AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Charybde2


Lisbeth Salander sortait des vestiaires après sa séance d’entraînement, quand elle fut rattrapée dans le couloir par le surveillant-chef Alvar Olsen. Il lui déballa un blabla exalté. Il semblait tout excité. Il gesticulait et brandissait des documents. Mais Lisbeth ne saisissait pas un mot de ce qu’il disait. Il était 19 h 30.
C’était l’heure la pire à Flodberga. L’heure où le fracas du train de marchandises qui longeait la prison faisait trembler les murs, où les trousseaux de clés cliquetaient dans le couloir, où l’air se chargeait d’effluves de parfum et de transpiration. 19 h 30 était, pour les prisonnières, le moment le plus dangereux de la journée. C’était alors, à la faveur du boucan de la voie ferrée et de l’agitation générale provoquée par la fermeture imminente des portes des cellules, qu’avaient lieu les pires agressions. Lisbeth Salander inspectait toujours le quartier à cette heure-là, et ce ne fut sans doute pas un hasard si elle aperçut Faria Kazi à cet instant précis.
Faria Kazi était une jolie jeune femme, originaire du Bangladesh. Elle était assise dans sa cellule, sur la gauche. Même si, delà où se trouvait Lisbeth, elle ne pouvait voir qu’une partie de son visage, il ne faisait aucun doute qu’elle recevait des gifles. Sa tête basculait de part et d’autre sans interruption et, bien que les coups ne fussent pas particulièrement violents, ils avaient quelque chose de rituel et de coutumier. Quoi qu’il fût en train de se passer, ça durait depuis un moment. Le geste humiliant de l’agresseur en témoignait, tout comme l’attitude résignée de la fille. Même à distance, on sentait que le rapport de domination était bien ancré, avait brisé toute volonté de résistance.
Aucune main ne tentait d’arrêter les gifles et le regard ne traduisait nul étonnement, juste une peur sourde. Faria Kazi vivait dans la terreur. Il suffisait à Lisbeth d’observer son visage pour s’en rendre compte. Et cela corroborait ses observations des dernières semaines.
– Là, dit-elle en indiquant la cellule de Faria.
Mais le temps qu’Alvar Olsen tourne la tête, c’était déjà fini. Alors Lisbeth s’esquiva et retourna dans sa propre cellule, dont elle referma la porte. Elle entendit des voix et des rires étouffés derrière la cloison, se mêlant au bruit du train de marchandises qui semblait ne jamais vouloir s’arrêter de gronder et de faire trembler les murs. Devant elle se trouvaient un lavabo immaculé, un lit étroit, une petite bibliothèque, un bureau couvert de calculs de mécanique quantique. Elle fut tentée de reprendre ses calculs pour essayer de trouver une gravitation quantique à boucles. Puis, baissant les yeux, elle s’avisa qu’elle avait quelque chose dans la main.
C’étaient les documents qu’Alvar avait agités sous ses yeux quelques instants plus tôt. Sa curiosité en fut piquée. Mais ils se révélèrent sans intérêt – un test d’intelligence orné de deux taches de café en haut de la première page. Elle rechigna.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}