bien des hommes, semble-t-il, il n’était pas prêt. Il souhaitait que je me fasse avorter. J’ai refusé. Il m’a dit qu’il valait mieux attendre que l’on désire cet enfant, qu’il voulait vivre avant, qu’on profite encore l’un de l’autre pendant qu’on était encore deux. Aussi, qu’il avait beaucoup étudié et qu’il voulait jouir encore de sa liberté avant de s’embarquer avec une famille. Tout ça, je le comprenais, mais le problème, c’est qu’il était déjà là, notre petit bébé ! Nous étions déjà trois. C’est sûr que nous, les femmes, on ressent plus ces choses, car c’est dans notre ventre que ça se passe, mais quand même… Je lui ai rappelé ses paroles, qu’avoir DES enfants, c’était une condition es-sen-tiel-le à notre mariage ! Et puis, sans vouloir tourner le couteau dans la plaie, je lui ai aussi remémoré la promesse qu’il m’avait faite de se retirer « juuuuste à temps », alors que moi, je ne voulais pas qu’on prenne de risques ! Il a répondu que, nous autres, les femmes, on était bien bonnes pour toujours en remettre par-dessus.

Hum ! Là-dessus, je dois dire qu’il avait un peu raison, on a le don de gruger « après le nonosssse » bien longtemps…

Philippe a ajouté :

— Là, ce n’est pas le bon moment pour un bébé, on en refera un autre plus tard…

Un autre plus tard…

J’ai répliqué, certaine de mon argument :

— Mais c’est d’un enfant, qu’on parle, et cet enfant ne sera jamais le même qu’un autre ! Nous nous aimons, nous nous marions dans un mois, qu’est-ce qu’un an ou deux de plus pourront changer ? Je te rappelle que c’est dans l’amour que nous l’avons conçu, notre petit bébé !

Je n’ai rien contre l’avortement, mais je trouvais que nous n’avions pas de raisons valables pour nous y résigner. Et en plus, à l’âge que nous avions, ça me semblait être le moment idéal.