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Citation de enzo92320


Pourquoi le hasard a-t-il placé ce garçon sur mon chemin ? Pourquoi devait-il m’infliger son insupportable vivacité ? Fallait-il que cela arrive un jour ?

Je l’ai marqué longtemps, attentif et méthodique, palliant mes lenteurs par les ficelles du métier. Puis mes gestes m’ont échappé ; ils retardaient. Les plats de pied tournaient, les appuis vacillaient et les ballons à disputer devenaient d’harassantes épreuves. Je suais trop. Mes nerfs s’aiguisaient. Aux deux tiers du match, je n’en pouvais plus. Le jeune gars a râlé :

- « Changez d’aile les mecs, variez. Ici ça passe ! J’le mets dans ma poche les doigts dans le pif, i’ broute le gros. » Ces mots et cet accent du faubourg me causèrent une immense douleur. Je ressemblais désormais aux faibles que je charriais jadis : chevreau, chevrette et compagnie ! La déchéance était accomplie puisque maintenant on se moquait de moi, ouvertement. Le petit gars pétait l’arrogance. Ses copains se mirent à le servir posément. La stratégie du gruyère ! Le trou, c’était moi. Alors je l’ai fixé intensément, le plus fort que je pouvais. Je ne l’ai plus lâché d’un crampon. Peu m’importait l’évolution du jeu, les jambes du type étaient devenues mon seul et unique objectif. J’épiais leur ronde, leurs attentes, leurs faux semblants et avant que la balle ne leur parvienne, je jaillissais déjà. Il comprit très vite mes dispositions. D’abord il s’exila dans un coin du terrain, loin de l’action, pour se laisser oublier. Puis, las de sa diversion, il modifia sa tactique. Ses courses quadrillèrent le champ de jeu. Il se trouvait partout en appui, proposant son aide pour redoubler les passes, à l’aile pour soutenir le véritable ailier, derrière pour relancer de loin les vagues. Trois giclées de cette cadence et mon cœur explosait ! Suivre ses chevauchées de gosse devenait impossible. A droite, à gauche, je cherchais de l’aide. Les copains, au contraire semblaient me reprocher les espaces laissés libres entre le type et moi. Alors je me suis affolé. M’approchant de lui lorsqu’il prit le ballon, je l’ai frappé violemment du pied, à mi-tibia. Il a hurlé. S’est roulé à terre pendant quelques secondes puis s’est relevé. Je ne me souviens pas avoir remarqué la haine dans ses yeux quand il s’est approché de moi. Trop près de moi. Pourquoi l’ai-je frappé au visage ? Je ne le sais pas.
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