Delphine Gervais de Lafond

Le postimpressionnisme caractérise une manière de peindre née à la fin du XIXe siècle en opposition à l’impressionnisme. (...)
Derrière cette appellation vague se cachent en réalité trois peintres français : Paul Cézanne, Paul Gauguin (1848-1903) et Vincent Van Gogh (1853-1890).
Ces artistes ont chacun un style très différent, immédiatement reconnaissable. Leur approche de la peinture s’éloigne de celle des impressionnistes, dans la mesure où ils ne souhaitent pas représenter la réalité telle qu’ils la perçoivent (visuellement), mais plutôt telle qu’ils la conçoivent (mentalement). Pour y parvenir, ils jouent avec les couleurs, reconstruisent l’espace du tableau et questionnent les règles de la perspective. Expression et liberté sont les maîtres-mots de leur art. Considérés par leurs successeurs comme les pères de la modernité, ils livrent des compositions audacieuses ouvrant la voie aux avant-gardes du XXe siècle – cubisme, fauvisme, surréalisme, etc.

On retrouve parfois sous l’appellation « postimpressionnisme » d’autres courants picturaux de la fin du XIXe siècle tels que le néo-impressionnisme (dit aussi pointillisme), le symbolisme ou encore les peintres nabis.

Contexte
Le postimpressionisme

Le terme « fauve » vient du critique d’art Louis Vauxcelles. (...)
Cet adjectif a perduré en histoire de l’art pour désigner l’utilisation audacieuse de la couleur par certains peintres tels qu’Henri Matisse (1869-1954), Maurice de Vlaminck (1876-1958), Raoul Dufy (1877-1953) ou André Derain (1880-1954). Héritiers de Gauguin, Cézanne et Van Gogh, les fauves ne se contentent pas de représenter strictement la réalité : ils jouent avec les couleurs en bouleversant les codes picturaux. Pour eux, un tronc d’arbre peut aussi bien être vert que rouge ou jaune.

Les artistes fauves

Quand Cézanne peint la Sainte-Victoire à la fin du XIXe siècle, la montagne a déjà prêté sa silhouette à de nombreux artistes. C’est un site très prisé des peintres provençaux. Jean-Antoine Constantin (1756-1844), François Marius Granet (1775-1849), Émile Loubon (1809-1863), Adolphe Monticelli (1824-1886) ou encore Paul Guigou (1834-1871) ont tour à tour été attirés par cet imposant massif calcaire, paradis des randonneurs.

Sélection d'œuvres
La Sainte Victoire en majesté

L’Académie des beaux-arts exerce au XIXe siècle une grande autorité dans le domaine artistique. Tous les peintres souhaitant faire carrière se doivent de suivre les enseignements de cette vénérable institution. Le Salon, l’exposition officielle de peinture, présente les meilleurs tableaux, sélectionnés selon des critères rigoureux. Ainsi, pour espérer être exposés au Salon, les peintres ont tout intérêt à se plier aux règles strictes émises par l’Académie, qui dicte le style et les thèmes des œuvres. Cette rigidité bride toute créativité.
Mais, à la fin du XIXe siècle, les conventions auxquelles doivent répondre les œuvres ne trouvent plus d’écho auprès de la jeune génération. Certains artistes refusent alors de soumettre leurs toiles au jury du Salon et se réunissent autour d’expositions marginales au cours desquelles ils remettent en question l’héritage classique, avec des œuvres qui se veulent innovantes. Gustave Courbet (1819-1877), Édouard Manet (1832-1883) et, à leur suite, les impressionnistes sont les premiers à rompre véritablement avec l’art académique.

Contexte
L'académie des beaux arts

Mais les préraphaélites ne veulent pas peindre la société telle qu’elle est. Convaincus que l’art est un formidable vecteur d’imagination, ils cherchent leur inspiration dans la religion, la littérature et la poésie. Quant à leur style pictural, il se caractérise par un traitement très vif de la couleur allié à une parfaite exécution au rendu léché.

Pour Cézanne, un peintre doit dépasser la simple observation du réel afin de capturer l’essence même des choses. En cela, il rejoint les impressionnistes, mus par la volonté de saisir, à partir d’un paysage, d’un portrait ou d’une nature morte, une atmosphère et une lumière particulières.

Caractéristiques
Capturer l'essence des choses

Mais deux artistes français du XIXe siècle prennent rapidement place dans le cœur de Cézanne aux côtés des maîtres anciens : Eugène Delacroix (1798-1863) et Gustave Courbet (1819-1877). Du premier, il admire la violente passion, du second, le réalisme poussé à l’extrême. Cézanne copie une vingtaine des œuvres de Delacroix, parmi lesquelles la célèbre Barque de Dante (1822), qu’il découvre au Louvre en 1863. Son plus bel hommage au maître romantique est une toile qu’il laisse inachevée : L’Apothéose de Delacroix (vers 1890-1894). L’ombre de Courbet plane elle aussi dans certaines œuvres de Cézanne, comme sa Léda au cygne (vers 1880), qui n’est autre qu’une réinterprétation de la Femme au perroquet (1866) du peintre réaliste. Aux yeux de l’artiste aixois, chaque détail d’un tableau de Courbet vibre à travers la toile.


Biographie
Les années parisiennes

La seule manière d’insuffler la vie à ses modèles est d’exacerber – de caricaturer – la réalité, en renforçant la couleur et en simplifiant la forme. La couleur est, selon l’artiste, l’unique solution pour se rapprocher d’une certaine vérité. Quant au recours aux figures géométriques, c’est une manière de synthétiser son sujet en se concentrant sur l’essentiel : les formes présentes dans la nature se transforment donc en cylindres, en sphères ou encore en cônes. Dans ses natures mortes aux pommes ou aux oranges, le réalisme importe peu : seul compte le dynamisme de l’ensemble. Ainsi, Cézanne n’hésite pas à contourner les lois de la perspective pour donner plus de force et de rythme à ses compositions.

Caractéristiques
Capturer l'essence des choses

Les premières années de Paul Cézanne sont marquées par l’influence des peintres de la Renaissance, d’Eugène Delacroix et de Gustave Courbet. (...)
Au contact des impressionnistes, Cézanne éclaircit sa palette, travaillant des tons plus clairs, et fragmente sa couleur en touches plus petites, qu’il appose les unes à côté des autres. L’artiste fait ainsi disparaître les lignes de contour dans les formes, comme c’est notamment le cas dans La Maison du docteur Gachet à Auvers (1873) ou dans La Montagne de la Sainte-Victoire vue du chemin de Valcros (1878-1879). Ainsi, ses toiles réalisées dans les années 1870 se rapprochent du style de Pissarro ou de Renoir.

Caractéristiques
De l'ombre à la lumière

Né le 19 janvier 1839 à Aix-en-Provence, Paul Cézanne est issu d’un milieu aisé et élevé dans le but de reprendre l’entreprise familiale. Son père, Louis-Auguste Cézanne, est propriétaire d’une chapellerie et d’une banque à Aix-en-Provence. Paul Cézanne est l’aîné et le seul garçon de la famille : il a deux sœurs. Il mène une scolarité sans encombre au collège Bourbon, où il se lie d’amitié avec Émile Zola (1840-1902). Les deux garçons deviennent vite inséparables. Suivant la trajectoire voulue par son père, en 1858, Cézanne entame des études de droit.

Biographie
Une enfance en Provence